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Van Jones rêve de convertir les Etats-Unis aux emplois verts

Conseiller spécial du président Obama, activiste et auteur d'un best seller sur les emplois verts, Van Jones prône la justice environnementale et la fin d'un éco-apartheid qui a permis à l'économie de prospérer sur la destruction de l'environnement.

Gouvernance  |    |  A. Sinaï
   
Van Jones rêve de convertir les Etats-Unis aux emplois verts
   
Reportage à Richmond, en Californie - 2e volet

Quand il évoque un éco-apartheid, Van Jones sait de quoi il parle. Avant de rejoindre l'équipe du président Obama, il vivait à Oakland, une banlieue de San Francisco voisine de Richmond, ville ouvrière sévèrement polluée par une raffinerie pétrolière et affectée d'un fort taux de chômage. Van Jones s'est d'abord mobilisé localement, en créant Green for All, une association de soutien à la création d'emplois verts et sociaux. Son activisme et son charisme l'ont fait remarquer, et le voici invité par le président Barack Obama en personne comme conseiller à la présidence. Son succès auprès du public américain, sa capacité à remuer les consciences le classe parmi les personnalités les plus en vue aux Etats-Unis, héros de l'environnement par le magazine Time en 2008. Dans son livre à succès, The Green Collar Economy1 (L'économie des cols verts), Jones annonce la fin de l'âge du carbone, et le début de l'ère de l'énergie solaire. Il déduit sa lecture de l'histoire d'une série d'événements : la crise financière liée au surendettement de la société américaine et à la surconsommation l'ont fait réfléchir. Ce qui se passe est énorme, confie-t-il au magazine Oakland, cette horrible panne, où le prix des maisons chute, où l'endettement par cartes de crédit explose, c'est terrible. Mais cette panne va être aussi une opportunité. Nous allons devoir cesser d'édifier l'économie sur la destruction environnementale, et nous allons nous orienter vers la restauration de l'environnement comme un moyen de faire avancer l'économie. Et, comme le répète Jones, l'économie des cols verts devra être inclusive, elle devra impliquer les plus pauvres des pauvres, les minorités et les nouveaux chômeurs comme des forces vives capables de relancer la prospérité américaine.

Noirs, Blancs et… verts

A voir l'énergie qu'il déploie, on a peine à imaginer que Van Jones ait pu être confronté à des réticences à l'époque où il démarchait pour trouver un éditeur qui accepte de publier son livre. A San Francisco, lors de sa première signature, le livre ayant été finalement publié par HarperCollins, il confiait à son auditoire les réactions qu'il avait rencontrées : les Noirs n'achètent pas des livres verts, et les Blancs n'achètent pas des livres de Noirs. Ces éditeurs regrettent sans doute leurs propos hâtifs. Van Jones parcourt le pays de long en large et s'adresse à toutes les catégories de la population, des Slow Food aux congrégations religieuses. A Oakland, il a co-fondé le Centre Ella Baker pour les droits humains, qui a servi à faire passer deux dispositifs dans la législation de Californie à l'origine de la création d'un conseil pour les emplois verts et de programmes de formation aux technologies vertes.
Jones dirige aussi Green for All, qui, alliée à d'autres associations, a donné lieu à la loi pour les emplois verts et les infrastructures, présentée par la sénatrice démocrate du Michigan Deborah Stabenow en 2008. La mesure proposée par cette loi prône l'investissement de dizaines de milliards de dollars dans les emplois verts à travers tout le pays. Van Jones se dit confiant dans l'engagement du président Obama en faveur de cet investissement. Selon l'Apollo Alliance, une coalition indépendante d'environnementalistes, de syndicats et d'entreprises, le Stimulus Package (plan de relance), signé par le président Obama le 20 février dernier, consacre d'ores et déjà 86 milliards de dollars aux énergies renouvelables et aux programmes de création d'emplois verts.

Le succès et la légitimité de Van Jones résultent de son implication dans la vie locale et de sa passion politique contractée dès le plus jeune âge au contact du mouvement pour les droits civiques des Noirs. Ses figures tutélaires sont les frères Kennedy et Martin Luther King. Fils d'instituteur, Van Jones a grandi dans un milieu modeste, dans un quartier populaire d'une petite ville du Tennessee profond. Son intérêt pour l'environnement ? Au moment où les entreprises se sont lancées dans la mode du vert et du bio, il s'est dit qu'il ne fallait pas que se reproduise ce qui s'était passé avec la fracture numérique. L'écologie devait être destinée aux plus modestes, et il fallait éviter un apartheid écologique. L'économie verte serait inclusive ou ne serait pas.

Alors Van Jones s'est saisi de son bâton de pèlerin et s'est mis à faire campagne dans des salles municipales, sous des tentes et dans des meetings rassemblant 20 ou 200 personnes. Van est un communicant extraordinaire, selon Ian Kim, directeur de la campagne pour les emplois verts au centre Ella Baker d'Oakland. Il captive son auditoire et inspire chacun, au point que personne ne repart sans avoir versé une larme . Son aisance est comparable à celle du joueur de basket Michael Jordan. Mais c'est un travailleur sans relâche. Il est doté d'une capacité d'émerveillement et d'une confiance dans l'avenir. Parti travailler à Washington comme conseiller du président Obama, il n'a guère le temps de retourner à Oakland, où est restée sa famille. Mais Van Jones a conscience de vivre un moment rare, où deviennent crédibles des messages qui, hier, étaient inaudibles. La seule raison pour laquelle notre bilan écologique est insoutenable est liée au fait que les incinérateurs, les décharges et les zones sacrifiées ont été établis là où vivent des gens pauvres. Cela n'aurait jamais eu lieu si ces incinérateurs et ces déchets toxiques avaient été installés dans les quartiers riches : dans ce cas nous serions parvenus à une économie soutenable depuis longtemps. Nous ne voulons pas être les premiers à écoper des toxines et les effets négatifs du changement climatique, et être les derniers à bénéficier des opportunités de l'énergie solaire, de l'éolien, de l'alimentation biologique… Nous voulons un partage équitable des bénéfices de la transition vers une économie verte, déclarait-t-il au magazine Mother Jones l'année dernière.

Jones était destiné à être un homme extraordinaire (i.e : qui sort de l'ordinaire) qui souhaite mettre tout son talent et sa passion au service d'un changement de paradigme. Il pense que le temps est venu pour l'émergence d'un nouveau modèle économique, au service de l'environnement et d'une prospérité accessible à tous. Un nouveau rêve américain ?

Notes

1 - The Green Collar Economy. How one solution can fix our two biggest problems, HarperCollins, New York, 2008

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