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Eau : les acteurs s'organisent pour un meilleur partage

Un rapport sur la sécurité de l'eau, publié par le CGDD, présente plusieurs initiatives publiques ou privées visant à organiser le partage de l'eau entre usages. Elles sont basées sur l'allocation de quotas ou la rémunération des économies d'eau.

Eau  |    |  S. Fabrégat
Eau : les acteurs s'organisent pour un meilleur partage
Environnement & Technique N°332
Cet article a été publié dans Environnement & Technique N°332
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Un rapport publié le 11 décembre par le Commissariat général au développement durable (CGDD) fait le point sur la sécurité de l'eau (1) en France. "Elle correspond à une gestion intégrée qui permet d'assurer aux différents usages de l'eau (dont l'usage pour les écosystèmes) une eau de qualité en quantité suffisante, tout en se protégeant de manière socialement acceptable (coût raisonnable d'une protection afin d'atteindre un niveau de risque acceptable) du risque inondation".

Les principaux risques qui pèsent sur l'eau sont quantitatifs et qualitatifs : excès (risque d'inondation), pénurie (risque de sécheresse), pollution (risque chimique ou organique)…

Les usages de l'eau en France

Chaque année, sur les 168 milliards de m3 de ressource en eau renouvelable en France, 20% sont prélevés. Avec une tendance à la baisse : en 2009, 33,4 milliards de m3 d'eau ont été prélevés pour les activités humaines, contre 34 Mds en 2011. En 2007, la production d'énergie représentait 64% des prélèvements, contre 18,3% pour les usages domestiques et 12,4% pour l'agriculture.
Cependant, une partie de ces prélèvements est restituée aux milieux. Si on prend en compte ce fait, l'énergie pèse pour 22% des prélèvements nets, les usages domestiques 24% et l'agriculture 48%.

En France, note le CGDD, "l'arbitrage se fait entre les usages de l'eau, beaucoup plus qu'entre les risques. Ainsi, dans le cas de la gestion du risque de déficit quantitatif, il existe un principe de priorisation des usages pour les écosystèmes et pour l'approvisionnement en eau potable". Le rapport présente plusieurs études de cas d'arbitrage des usages, en France mais aussi à l'étranger.

Champigny : des quotas pour l'irrigation

Sur la nappe de Champigny, en Ile-de-France, un système d'allocation non marchande de quotas d'eau a été mis en place. Cette nappe est en déficit quantitatif structurel : "Peu dépendante des précipitations

saisonnières, c'est la quantité totale prélevée au cours de l'année qui compte, plutôt que la période de prélèvements". 90% des prélèvements sont liés à l'usage d'eau potable, pour l'alimentation de près d'un million de Franciliens, tandis que les prélèvements agricoles ne constituent que 5% des volumes prélevés.

Surexploitée, cette ressource est également dégradée en nitrates et en pesticides. Outre la gestion des eaux pluviales, un programme de lutte contre le gaspillage de l'eau et des mesures en faveur d'une réduction des intrants (agricoles et non agricoles), une expérimentation d'allocation annuelle de quotas a été mise en place en 2010 afin d'organiser une gestion collective de l'irrigation.

Basée sur le volontariat, cette expérimentation vise à toucher un maximum d'agriculteurs. Des incitations fortes ont donc été mises en place. Les agriculteurs qui ne sont pas volontaires s'exposent à des mesures de restriction en cas de sécheresse, qui peuvent aller jusqu'à une interdiction totale d'irriguer. "Au contraire des agriculteurs volontaires qui ne subiront qu'une réduction de leurs quotas restant à utiliser".

Un volume maximal dédié à l'irrigation est fixé chaque année. A partir de là, les quotas sont calculés sur la base de l'assolement de l'exploitation agricole, chaque culture étant caractérisée par un profil hydrique.

Après quatre années d'expérimentation, le CGDD constate une "bonne adhésion des agriculteurs et une bonne acceptabilité sociale compte tenu de son caractère équitable et flexible et du processus de gouvernance associé (les représentants du monde agricole ont participé à l'élaboration de la méthodologie de calcul des besoins en eau des cultures irriguées)". Cela a également permis de mieux connaître les volumes prélevés : un agriculteur qui ne transmet pas ces informations peut être pénalisé.

