Les mesures prises à l'issue du premier confinement ont permis d'ancrer rapidement la place du vélo dans les mobilités quotidiennes. « En 2021, on ne peut pas rater l'étape de la pérennisation », prévient Pierre Serne, mardi 9 février, à l'occasion de la présentation de la troisième étude du Club des villes et territoires cyclables sur la dynamique des aménagements de transition (1) . « Il faut très vite de bons signaux », plaide le président du Club, estimant que « la dynamique a ses fragilités et doit être accompagnée ».
Globalement, les conclusions de l'étude sont très encourageantes. Le Club entend donc mobiliser les acteurs pour poursuivre l'effort, notamment à l'occasion des débats sur le projet de loi issu des propositions de la Convention citoyenne pour le climat. Le Club compte aussi défendre la formation des cyclistes (via notamment le programme « savoir rouler à vélo » pour les enfants de 6 à 11 ans), militer pour l'amélioration de la sécurité des cyclistes (contre le vol et les accidents de la route), ou encore plaider en faveur du soutien aux ménages les plus modestes.
Les collectivités rurales s'impliquent
Cette troisième version de l'étude dédiée aux mesures transitoires en faveur du vélo dresse un large panorama de la situation en ce début d'année : 148 collectivités, regroupant 31,5 millions de Français, ont été interrogées, dont un tiers présentant une dominante rurale. Elle montre un large développement des politiques cyclables, puisque 84 % des collectivités se sont engagées dans un ou plusieurs projets d'aménagements. L'étude fait ressortir que 65 % des collectivités interrogées ont renforcé et accéléré leur politique cyclable à l'occasion de la crise sanitaire. À l'avenir, 87 % d'entre elles prévoient de pérenniser leurs aménagements temporaires, voire de les étendre.
Comme pour de nombreux secteurs, 2020 a été « une année exceptionnelle », résume Pierre Serne, qui estime que des « étapes importantes » ont été franchies pour le développement du vélo. Catherine Pilon, secrétaire générale du Club, note pour sa part que, si les aménagements cyclables ont surtout été réalisés en zone urbaine, « la bascule va au-delà [de ces] "usual suspects" ». En l'occurrence, l'étude montre que 40 % des projets portés par les collectivités rurales ont été réalisés. Or, le Club rappelle que les territoires peu denses sont pénalisés par des ressources humaines et financières limités, ainsi qu'une moindre nécessité d'aménager en urgence pour des raisons sanitaires (moindre promiscuité et faiblesse relative des transports en commun dans la mobilité).
Catherine Pilon explique aussi que la pratique du vélo a fait un bond en 2020, avec une hausse de 10 % sur un an, une progression qui serait plus proche de 30 % s'il n'y avait pas eu les confinements. D'ailleurs, constate Françoise Rossignol, vice-présidente du Club, le mois de décembre a été très bon, alors que la météo n'a pas été favorable. Autre symbole fort : la barre du million de vélos réparés sur une année a été franchie, rapporte Pierre Serne.
Renforcer le projet de loi climat et résilience
Pour autant, le Club distingue des « signaux inquiétants ». Bien sûr, il existe un risque de retour en arrière, mais seulement une minorité de collectivités locales le font réellement. « Il ne faudrait pas que ce soit l'arbre qui cache la forêt », rassure Catherine Pilon.
Par contre, l'absence de mesure en matière de vélo dans le projet de loi climat et résilience alarme beaucoup plus le Club. Sur ce sujet, Matthieu Orphelin, qui participe au Club des élus nationaux pour le vélo (anciennement Club des parlementaires pour le vélo), souhaite que le texte soit amendé pour inscrire dans la loi la généralisation du forfait mobilité durable à toutes les grandes entreprises. La mesure, explique le député non-inscrit du Maine-et-Loire, permettrait de réduire les émissions françaises de 4 millions de tonnes de CO2 (MtCO2). De même, explique-t-il, il serait bienvenu d'étendre, sous certaines conditions, la prime à la conversion à l'achat de vélos.
Deux autres sujets inquiètent les défenseurs de la petite reine. Tout d'abord, Jean-Baptiste Djebbari, le ministre délégué aux Transports,n'aborde pas du tout le thème du vélo dans l'interview qu'il a accordée récemment à la Gazette des communes. Ensuite, les 200 millions d'euros accordés dans le cadre du plan de relance semblent être devenus un plafond, alors que la présentation initiale avait laissé penser qu'il s'agissait d'un montant minimum. La question financière est d'autant plus critique aux yeux du Club que l'année à venir s'annonce sous le signe de la contrainte budgétaire : la crise sanitaire impose une hausse de certaines dépenses, alors que les ressources publiques sont en baisse.