Pour le centre d'analyse, il est donc évident que les efforts devront se concentrer principalement sur les secteurs d'émissions diffuses à savoir les transports (-30%) et l'habitat (-50%). Alors que pour d'autres pays comme les Etats-Unis, l'enjeu consiste principalement à améliorer l'intensité carbone du secteur électrique. ''D'une certaine manière, la France a une longueur d'avance et doit la conserver. Il est cependant beaucoup plus facile de mobiliser quelques centaines d'acteurs industriels dans le secteur de l'électricité que des millions de particuliers dans le secteur de l'habitat existant'', prévient le CAS. ''Dès lors, une décision de réduire de 30 % les émissions de l'Union européenne ne devrait être prise qu'au regard de la comparabilité des efforts envisagés par les différents pays développés, en particulier par les Etats-Unis'', estime le centre d'analyse.
Extension du marché carbone à tous les combustibles fossiles
En Europe et surtout en France, ce nouvel objectif risque donc de peser principalement sur les ménages. Le recours au marché du carbone qui concerne surtout les industriels ne sera pas suffisant pour inciter aux économies. Pour le CAS, si l'Europe s'engage vers un objectif de réduction de 30%, l'internalisation du coût carbone s'avère par conséquent indispensable. Cette internalisation peut prendre différentes formes : taxes, marchés de permis, normes et réglementations, péages, certificats verts, bonus-malus, subventions… Le centre d'analyse stratégique plaide pour sa part pour l'élargissement du marché d'échange de quotas carbone (marché ETS) à l'ensemble des combustibles fossiles vendus en Europe en imposant aux importateurs et aux producteurs européens d'acquérir un nombre de quotas correspondant à leur contenu en CO2. Selon le CAS, ce dispositif aurait plusieurs avantages et pourrait notamment être décidé par l'Union européenne à la majorité qualifiée. La mise en place d'une taxe carbone européenne au contraire nécessiterait une adoption à l'unanimité comme tout ce qui concerne la fiscalité en Europe.
Les options de l'Europe seront présentées fin mai
La Commission européenne doit présenter en détail son plan d'action en la matière le 26 mai prochain aux Etats-membres et au Parlement européen. Elle reste convaincue que l'objectif est abordable d'autant plus que la crise économique rend plus accessible l'objectif actuel de -20% d'ici 2020. Selon un scénario du CAS, le niveau des émissions totales de CO2 serait réduit d'environ 7 % en 2020 par rapport à l'évolution tendancielle ''sans crise'' sur laquelle se sont basés les calculs de l'objectif de 20%. Les Etats membres restent quant à eux très divisés sur le sujet comme l'a montré la réunion informelle des ministres de l'Environnement de Séville en janvier : la Commissaire européenne à l'action pour le climat, ainsi que certains pays, envisagent un chiffre de 30 % grâce notamment à l'achat de quotas dans d'autres pays et à la prise en compte des actions liées à l'utilisation des terres et à la lutte contre la déforestation. Cette question sera à l'ordre du jour du Conseil européen de juin.
En attendant les industriels s'inquiètent. L'Association européenne de la sidérurgie s'est ainsi déclarée totalement opposée à toute augmentation unilatérale de l'objectif européen. La Confindustria, le Medef italien, a quant à lui envoyé une lettre au président de la Commission européenne, José-Manuel Barroso, soulignant que les objectifs du paquet énergie climat, adopté en 2008, sont déjà largement contraignants pour l'industrie italienne. La Confindustria estime par conséquent que le nouvel objectif ne pourrait être envisagé que si les autres pays industrialisés assument des objectifs équivalents que les pays émergents acceptent des mesures de réduction concrètes.