Selon la loi de transition énergétique, la production de gaz renouvelable devra couvrir, en 2030, 10 % de la consommation de gaz. La méthanisation agricole devrait fournir un tiers de ces besoins, en s'appuyant notamment sur les cultures intermédiaires à vocation énergétique (CIVE). Dans ce contexte, le WWF France et GRDF ont réunis les acteurs de la filière pour définir les conditions de durabilité du développement de la méthanisation agricole.
« Les demandes pour la construction de nouveaux projets sont en forte croissance. (...) Le modèle de méthanisation agricole avec injection cohabite ainsi progressivement avec le modèle historique de l'unité de méthanisation avec cogénération adossée à l'élevage », notent-ils. Or, la montée en puissance des installations ayant recours aux CIVE, « associée à des contraintes de coûts de production excessives, pourrait occulter les intérêts agronomiques liés à l'introduction de la méthanisation dans les systèmes agricoles ».
La durabilité de la filière passera donc par la mise en œuvre de pratiques agro-écologiques à l'échelle de la parcelle et de l'exploitation, et par l'intégration territoriale des projets de méthanisation.
Cultiver des CIVE dans les bonnes conditions
Les cultures intermédiaires, en venant s'insérer entre deux périodes de cultures principales (interculture), peuvent apporter de nombreux services agro-écosystémiques : amélioration de la structure du sol, lutte contre l'érosion, recyclage des éléments minéraux, stockage de carbone, maintien de la biodiversité associée, gestion des adventices…
Pour les cultures intermédiaires à vocation énergétique, l'objectif est double : assurer ces services agronomiques et produire de la biomasse pour la méthanisation. « L'objectif est de produire trois cultures en deux ans, avec deux cultures alimentaires et une interculture pour la méthanisation », détaille le document.
Dans ce cadre, les services agro-écosystémiques peuvent être « maintenus voire maximisés à condition de s'adapter aux conditions pédoclimatiques locales », estiment les acteurs. Il faut faire attention à l'espèce et à la variété choisies, et à l'itinéraire technique en fonction des conditions pédoclimatiques du territoire. Le retour au sol des digestats de méthanisation, en substitution des engrais minéraux, est essentiel, à condition de veiller à la qualité de leur stockage ainsi qu'aux qualités agronomiques et sanitaires des matières retournant au sol.
Intégrer les projets dans les territoires
« Si la pratique des CIVE permet de renforcer les liens entre acteurs agricoles au sein d'un territoire, l'exportation de leur biomasse à des fins énergétiques ne doit toutefois pas concurrencer les usages de la biomasse préexistants, telle que l'alimentation animale lorsque l'interculture était dédiée à la production de cultures dérobées notamment », précise le rapport. Les CIVE ne doivent pas non plus concurrencer la production alimentaire et décaler les cultures principales.
Pour éviter les tensions et favoriser l'acceptabilité des projets de méthanisation, le dialogue entre les différents acteurs est essentiel, notent les acteurs. « Les retours d'expérience démontrent que les coopérations autour du projet entre acteurs territoriaux sont à favoriser, et les possibilités sont multiples : mutualisation d'ingénierie, de flux de biomasse / déchets ou encore de ressources financières ». La mise en place de cette gouvernance locale « ne peut s'envisager sans la participation des riverains de l'exploitation agricole et des citoyens du territoire », estiment-ils également.