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Quelle gouvernance territoriale pour la transition énergétique ?

Le groupe de travail "gouvernance" propose une vingtaine de mesures pour une transition "douce" via un renforcement du rôle des citoyens et des territoires. Les compétences en matière de distribution publique de l'énergie posent toujours question.

Energie  |    |  R. Boughriet

Le groupe de travail du débat national sur la transition énergétique, initié en novembre 2012, dédié à la gouvernance a présenté le 25 avril les conclusions de ses travaux, avec une vingtaine de propositions (1) ayant fait "consensus" entre les entreprises, les ONG, les collectivités, les parlementaires ou syndicats, et "des points de dissensions".

Alors que le gouvernement a présenté le 10 avril son projet de loi sur la décentralisation, le groupe de travail s'est penché sur la répartition des rôles entre l'Etat et les collectivités et des leviers mis à disposition pour un pilotage de véritables politiques territoriales de l'énergie. Le groupe de travail s'est également penché sur une plus grande implication des citoyens dans les questions énergétiques et climatiques locales, et l'association des acteurs économiques de l'énergie dans les projets pour une transition énergétique.

"Le thème de la gouvernance est un champ vaste mais assez peu défini", a indiqué Ronan Dantec, sénateur de Loire-Atlantique Europe Ecologie Les Verts (EELV) et coordinateur du groupe de travail. "Nous avons élaboré des propositions qui font consensus et opérationnelles". De manière générale, l'ensemble des participants "a fait part de son attachement aux principes de service public et de solidarité". Les 25 mesures du rapport "sont cohérentes avec les travaux des  groupes de travail efficacité et sobriété ou EnR", a ajouté Raphaël Claustre, directeur du comité de liaison énergies renouvelables (Cler) et rapporteur du groupe. Il s'agit de mesures pour "une transition douce" qui ne sont certes "pas révolutionnaires mais elles sont fortes et ont des chances d'aller au bout", estime M. Claustre.

Quelle dimension territoriale et citoyenne ?

Si le débat prévoit le 25 mai une journée citoyenne au cours de laquelle des débats seront organisés dans 26 régions, plusieurs propositions renforcent également la participation du public à la transition énergétique territoriale. Elles visent à rendre'' plus transparentes" les informations et "certaines décisions en matière énergétique''. Parmi elles, le groupe de travail recommande de renforcer les espaces info énergie (EIE) en matière d'accompagnement à la réalisation des travaux d'amélioration de la performance énergétique des logements et tendre vers la création d'un service public de l'efficacité énergétique. Alors que les EIE jouent déjà "un rôle de conseil auprès du grand public depuis 2001", ils sont pilotés au niveau local par les syndicats d'énergie ou les départements, et coordonnés au niveau régional par les régions et par l'Ademe. Le groupe propose de doter les EIE, d'un "statut légal" jusqu'ici absent afin "d'assurer une bonne couverture du territoire et de pérenniser leur financement", dans l'esprit du service public de la performance énergétique de l'habitat, institué par la loi Brottes adoptée le 11 mars dernier par le Parlement et du guichet unique de la rénovation énergétique, annoncé le 21 mars dernier dans le cadre du plan d'investissement gouvernemental pour le logement. Un rapport du gouvernement doit être fourni avant le 11 décembre 2013 sur le statut des espaces info énergie.

Autre mesure "convergente" avec le groupe de travail "EnR", selon Raphaël Claustre : le financement de projets citoyens d'énergies renouvelables en simplifiant la contrainte administrative d'obtention d'un visa de l'Autorité des marchés financiers pour l'émission d'une offre publique de titres financiers pour ces projets. Le groupe des experts sur la transition énergétique a été saisi "pour préciser la forme de cette simplification. Son avis devra intégrer les risques financiers potentiels de tels projets". Pour les ONG environnementales FNH, Humanité et Biodiversité, FNE ainsi que le Cler et le Réseau action Climat France, cette proposition de simplification "de la mise en oeuvre de projets citoyens doit être menée jusqu'au bout car c'est un élément essentiel de la démocratisation des enjeux énergétiques".

