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Atténuation : le triptyque végétation - eau - matériaux

Ilots de chaleur : premières pistes pour ré-inventer la ville Actu-Environnement.com - Publié le 04/07/2016

Différentes stratégies d'adaptation sont déployées selon les contextes urbains pour lutter contre les îlots de chaleur. Mais ces solutions doivent être combinées et faire partie d'une vision globale, à la croisée d'autres enjeux.

Ilots de chaleur : premières pistes...  |    |  Chapitre 4 / 6
Atténuation : le triptyque végétation - eau - matériaux
Environnement & Technique N°360 Ce dossier a été publié dans la revue Environnement & Technique n°360
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Lorsqu'on parle d'atténuation d'îlots de chaleur urbains (ICU), revient souvent le triptyque végétalisation - humidification - matériaux. Ces solutions sont souvent combinées pour limiter ce phénomène et réduire de quelques degrés la température. "Ces dispositifs sont complémentaires mais leurs effets ne s'additionnent pas", souligne Marjorie Musy, chercheur au centre de recherche Architectures Urbanités (Crenau) et directrice adjointe de l'Institut de recherche en sciences et techniques de la ville (IRSTV).

Une ville plus verte et plus aérée

La réintroduction du végétal en ville est une des principales mesures mises en place pour lutter contre l'îlot de chaleur urbain. "La température rafraîchit plus vite dans les zones où il y a de la végétation et qui sont moins denses", explique Marjorie Musy. Apport d'ombrage, évapotranspiration : la végétation, et notamment les arbres, favorisent une baisse de la température et une augmentation du taux d'humidité dans l'air. De plus, les plantes apportent d'autres services : filtration de l'air, gestion de l'eau pluviale… "La ville de New York a estimé que, pour 1$ investi dans un arbre, les retombées économiques équivalaient à 5$, raconte Olivier Papin, directeur du bureau d'études ECIC, ajoutant : Dans la lutte contre les ICU, on privilégie donc la nature en ville, qui est un outil passif à coût assez faible".

 
S'inspirer des villes du sud de la Méditerranée Au sud de la Méditerranée, le thermomètre affiche des températures élevées sur de longues périodes. Les villes ont donc été conçues pour respirer. Les constructions offrent des zones de fraîcheur grâce aux patios, aux occultations, à la ventilation naturelle traversante… Les médinas sont, à l'échelle d'un quartier, des exemples d'îlots de fraîcheur au cœur des villes...

Le bureau d'études ECIC a décidé de s'en inspirer. Il a été désigné lauréat d'un appel d'offres, lancé par Engie-Open innovation mi-juin, afin de développer des solutions innovantes pour lutter contre les îlots de chaleur dans les villes méditerranéennes. L'idée : créer un réseau d'acteurs venant du pourtour méditerranéen (collectivités, aménageurs…) pour mutualiser les outils, les travaux, les réflexions en cours sur ce sujet. Et bénéficier d'une expérience ancestrale : "Nous voulons analyser comment une ville méditerranéenne a géré la chaleur par le passé. Ces solutions de bon sens ont été développées par les populations qui vivent dans des pays chauds. Elles ont une longueur d'avance sur nous. Il s'agit de répliquer ces solutions, afin d'éviter de développer des solutions brutales", explique Olivier Papin, directeur d'ECIC.
 
Mais cette revégétalisation devra être bien pensée. Les grands espaces verts devront être, de préférence, implantés ou préservés en amont des vents dominants. "Les ceintures forestières ou forêts urbaines permettent de rafraîchir l'air qui arrive dans les premiers quartiers, mais dès que l'air passera sur une ou deux zones chaudes, ce sera fini", explique Marjorie Musy. Il faut donc multiplier les espaces végétalisés.

Les alignements des arbres permettent notamment de rafraîchir les rues, en créant un ombrage, "mais peuvent présenter des limites, précise Marjorie Musy. Le végétal peut notamment empêcher le refroidissement nocturne, en créant un obstacle aux échanges avec la surface froide qu'est le ciel. Il peut aussi empêcher l'air de balayer une zone". Autre problématique : l'accès à l'eau en été pour l'arrosage des plantes. Il faudra donc privilégier les espèces les plus adaptées aux conditions climatiques locales.

