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AccueilBernard AulagneProchaine réglementation dans la construction neuve : la RE 2020 doit fédérer plutôt qu'exclure !

Prochaine réglementation dans la construction neuve : la RE 2020 doit fédérer plutôt qu'exclure !

Alors que la récente concertation sur la RE 2020 a mis en lumière l’opposition entre les filières, ce devrait être une mobilisation de tous les acteurs de l’énergie qui s’impose pour relever le double défi de la relance et de la neutralité carbone.

Publié le 12/11/2020

En vigueur depuis 7 ans, l’actuelle réglementation thermique dans les logements neufs, la RT2012, va laisser place l’été prochain à la « RE2020 ». Environnementale et non plus thermique, au-delà du changement de nom, c’est une mutation profonde de la vision même de ce qu’est un bâtiment avec une approche sur l’ensemble de son cycle de vie.

Le 16 octobre dernier, l’administration a officiellement sifflé la fin de la concertation autour de la future Règlementation Environnementale engagée depuis avril 2019 avec les acteurs de la construction… Notons au passage à propos de cette « concertation » la très faible utilisation des enseignements de l’expérimentation énergie-carbone (E+C-) lancée en 2016 et le fait que des décisions structurantes telles que la baisse du coefficient d’énergie primaire de l’électricité tout comme la baisse du contenu carbone de cette même électricité ont été prises en amont, de manière unilatérale par l’administration.

Le 16 octobre en a donc marqué la fin et les acteurs sont désormais dans l’attente des « arbitrages ministériels » sur les points clés de cette future Règlementation, notamment la fixation des fameux niveaux des seuils énergie et carbone qui vont constituer les nouvelles exigences de construction à respecter, dès l’été 2021, par les maitres d’œuvre et maitres d’ouvrages.

Électricité vs « reste du monde »

Si cette dernière réunion de concertation n’a pas levé le voile sur ces seuils, elle a permis de mieux connaître le positionnement des différents acteurs. L’enseignement majeur est que, n’en déplaise à certains, y compris au sein même de l’administration, les positions ne se résument pas à une opposition basique entre filière électrique et filière gaz ou une sordide revanche de l’électricité sur le gaz : c’est en fait clairement une opposition filière électrique – « reste du monde » qui éclate au grand jour !

Rappelons les objectifs de cette RE 2020 affichés par les pouvoirs publics : diminuer l’impact carbone des bâtiments neufs, poursuivre l’amélioration de leur performance énergétique et en garantir la fraîcheur pendant les étés caniculaires. Coénove, comme tous les acteurs, adhère à ces objectifs… Nous considérons simplement qu’il n’existe pas une voie unique pour y répondre, celle de l’électrification.

Au plan de la performance énergétique, la RT 2012 situe déjà la France à un haut niveau européen. On peut certes encore progresser et un renforcement modéré du Bbiomax, accompagné d’un renforcement du Cepmax du même ordre de grandeur, est tout à fait envisageable.

Concernant la prise en compte du confort d’été, sous-estimée dans la RT 2012, le développement de conceptions bioclimatiques et les solutions passives constituent des axes réels à travailler, pour éviter une entrée incontrôlée de la climatisation. Mais, en fait, la véritable nouveauté de cette RE 2020, ce qui constitue un véritable bouleversement dans les pratiques constructives, c’est bien l’appréciation du contenu carbone d’un bâtiment sur l’ensemble de son cycle de vie, de la construction à la destruction, en passant bien sûr par l’exploitation. 

Il est communément admis que l’impact carbone de la phase de construction d’un bâtiment équivaut a minima à celui de 50 années d’exploitation aux conditions du mix énergétique actuel.

ns cette lutte contre le réchauffement climatique, on voit donc bien l’enjeu que représente la maîtrise de l’acte de construire. D’après les quelques informations livrées le 16 octobre dernier, les Pouvoirs Publics semblent s’orienter sur la fixation de deux seuils carbone exigentiels à respecter : l’un pour la phase de construction, l’autre pour l’exploitation. Pourquoi pas, même si ce n’était pas le choix retenu dans l’expérimentation E+C et que, on l’a vu, l’enjeu est plus crucial concernant le premier.

Faire progresser toutes les filières 

Concernant le carbone de la phase exploitation, on voit cependant bien la tentation de certains de fixer un seuil suffisamment ambitieux pour exclure des filières, très clairement la filière gaz. Si cette proposition répond bien à leurs intérêts, qu’en est-il de l’intérêt général ? Plutôt que d’exclure tout un pan du secteur du bâtiment, nous préférons une démarche incitant toutes les filières à progresser, étape par étape, dans la voie de la neutralité carbone en 2050… De 1974 à 2012, c’est au travers de 6 réglementations thermiques successives que la France a atteint un niveau de performance parmi les plus élevés en Europe et cette progression régulière a entraîné toutes les filières, tous les acteurs qui ont innové pour atteindre ces niveaux de performance en maîtrisant les coûts. Il serait légitime d’en faire de même en matière de carbone : toutes les énergies ont le même point d’arrivée en 2050 (la décarbonation), leurs points de départ sont différents, leurs chemins doivent donc être adaptés avec des seuils différents et progressifs.

Le schéma suivant est tout à fait viable : une première étape marquant un effort significatif dès la RE 2020, puis une progression tous les 5 à 8 ans. L’ensemble de la filière gaz s’est engagée résolument, depuis plusieurs années, dans le verdissement de son énergie au travers du biométhane puis de l’hydrogène. Elle innove et propose d’ores et déjà un mécanisme permettant de générer de la production additionnelle de biométhane dans les projets de construction neuve. Laissons-lui le temps de les rendre opérationnels. Après tout, une dérogation au Cepmax pour le collectif dans la RT2012 (57,5 kWh/an.m² au lieu de 50) a bien été instaurée et, plusieurs fois, prolongée.

Et puis, regardons les chiffres : les seuils que nous proposons dans le cadre de cette concertation (et nous ne sommes pas les seuls !) correspondent à une diminution des émissions d’environ 20% en maisons individuelles comme en appartements par rapport à la RT2012 : ceci constitue une réelle première avancée.

La décarbonation du bâtiment est essentielle dans la lutte contre le réchauffement climatique. Ne perdons cependant pas de vue que les logements neufs représentent en fait moins de 1‰ des émissions de GES du bâtiment… Le secteur du neuf est certes emblématique, mais c’est bien dans la rénovation du parc existant que se situent les réels enjeux de décarbonation du bâtiment. De plus, la période que traversent tous les acteurs de la construction est, crise sanitaire oblige, délicate et incertaine … le changement de paradigme entraîné par la prise en compte du carbone tout au long du cycle de vie, est en soi un bouleversement et il reste peu de mois pour s’y adapter.

Plutôt que de chercher à exclure, il faut fédérer et faire progresser toutes les filières : l’heure est bien à la mobilisation de l’ensemble des acteurs pour relever le double défi de la relance et de la neutralité carbone et non à la satisfaction des intérêts d’une minorité donneuse de leçons : l’électrification massive des usages est une vision partielle et partiale des choses et nous conduit dans une impasse.

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