S'agissant des compteurs communicants énergétiques de type Linky pointés par les associations de consommateurs et des factures, le groupe de travail appelle également à améliorer la disponibilité, la lisibilité et la compréhension des "informations concernant la consommation d'énergie, comparée à des consommations passées ou de référence", le tout "dans l'intérêt des consommateurs".

Saluées par les associations environnementales et le Cler, plusieurs recommandations visent à donner des compétences plus importantes aux collectivités, "condition nécessaire à l'exploitation des ressources territoriales que sont les économies d'énergie et les énergies renouvelables", estiment les organisations. Dans une logique de décentralisation "au plus près possible du « bassin de vie »", le renforcement des compétences des territoires s'articulerait entre les schémas régionaux climat-air-énergie (SRCAE), les plans climat énergie territoriaux (PCET) et les plans climat énergie patrimoine et service, explique le groupe de travail. Ainsi, le SRCAE serait "co-construit" avec l'ensemble des acteurs, sous la responsabilité du président du Conseil régional, en associant les services de l'Etat. Ce schéma régional doit être "cohérent" avec les objectifs nationaux (mix énergétique, évolution de la consommation, réduction des émissions de gaz à effet de serre), discuté avec l'Etat, recommande-t-il.

Concernant les PCET : cette compétence du bloc communal ''peut être transférée à un niveau de collectivité plus large (Pays, PNR, syndicat mixte du SCOT)''. Le groupe de travail propose également une ''mise en cohérence'' avec les objectifs du PCET des autres documents  de planification "structurants du bloc communal" relatifs à l'urbanisme, à l'habitat et aux déplacements  (2) (PDU, PLU, PLH …) (3) . Le Plan climat énergie patrimoine et service serait quant à lui mis en œuvre "par toute collectivité, quelle que soit sa taille, pour la maîtrise de l'énergie et la réduction des émissions de gaz à effet de serre pour les services et bâtiments directement sous sa responsabilité", propose-t-il.

D'autres propositions du rapport visent également à associer davantage les acteurs économiques aux PCET et aux SRCAE notamment à travers des pactes "territoriaux" et "industriels" en partenariat avec les collectivités territoriales et l'Etat, afin de "faciliter la mise en œuvre des investissements et la réalisation de projets". Ce qui permet, via ces pactes, d'inviter les acteurs économiques "à se lancer dans cette transition en douceur", selon Raphaël Claustre.

Pas de proposition sur la distribution de l'énergie ni sur le secteur pétrolier

Les relations contractuelles entre autorités concédantes (collectivités) et concessionnaires (opérateurs nationaux) de la distribution de l'énergie ont également été abordées par le groupe de travail qui a pointé "des difficultés" dans ces relations, notamment liées à "l'insuffisance des outils de régulation locale". Mais les acteurs du groupe de travail ont des "divergences" sur ce sujet majeur du débat. Les collectivités "savent réguler de manière optimale la distribution d'énergie sur leur territoire en cohérence avec la régulation nationale", estime l'association d'élus Amorce. Les collectivités ont exprimé "le besoin de leviers d'action" sur les réseaux pour mettre en œuvre leur politique en matière de maîtrise de l'énergie et de développement des énergies renouvelables. D'autres participants considèrent pour leur part que le caractère national et indépendant de la régulation (Commission de régulation de l'énergie (CRE) en tête) "est essentiel et que c'est le cadre national de la régulation qui assure la pérennité de la péréquation tarifaire à laquelle les Français sont attachés", explique le rapport.

Autre objet de désaccord au sein du groupe : certains participants proposent de renforcer la transparence des concessions, "d'instituer des pénalités telles que prévues par la loi du 13 juillet 2005, dite « loi POPE », en cas de constatation de niveaux de qualité non atteints et de permettre la substitution de la collectivité à l'opérateur ou de recours à un opérateur de service public local selon des circonstances et des modalités prédéfinies".

Le groupe n'est pas non plus parvenu "à un accord sur la création de régies locales" pour la maîtrise publique de la production d'énergie, a indiqué Ronan Dantec.

