L'année 2009 a été agitée pour les professionnels du recyclage des véhicules. Engorgée suite à la prime à la casse, la filière tente de retrouver son équilibre mais doit faire face à une certaine incertitude pour cause de réécriture du décret VHU.
Dans le cadre du plan de relance de l'économie, le gouvernement a choisi de mettre en place un dispositif de « prime à la casse » en complément des mesures de soutien au secteur automobile. Tout au long de l'année 2009, une prime de 1.000 € a été versée pour l'acquisition d'un véhicule particulier neuf émettant moins de 160 g de CO
2 par km accompagnée de la mise à la casse d'un véhicule de plus de 10 ans. Selon le bilan du gouvernement près de 600.000 primes ont été remboursées sur l'année 2009 pour 2,2 millions d'immatriculations de véhicules particuliers neufs. Cette prime a permis de mettre au rebut principalement des véhicules âgés de 10 à 15 ans et de les remplacer par des véhicules de classe B dont les émissions sont comprises entre 101 et 120 gCO
2/km et de classe D dont les émissions sont comprises entre 141 et 160 gCO
2/km. Pour Patrick Devedjian, ministre de la relance, la prime à la casse a donc atteint tous ses objectifs :
''Il s'est révélé un dispositif triplement gagnant : pour le consommateur, qui y a gagné du pouvoir d'achat, pour le secteur automobile qui a vu ses ventes croître malgré la crise, et enfin pour l'environnement, en favorisant les véhicules les moins polluants''.
Déséquilibre de la chaîne de recyclageCe dispositif a toutefois fortement impacté la chaîne de recyclage des
véhicules hors d'usage (VHU).
''Cette prime a été une réjouissance pour les vendeurs de voitures mais pour le réseau de recyclage se fût une catastrophe. La chaîne a été déréglée'', expliquait Constantin Voluntaru, responsable environnement du Groupe Volkswagen France, en décembre 2009 à l'occasion du salon Pollutec.
''Les volumes ont été multipliés par trois voire quatre chez les gestionnaires. On a donc poussé notre capacité de stockage au maximum et dans certains cas les prescriptions des arrêtés d'exploitation des sites ont été dépassées'', complétait Olivier François, président du syndicat des broyeurs français.
''Le recyclage n'a pas été au rendez-vous'', a prévenu Eric Lecointre de l'
Ademe.
Cette situation n'a donc pas amélioré les taux de recyclage des véhicules usagés alors que les objectifs demandés par l'Union européenne à l'échéance 2006, à savoir 80 % de réutilisation/recyclage et 85 % de réutilisation/valorisation, n'ont pas été atteints.
''Le taux de réutilisation et de recyclage est proche de l'objectif réglementaire (79,6%), cependant l'objectif de réutilisation et de valorisation n'est pas atteint'', conclut le dernier rapport annuel de l'Observatoire de la filière VHU basé sur les données de 2008 et publié en janvier 2010 par l'ADEME.
Quid du prochain objectif de recyclage ?La prime à la casse sera maintenue en 2010 selon des modalités permettant
''une sortie progressive du dispositif'' : 700 euros au premier semestre, 500 euros au second. Avec le ralentissement des ventes attendu pour 2010, la filière de recyclage devrait reprendre un rythme normal et se concentrer désormais sur l'atteinte du prochain objectif à l'horizon 2015 fixé à 85 % de réutilisation/recyclage et 95 % de réutilisation/valorisation.
Pour cela, la filière mise sur le décret relatif aux conditions de remise en circulation des véhicules endommagés publié en avril 2009. Selon Jean-Marie Viry, vice-président de la branche recycleur du Conseil National des Professionnels de l'Automobile,
''l'expert peut désormais demander la réparation d'un véhicule avec des pièces d'occasion. Le taux d'utilisation des pièces va donc augmenter et le taux de recyclage avec''. Selon une étude de l'Ademe, les pièces de réemploi participent à l'atteinte des objectifs à hauteur de 20%. Pour Olivier François, président du syndicat des broyeurs, l'objectif de 95% en 2015 sera atteint grâce à 10% de valorisation énergétique et 85% de
valorisation matière.
''Cet objectif est faisable, on n'a pas besoin d'évolutions techniques faramineuses même s'il y aura des difficultés techniques''.
Mais la filière pourrait être réorganisée prochainement puisque le
ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer (MEEDDM) est en train de réécrire le décret de transposition de la
directive du 18 septembre 2000 relative aux véhicules hors d'usage (
décret du 1er août 2003). Cette réécriture fait suite au recours déposé en avril 2009 par la Commission européenne devant la Cour européenne de justice pour
mauvaise transposition. Selon Olivier François, ce
nouveau décret risque d'être plus contraignant :
''on va passer d'une situation de grande liberté par opérateur à une situation plus contraignante. Désormais le ministère n'a qu'une seule volonté, la directive, rien que la directive, toute la directive et il ne laissera plus rien passer'', a-t-il prévenu.
La décision de la Cour de justice européenne est attendue pour mars 2010 et pourrait aboutir à des sanctions pécuniaires pour la France tandis que les discussions entre le ministère et les professionnels se poursuivent en vue du nouveau décret.
