Cookies

Préférences Cookies

Nous utilisons des cookies sur notre site. Certains sont essentiels, d'autres nous aident à améliorer le service rendu.
En savoir plus  ›
AccueilDavid HeinryDialogue environnemental : et si on voyait la bouteille à moitié pleine ?

Dialogue environnemental : et si on voyait la bouteille à moitié pleine ?

L'ordonnance relative au dialogue environnemental devait réformer et renforcer la participation citoyenne sur les grands projets. Critiquée pour son manque d'ambition par nombre d'observateurs, elle offre pourtant de réelles avancées pour le dialogue envi

Publié le 10/10/2016
Environnement & Technique N°363
Cet article a été publié dans Environnement & Technique N°363
[ S'abonner à la revue - Se connecter à l'espace abonné ]

Ils attendaient mieux. Les ardents défenseurs de la participation citoyenne avaient suivi ces longs mois de consultation et de réflexion, les multiples changements de calendrier qui repoussaient de mois en mois la publication du texte tant attendu, tout particulièrement après le drame de Sivens et la gestion catastrophique de l'aéroport de Notre Dame des Landes. Alors, quand l'ordonnance relative au dialogue environnemental a enfin été publiée au cœur de l'été, ils n'ont pas pu s'empêcher de penser que la montagne avait accouché d'une souris.

Pourtant, quand on y regarde à deux fois, cette ordonnance relative à la démocratisation du dialogue environnemental qui doit entrer en vigueur avant le 1er janvier prochain, sans être révolutionnaire, n'en reste pas moins d'une étonnante modernité et porteuse de réelles avancées en matière de participation citoyenne aux grands projets d'aménagement et d'équipement à venir.

Une initiative novatrice

Cette analyse repose sur un triple constat. En premier lieu, le texte complète et enrichit incontestablement une réglementation mise en place par les lois Bouchardeau des années 80 relatives à la démocratisation des enquêtes publiques, et complétée par les lois Grenelle I et II de 2009 visant à améliorer les conditions de participation citoyenne. En second lieu, elle répond à une évolution de fond de la société actuelle qui accepte de moins en moins d'être mise devant le fait accompli, et qui souhaite au contraire pouvoir s'impliquer dans les grandes décisions impactant tant la gestion de l'espace que les modes de vie, le domaine environnemental n'étant pas le moindre.

L'originalité première de l'ordonnance relève donc de la place qu'elle va offrir à chacun dans le débat public. L'initiative est novatrice. Jusqu'ici, la réglementation des concertations n'incluait que deux acteurs : l'Etat, ou la collectivité concernée, et les porteurs de projets. Eux seuls pouvaient décider. Désormais, les citoyens auront la possibilité de demander une concertation, via un droit d'initiative citoyenne : même Ségolène Royal, lors de sa campagne présidentielle de 2007 au cours de laquelle elle avait mis la thématique de la participation citoyenne sous les projecteurs, n'avait pas osé aller aussi loin. Et le signal envoyé par les pouvoirs publics est doublement salutaire : à la fois, il incite à une responsabilisation du citoyen en lui donnant la possibilité de prendre son destin en main, mais il offre aussi aux responsables politiques la possibilité d'impulser la concertation : clairement, sans volontarisme politique, rien de nouveau n'interviendra dans le dialogue environnemental.

Ouverture du champ des possibles

Deuxième atout de la nouvelle ordonnance : son esprit "ouvert". Et c'est clairement une petite révolution dans l'approche que les pouvoirs publics ont de la démocratie participative. Le texte met en place l'ensemble des conditions nécessaires à l'organisation d'une concertation, mais sans rien imposer. C'est aussi cela, responsabiliser. Donner les outils, à ceux qui réclamaient de les utiliser. On s'éloigne de la logique coercitive et des lourdeurs de la Commission nationale du débat public (CNDP), créée en 1995 par la loi Barnier, qui a dominé ces vingt dernières années. Certes, jouer la carte du volontarisme est un pari, mais il est nécessaire. La concertation a trop souffert de ce caractère coercitif, qui faisait naître chez les parties prenantes le sentiment de subir ; difficile dans ces conditions d'être des acteurs positifs. Le nouveau texte ouvre le champ des possibles, donne un cadre, une direction, un guide de bonnes pratiques, à charge pour ceux qui le voulaient de s'en servir. De la même manière qu'elle exige des politiques un volontarisme, elle demande au citoyen une responsabilisation pour intégrer de façon volontaire une démarche participative permettant d'agir pour sa vie et son bien-être futurs.

Le numérique mis en avant

Enfin, troisième point positif de l'adoption de l'ordonnance : la recommandation de l'usage de l'outil numérique. Chacun peut constater la place que prend le numérique dans nos vies quotidiennes. Qu'il devienne un maillon essentiel de la démocratie participative relève de l'évidence. Mais que celle-ci soit inscrite dans un texte officiel constitue une étape supplémentaire et symbolique. D'autant que cette reconnaissance peut s'appuyer sur des expériences en voie de réussite telles les plateformes mises en place par les collectivités de Rennes Métropole et Grenoble-Alpes Métropole dans l'objectif de participation des citoyens et de concertation sur des projets d'aménagement urbain à moyen et long terme. Le texte offre donc l'opportunité d'investir vite sur ce recours au numérique, atout dont nul n'aurait pu soupçonner la puissance et l'efficacité vingt ans en arrière.

Alors, bien sûr, l'ordonnance n'est pas exempte de critiques et ne va pas aussi loin que l'on aurait pu l'espérer. Mais dans un pays traditionnellement jacobin comme la France, elle offre l'opportunité au dialogue environnemental d'entrer dans un cercle vertueux. Aux acteurs, élus, porteurs de projets, associations et citoyens de saisir cette chance et de la transformer en réalité concrète. Ce sera un enjeu particulièrement essentiel à l'échelle locale, car c'est au niveau des agglomérations, des métropoles et des régions que les enjeux de concertation sont les plus sensibles. Cette ordonnance appelle au rassemblement et surtout au dialogue. Elle incite à la responsabilité de chacun et du collectif. Elle est, contre toute attente, d'une étonnante modernité.

Avis d'expert proposé par David Heinry, Directeur associé d'Alter&Go

Les Blogs sont un espace de libre expression des abonnés d'Actu-Environnement.

Leurs contenus n'engagent pas la rédaction d'Actu-Environnement.

1 Commentaire

Sirius

Le 11/10/2016 à 11h04

Le scepticisme reste nécessaire . Par exemple, on sait qu'une instance majeure de la consultation des citoyens :le CNPS -Conseil national de protection de la nature -doit être modifié :les représentants associatifs y deviendront minoritaires ,remplacés par des membres désignés par le ministre . Les associatifs gênaient les aménageurs par leur indépendance critique .

Signaler un contenu inapproprié

Commentez ou posez une question à David Heinry

Les commentaires aux articles sont réservées aux lecteurs :
- titulaires d'un abonnement (Abonnez-vous)
- inscrits à la newsletter (Inscrivez-vous)
1500 caractères maximum
Mot de passe oublié