Quant aux toitures végétales, "elles peuvent être intéressantes si elles constituent une couverture végétale supplémentaire. Si elles se substituent au sol, c'est une impasse", souligne la scientifique. "Mais il faut qu'elles soient plantées de manière semi-intensive, voire intensive pour avoir un réel effet, et pas seulement de sedums", précise Catherine Muller, présidente de l'Union des entreprises du paysage (Unep). Ce qui peut limiter le nombre de toitures végétalisables, puisque la structure porteuse doit être suffisamment solide pour accueillir ce dispositif. Les murs végétalisés fonctionnent quant à eux comme "de petits climatiseurs qui vont permettre la circulation d'un courant d'air frais entre la façade et la végétation", explique la présidente de l'Unep.

L'Ademe recommande également de végétaliser les places de parking, au moins les pourtours, ou totalement, en optant pour des revêtements semi-végétalisés (modules alvéolaires…). La réintroduction de tramways est également l'occasion de créer des parterres végétaux au sein des villes.

Des points d'eau pour un effet instantané

Les municipalités sont également friandes de points d'eau pour rafraîchir la ville et créer des zones de loisirs, comme le fameux miroir d'eau de Bordeaux (33). Les brumisateurs constituent également une solution efficace pour les piétons. "Mais la gestion de l'eau en ville est toujours compliquée, elle pose des questions sanitaires", estime Marjorie Musy. De plus, le bilan environnemental de ces solutions n'est pas très positif (consommation d'énergie, d'eau…). Des projets commencent toutefois à émerger pour améliorer l'empreinte écologique de ces solutions, comme le stockage intersaisonnier des eaux pluviales par exemple. La ville de Bordeaux a également opté pour la réouverture de deux bases de loisirs, aux portes de la ville au nord et au sud, pour offrir à ses habitants une échappatoire proche en cas de période de chaleur.

"L'arrosage des rues, comme cela se faisait dans les villes méditerranéennes, permet également de rafraîchir très localement la température de surface de quelques degrés. L'effet est cependant moindre que la végétalisation car la surface qui va s'évaporer est plus petite que celle d'une pelouse...", explique la scientifique. Veolia a testé, à Lyon (69), l'arrosage d'une rue pendant deux étés. "Au niveau du sol, on constate un gain de 5°C, ce qui permet d'éviter la surchauffe liée à la couleur du matériau, raconte Luce Ponsar, chargée de projet Plan climat du Grand Lyon. En revanche, à hauteur d'homme (1,50 m), le gain n'est que de 0,5°C. L'effet est donc très local, cette solution n'est pas forcément pertinente pour une route. Elle l'est peut-être pour des lieux qui devront rester minéraux (trottoirs…) ou sur des zones piétonnes en attendant que la végétation pousse".

Quant au rôle des cours d'eaux dans le rafraîchissement des villes, il semble limité : "Plusieurs études ont montré que la fraîcheur est transportée le long des fleuves et ne bénéficie pas aux espaces latéraux", indique Marjorie Musy.

Eviter les matières qui emmagasinent la chaleur

Avant tout, il faut donc éviter les matières qui emmagasinent la chaleur en journée et la restituent la nuit. Il s'agit de jouer sur l'effet albédo des revêtements et matériaux d'aménagement. L'asphalte et le béton, régulièrement utilisés, ont un albédo très faible, ce qui signifie qu'ils réfléchissent peu les rayons du soleil et emmagasinent donc la chaleur, rappelle l'Ademe. Au contraire, utiliser des matériaux à albédo élevé, réfléchissant ou clairs, pour l'aménagement des espaces minéralisés permet de réduire le phénomène d'îlot de chaleur. "New York a beaucoup utilisé cette solution en toiture", souligne Olivier Papin. Mais, nuance Marjorie Musy, "si les peintures réflectives sont très intéressantes pour les bâtiments, en revanche, lorsqu'elles sont utilisées au sol, l'effet réflectif renvoie l'énergie sur le piéton, ce qui est plutôt inconfortable".

L'Ademe préconise le recours à des matériaux perméables (pavés végétaux, asphaltes poreux, dalles perméables…) pour humidifier les surfaces minéralisées. A Lyon, le réaménagement du quartier de la Part-Dieu va permettre, cet été, de comparer différents matériaux de revêtement, avec huit carrés de tests différents : bétons poreux, chaussées drainantes mais aussi des matériaux à albédo variable selon l'inclinaison du soleil.

Sophie Fabrégat

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Reproduction interdite sauf accord de l'Éditeur.

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