VHU : la Commission estime que la France a mal transposé la directive européenne (article paru le 20/04/2009) La Commission européenne a déposé un recours auprès de la Cour européenne de justice contre la France estimant que l'Etat membre n'a pas pris toutes les mesures législatives et réglementaires nécessaires pour transposer de manière correcte et com... Lire la news
Directive européenne du 18/09/2000 (2000/53/CE) Directive n° 2000/53/CE du Parlement européen et du Conseil du 18/09/00 relative aux véhicules hors d'usage
En septembre 1997, la Commission Européenne a remis au Conseil une proposition de directive relative aux VHU. Ce texte, adopté le 18 septembre 2000 a été publié au JOCE le 21 octobre 2000.
Le traitement des véhicules hors d'usage en Europe est soumis à la directive européenne 2000/53/CE qui fixe le cadre réglementaire pour les quinze ans à venir. Les principes de cette directive sont les suivants :
Valorisation : respect de certains taux minimum de valorisation.
Responsabilité : elle incombe aux constructeurs.
Financement : organisé en amont par le constructeur avec gratuité pour le détenteur final.
Interdiction de certaines substances.
Homologation soumise à un taux de recyclabilité minimum.
En France, cette directive a été transposé par le décret du 1er août 2003 relatif à la construction des véhicules et à l'élimination des véhicules hors d'usage. En savoir plus
Décret du 01/08/2003 (DEVP0310018D) Décret no 2003-727 du 1er août 2003 relatif à la construction des véhicules et à l'élimination des véhicules hors d'usage.
Le décret n° 2003-727 du 1er août 2003, pris pour transposer la directive n° 2000/53/CE du 18 septembre 2000 met en vigueur plusieurs dispositions :
1°/ Les démolisseurs et les broyeurs doivent être agréés. L'arrêté du 15 mars 2005 fixe les conditions nécessaires pour obtenir l'agrément. En particulier, le véhicule devra être dépollué avant tout traitement (retrait des fluides, type huiles usagées, liquide de frein, fluide frigorigènes). Des conditions sont fixées sur l'entreposage des pièces et des véhicules pour prévenir les pollutions que ces opérations pourraient entraîner (protection des eaux etc.). Enfin, des conditions sont fixées pour favoriser la réutilisation, le recyclage ou la valorisation des pièces et déchets issus de ce traitement. Un contrôle sera fait chaque année par un organisme tiers pour vérifier le respect de ces conditions. Les broyeurs qui sont désormais tenus d'accepter les véhicules hors d'usage que leur remettent directement leurs détenteurs doivent s'équiper d'équipements de dépollution.
2°/ Les opérateurs agréés ne peuvent facturer aucun frais aux détenteurs qui leur apportent leur véhicule hors d'usage à moins que le véhicule soit dépourvu des éléments essentiels (par exemple pot catalytique ou bloc moteur manquant). Les démolisseurs ont cependant la possibilité de refuser la prise en charge des véhicules dont ils estiment que le traitement serait déficitaire.
Les constructeurs automobiles sont pour leur part tenus de compenser le déficit que peut occasionner, pour un broyeur, la prise en charge d'un véhicule hors d'usage de sa marque. L'arrêté du 13 mai 2005 fixe les conditions dans lesquelles le déficit des broyeur agréé est compensé par les constructeurs.
3°/ L'article R.322-9 du code de la route a été modifié pour renforcer la traçabilité de l'élimination des véhicules hors d'usage. La remise d'un véhicule hors d'usage à un démolisseur agréé ou à un broyeur agréé fera l'objet d'un récépissé de prise en charge pour destruction qui sera remis au détenteur et dont copie sera faite à la préfecture. La destruction physique du véhicule donnera lieu à l'émission d'un certificat de destruction, qui sera envoyé à la préfecture. Sur la base de ce document, l'immatriculation du véhicule pourra être annulée. Ainsi, la notion de destruction administrative d'un véhicule n'existe plus : la destruction physique du véhicule hors d'usage doit maintenant être attestée. L'arrêté du 6 avril 2005, publié au JORF du 24 mai 2005 fixe les conditions d'application de l'article R.322-9 du code de la route modifié. Cet arrêté entre en vigueur le 24 mai 2006.
4°/ Les démolisseurs agréés et les broyeurs agréés sont tenus de faire une déclaration chaque année au préfet et à l'agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie. Cette déclaration permettra de connaître les quantités de VHU traitées et les taux de réutilisation et de recyclage ainsi que de valorisation atteints. L'arrêté du 19 janvier 2005 fixe le modèle de ces déclarations. La directive fixe comme objectif qu'en 2006, le taux de réutilisation et de recyclage atteigne 80% et que le taux de réutilisation et de valorisation atteigne 85%. En 2015, ces taux devront être de 85% et de 95%.
5°/ Le décret impose également des mesures relatives à la conception des véhicules, afin de d'interdire, sauf cas d'impasse technique, l'emploi de certains métaux lourds (mercure, plomb, cadmium, chrome hexavalent) et de favoriser leur recyclage. Ces mesures sont entrées en vigueur en 2003. L'arrêté du 24 décembre 2004 fixe les conditions dans lesquelles ces substances peuvent tout de même être employées.
6°/ Enfin, la mise en œuvre de ce dispositif nécessite un lieu d'échange entre les différents acteurs concernés. Une commission a donc été créée. Elle est notamment chargée d'élaborer une proposition de règlement en cas de différend sur la compensation du déficit d'un broyeur agréé (arrêté du 13 mai 2006).
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Décret du 10/04/2009 (DEVS0825483D) Décret n° 2009-397 du 10 avril 2009 relatif notamment aux conditions de remise en circulation des véhicules endommagés. En savoir plus
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