A terme, les volumes de prélèvements pour l'irrigation seront réduits, "en contrepartie d'un renforcement du conseil technique sur les économies d'eau à usage agricole et via des subventions pour l'acquisition de matériel permettant de réaliser des économies d'eau".

Plusieurs marchés de l'eau à travers le monde

Alors que sur la nappe de Champigny, les quotas sont non marchands, certains pays ont mis en place des marchés de quotas d'eau. C'est le cas de l'Australie, du Canada, de l'Angleterre et du Pays de Galles. Le prix de l'eau dépend de l'offre et de la demande : plus le prix de l'eau est fort, plus les acteurs sont incités à l'économie. Concernant l'agriculture, avec ce système, "l'eau ira préférentiellement aux cultures dont la valeur ajoutée est la plus importante, ce qui augmentera la productivité de l'eau", note le CGDD.

En Australie, où des marchés de l'eau ont été mis en place dès 1988, le système a peu à peu pris en compte les écosystèmes. En 2004, des quotas d'eau leur ont été réservés. "Ce sont donc les autorités publiques qui ont pris en charge le rachat sur les marchés de l'eau des volumes nécessaires à l'usage écosystémique".

A Serre-Ponçon, un partage des usages entre électricité et agriculture

Le barrage de Serre-Ponçon, dans les Alpes, permet le stockage de 450 millions de m3 d'eau en été. Conçu pour la production d'électricité (capacité de production de 6,5 Mds kWh), il fournit également de l'eau pour les usages eau potable, agricoles et industriels. "EDF doit contractuellement fournir annuellement 200 millions de m3 aux irrigants entre le 1er juillet et le 30 septembre (dont 78% avant le 31 août). Or, cette période est aussi la période pendant laquelle la production hydroélectrique est la plus sollicitée", souligne le CGDD.

En 2000, une convention d'économies d'eau pour six ans a donc été signée entre EDF et deux irrigants : EDF s'engageait à rémunérer les agriculteurs si les objectifs d'économie étaient atteints. "Cette convention a eu un tel succès que deux amendements avec des objectifs plus ambitieux ont été signés par la suite. Résultats : les prélèvements agricoles sont passés de 1997 à 2005 de 310 à 201 millions de m3 (soit une baisse d'environ 35%)".

Basé au départ sur la rivière de la Durance, le projet a été élargi au Verdon et implique de nouveaux acteurs (Agence de l'eau, collectivités…) "afin que tous s'engagent à une réduction des prélèvements en eau sur ce stock de Serre-Ponçon". Une nouvelle convention est en cours de rédaction.

"Ce cas montre que la gestion d'un risque lié à l'eau doit intégrer les autres enjeux qui ne sont pas directement liés (et notamment les éventuelles externalités positives) : les enjeux de sécurité de la production agricole et de sécurité énergétique se posent dans ce cas dans un arrangement de type contractuel entre deux parties prenantes d'un bassin, sans intervention publique", analyse le CGDD.

Il note cependant qu'avec ce système, l'eau va vers l'usage à la plus haute valeur ajoutée (la production d'électricité). "Un équilibre doit [donc] être trouvé entre les enjeux de différentes natures : la sécurité énergétique et les préoccupations environnementales ne doivent pas se mettre en place au détriment de la sécurité de la production agricole".

1. Consulter le rapport
http://www.developpement-durable.gouv.fr/IMG/pdf/ED100.pdf

Réactions3 réactions à cet article

Si l'eau est le patrimoine commun de la Nation, peut on la partager sans appropriation individuelle?

audaces | 13 décembre 2013 à 10h19 Signaler un contenu inapproprié

On voit surtout que l'eau n'est pas assez chère, a défaut d’éthique rien ne vaut le porte monnaie pour bien "sensibiliser" les différents acteurs.

lio | 13 décembre 2013 à 12h59 Signaler un contenu inapproprié

Qu'EDF fournisse des systèmes goutte à goutte aux agriculteurs ... et les économies d'eau seront monstrueuses. Les agriculteurs peinent à financer ces changements de mode de production. EDF et ses milliards peut le faire facilement. Et au final 80% d'économie d'eau pour EDF et pour les agriculteurs. Tous le monde est content.

Je ne suis pas sure que cela se fera. Il vaut mieux rémunérer qu'aider à investir, ça passe mieux l'oseille.

Terra | 17 décembre 2013 à 10h14 Signaler un contenu inapproprié

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