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Actu-Environnement

Vers une meilleure compréhension des cours d'eau

Les échanges eaux souterraines-rivières s'avèrent cruciaux dans le fonctionnement des rivières. Manque de précipitations, réduction de la nappe phréatique, des parties de certains cours d'eau disparaissent régulièrement au cours de l'année.

Eau  |    |  D. Laperche
Vers une meilleure compréhension des cours d'eau

"Entre 25 et 45% des cours d'eau seraient aujourd'hui intermittents en France, estime Thibault Datry, chargé de recherche spécialisé dans l'écologie des cours d'eau temporaire, à l'institut national de recherche en sciences et technologies pour l'environnement et l'agriculture. "Comme les recherches sur ce sujet sont peu développées, ces chiffres reposent sur des essais de modélisations et des extrapolations de situations régionales que nous connaissons", explique t-il.

Ces rivières s'assèchent ainsi de manière régulière sur des portions plus ou moins importantes. Par exemple un des affluents du Rhône, la Drôme perd quelques kilomètres dans sa portion terminale une fois tous les deux à trois ans. L'Albarine, sur les 60 kilomètres qu'elle compte en situation normale, s'assèche de 15 km plus de la moitié de l'année.

Dans la plupart des cas, les causes s'avèrent naturelles : manque de précipitations, niveau de nappe phréatique bas, etc. Parfois, ce sont les prélèvements humains et des barrages qui perturbent l'équilibre du cours d'eau. "Il est difficile de faire la part de ce qui est lié à l'homme et de ce qui est naturel", précise Thibault Datry.

En période sèche, certaines espèces comme les crustacés ou des larves d'insectes entrent en dormance et peuvent alors rester jusqu'à plusieurs mois dans les sédiments en attendant le retour de l'eau. Si une grande partie des organismes ne survivent pas à cette modification, les scientifiques ont cependant constaté que ces rivières constituaient des espaces importants pour la biodiversité et les zones d'échanges entre espèces. "Lorsque les cours d'eau disparaissent, beaucoup d'organismes terrestres les colonisent petit à petit : des araignées, des oiseaux, etc. viennent manger les poissons et les invertébrés piégés par l'assèchement, détaille Thibault Datry.

De la même manière comme la remise en eau est assez brutale, ces animaux seront emportés à l'aval et à leur tour utilisés comme ressources nutritives par des poissons.

Outre leur intermittence, ces cours d'eau doivent faire à un certain nombre de difficultés. Tout d'abord, ils sont considérés comme "atypiques" par les décrets d'application de la Directive cadre sur l'eau et ne bénéficient donc pas de l'obligation de conserver un débit réservé.

"Lors de l'assèchement, des espèces sensibles, qui sont utilisées comme bioindicateurs, pour évaluer le bon état disparaissent : la rivière même si elle n'est pas forcément sale, se verra attribuer une mauvaise note, souligne le chargé de recherche, une rivière qui va être polluée par les rejets d'une station d'épuration risque d'avoir une meilleure note de par la présence d'eau et donc plus d'espèces aquatiques que s'il n'y avait pas de step".

Le scientifique travaille sur l'amélioration de l'interprétation de la qualité des eaux. Il se penche sur des relations qui permettront de prédire l'évolution de la biodiversité à partir de durée, de fréquence ou de périodicité d'assèchement. Par exemple, l'impact qu'aura un assèchement de 12 jours d'une portion de rivière sur la faune. "Une fois validées, ces relations pourront aider les gestionnaires pour interpréter des résultats ou prendre des décisions pour restaurer le bon état écologique", assure t-il.

Suivre les échanges entre nappes et rivières

A une échelle plus large, certains chercheurs élaborent des indicateurs pour identifier et mesurer les échanges entre les nappes et les rivières. Ces derniers d'avèrent en effet essentiels pour le fonctionnement hydrologique des fleuves. Ils influencent en effet les débits des cours d'eau mais également leurs températures. Ainsi les apports d'eau de nappe plus frais en été et plus chauds en hiver réduisent les écarts annuels.

Cours d'eau plus ou moins connectés à la nappe, zones humides, chenal principal ou bras secondaires, l'hétérogénéité des milieux rend difficile le suivi et la localisation des échanges.

L'équipe de Pierre Marmonier, chercheur au Laboratoire d'Ecologie des Hydrosystèmes Naturels et Anthropisés de l'université Lyon 1, a mis au point des indicateurs pour mieux comprendre ces zones d'échanges. Ces derniers viennent compléter et valider les résultats issus de l'étude de la variation des niveaux piézométriques. Les scientifiques utilisent deux types d'indices : la végétation aquatique et les invertébrés qui vivent à l'intérieur des sédiments. Ils projettent également d'enregistrer les températures de l'eau et de l'air et de réaliser des corrélations entre les deux.

Certains végétaux révèlent les remontées d'eau souterraine grâce à leur sensibilité aux changements de température et à la composition en nutriments du milieu. Les invertébrés permettront d'apporter des informations dans de petits cours d'eau, des canaux de drainage, ou des endroits ou la végétation a été arrachée.

"La faune d'invertébrés souterrains est constituée principalement de crustacés aveugles, dépigmentés, ils se reproduisent une fois tous les ans ou tous les deux ans, décrit Pierre Marmonier, ce sont des animaux très fragiles : ils ne supportent pas de vivre dans les systèmes de surface, ils traduisent très précisément les zones de remontée d'eau souterraine". La présence ou l'absence de ces derniers à 50 cm de profondeur indique les échanges entre la rivière et sa nappe.

Son équipe a testé les trois approches (niveaux piézométriques, végétations et invertébrés) sur deux secteurs du Rhône, Brégnier-Cordon et Donzère-Mondragon. "Sur le Rhône, la méthode est validée : nous avons un bon recouvrement des informations, précise Pierre Marmonier, nous allons désormais l'expérimenter sur la Loire et sur le Rhin".

Un guide méthodologique pour caractériser les échanges nappes/fleuve Rhône en milieu alluvial devrait sortir fin 2012. Les scientifiques espèrent pouvoir étendre cette méthode à l'ensemble des milieux. Une de leurs limites reste la zone alpine : la faune souterraine s'avère très pauvre car elle a été éliminée par les glaciations.

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