"Au vu de l'importance de cette question des réseaux de distribution et de leur gouvernance qui nécessite des échanges approfondis", le groupe propose la création d'un groupe de travail spécifique prolongeant les travaux sur la distribution d'énergie autour de l'équilibre des relations entre concédants et concessionnaires. Certains participants proposent de travailler "sur les modalités d'une plus grande indépendance des distributeurs d'énergie envers les fournisseurs".

De même, le secteur pétrolier, "central dans notre système énergétique, a été évoqué en séance, mais n'a pas fait l'objet de propositions spécifiques", ajoute le rapport.

Autre point de désaccord du groupe : l'opposabilité des schémas régionaux climat air énergie (SRCAE) proposée par certains participants, "c'est-à-dire que les autres documents de planification, voire les grands projets d'énergie soient compatibles avec leurs orientations", explique le rapport. D'autres participants insistent "sur la nécessité de les coordonner avec l'indispensable vision nationale et de les inscrire dans une planification pluriannuelle nationale, afin d'assurer les grands équilibres énergétiques, économiques et sociaux de la politique du pays et la solidarité territoriale à laquelle l'ensemble des participants est attaché".

Or, le rapport reste "très peu ambitieux en ne proposant pas une réelle décentralisation des compétences en matière d'énergie ainsi qu'un renforcement des échelons essentiels que sont les intercommunalités et les régions", ont déploré les associations environnementales et le Cler. De son côté, Cyril Roger-Lacan, membre du comité d'experts sur la transition énergétique, a appelé à la "prudence à rendre obligatoire et opposable le SRCAE". Les experts ont "tendance à privilégier l'initiative aux obligations", a-t-il prévenu.

Un Conseil supérieur d'orientation de la transition énergétique

Concernant le rôle de l'Etat : dans un contexte de décentralisation, il "doit jouer un rôle de stratège" et "garantir la sécurité d'approvisionnement" via les programmations pluriannuelles des investissements (PPI), établies par l'autorité administrative, préconise le groupe de travail. Ces PPI portant aujourd'hui sur la production électrique, la production de chaleur et le gaz "doivent être soumises au Parlement". La "réussite" de la transition énergétique passe également "par la clarification du rôle de l'Etat dans la gouvernance des opérateurs énergétiques dont il est actionnaire", recommande le groupe.

Autre proposition institutionnelle ayant fait un total consensus : transformer le Conseil supérieur de l'énergie (CSE) en "Conseil supérieur d'orientation de la transition énergétique". Il assurera à la fois "sa mission consultative sur les textes réglementaires et le suivi de la mise en œuvre des engagements sur la transition énergétique". Reste encore à préciser son mode de fonctionnement et sa composition qui "devra être complétée pour s'assurer du pluralisme de ses membres dans l'esprit de la gouvernance à six et de leur représentativité". (4)  Le futur Conseil supérieur d'orientation de la transition énergétique est "au cœur des orientations stratégiques et des avis sur les PPI. Il sera le garant de l'accès à l'information des consommateurs", a fait valoir Ronan Dantec.

1. Pour télécharger le rapport du groupe de travail "gouvernance".
http://www.transition-energetique.gouv.fr/sites/default/files/rapportfinalgt5_mef.pdf
2.  Programme local de l'habitat (PLH) plan de déplacements urbains (PDU)3. Programme local de l'habitat (PLH), plan de déplacements urbains (PDU), plan local d'urbanisme (PLU).4. Représentation des territoires ultramarins, du CESE, des universités, des syndicats professionnels des Industries électriques et gazières déjà présents au CSE

Réactions2 réactions à cet article

Bonjour, très intéressant ! Où peut-on lire les rapports des groupes de travail ?

Semifelis | 26 avril 2013 à 19h36 Signaler un contenu inapproprié

Bonjour,

Les rapports devraient être mis en ligne cette semaine sur le site dédié au débat national sur la transition énergétique sur www.transition-energetique.gouv.fr :
http://www.transition-energetique.gouv.fr/sites/default/files/rapportfinalgt5_mef.pdf

La rédaction | 29 avril 2013 à 11h15 Signaler un contenu inapproprié

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