D'après les nouveaux chiffres avancés ce vendredi 30 juillet, par les ministères de l'Agriculture et de la Transition écologique, 44 036 tonnes de produits phytosanitaires (hors usage en agriculture biologique ou de biocontrôle) ont été vendus en France en 2020. Cela représente 23 % de plus qu'en 2019, qui accusait une baisse par rapport à 2018.
Hausse immédiate mais tendance à la baisse sur le long-terme ?
Les ventes de glyphosate ont notamment considérablement augmenté en 2020. 8 600 tonnes ont été vendues l'an dernier, contre 6 000 en 2019. Cette différence constitue une hausse de 42 % après une baisse de 37 % entre 2018 et 2019. « Cette évolution ne reflète pas les mesures entreprises dans le plan de sortie du glyphosate, juge cependant le ministère de l'Agriculture dans un communiqué. Le glyphosate ne peut désormais être utilisé que dans les situations où il n'existe aucune alternative. Les effets sont donc attendus en 2021 (et pourront être observés en 2022) et devraient à terme permettre d'atteindre une baisse de 50 % des utilisations de glyphosate [dès 2022] par rapport au début du quinquennat. »
En globalité, les ventes de pesticides de 2020 correspondent néanmoins à une baisse estimée de 20 % par rapport à la moyenne évaluée entre 2012 et 2017. Cette tendance reflète surtout une baisse générale de la vente des « substances les plus préoccupantes » pour la santé. Les ventes de produits phytosanitaires de type CMR 1 (cancérogène, mutagène ou toxique pour la reproduction avéré) sont en effet en baisse moyenne de 93 % depuis 2016, selon les données provisoires publiées par le Gouvernement. Les ventes de produits de type CMR 2 (cancérogène, mutagène ou toxique pour la reproduction suspecté) sont, quant à elle, en baisse de 40 % sur la même période.
En outre, concernant les produits utilisables en agriculture biologique et de biocontrôle, la hausse des ventes se poursuit et se stabilise. La moyenne triennale s'élève à 21 000 tonnes vendues par an, soit 20 % de plus qu'entre 2015 et 2017.
La conséquence d'un contexte politique ?
« Les utilisateurs [de pesticides] en ont stocké en 2018 et très peu acheté en 2019, avant que les ventes repartent à la hausse en 2020 en anticipation des nouvelles réglementations », expliquent les représentants des ministères de l'Agriculture et de la Transition écologique. Ces phénomènes de réserve et de déstockage seraient, selon eux, la conséquence de la hausse de la redevance pour pollutions diffuses au 1er janvier 2019 puis de l'objectif de réduction à 50 % de l'utilisation du glyphosate d'ici 2022.
C'est ce que démontre, par ailleurs, la dernière valeur en date du Nodu (nombre de doses unitaires). Cette dernière mesure le nombre de traitements appliqués à dose maximale homologuée de chaque substance sur une surface d'un hectare et rend donc compte, pour beaucoup d'acteurs, d'une réalité plus précise de l'utilisation des pesticides sur le terrain.
Après une hausse de 24 % observée en 2018, l'année 2019 a correspondu à une baisse du Nodu de 37 %. La situation pour 2020 n'est pas encore connue. Si ce chiffre est plus long à évaluer, rappellent les ministères concernés, c'est parce qu'il doit prendre en compte de nombreuses données pour être constitué. Les ventes annuelles (dites de quantité de substance active (QSA) et non de doses spécifiques) représentent ainsi, selon eux, un complément nécessaire tant elles reflètent plus rapidement l'évolution des tendances agricoles.
Des injonctions du Conseil d'État bien prises en compte
Le Gouvernement communique sur ces chiffres alors que le Conseil d'État vient de lui demander de renforcer la réglementation relative aux conditions d'épandage des pesticides. L'occasion pour les ministères d'y répondre: « Ce n'est pas une remise en cause mais un souhait de renforcer et d'améliorer les textes sur lequel on est en train de travailler pour l'intégrer » expliquent-ils. Pour rappel, ce dernier a ordonné au Gouvernement une modification de son décret et de son arrêté de décembre 2019 portant sur les zones de non-traitement (ZNT). L'État a ainsi six mois pour revenir sur les distances minimales de sécurité, jugées insuffisantes au regard des recommandations de l'Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses).
Les ministères de l'Agriculture et de la Transition écologique semblent accueillir très ouvertement ces injonctions. « Renforcer les dispositifs de protection aussi d'information entre les utilisateurs et les riverains, c'est évidemment une bonne chose, ont commenté les ministères concernés. On tient quand même à rappeler que ces textes restent extrêmement innovants et avec assez peu d'équivalence chez les autres pays européens. »