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Adaptation au changement climatique : l'incurie mondiale

A la veille de la COP 28, les Nations-Unies font le point, comme chaque année, sur les efforts mondiaux en faveur de l'adaptation au changement climatique, notamment en faveur des pays vulnérables. Le constat est sévère.

Gouvernance  |    |  N. Gorbatko
Adaptation au changement climatique : l'incurie mondiale

« Sous-financés, sous-préparés ». Le titre du huitième rapport annuel du Programme des Nations Unies pour l'environnement (PNUE) sur l'écart entre les besoins et les perspectives en matière d'adaptation aux changements climatiques ne laisse place à aucune ambiguïté : pour l'organisation onusienne, les réponses des pays sont aujourd'hui parfaitement inadéquates, en termes de planification comme d'investissements, exposant le monde entier « au danger ». Publiée ce jeudi 2 novembre, en prévision de la Conférence des Nations Unies sur le climat (COP28) qui s'ouvrira à la fin du mois, à Dubaï (Émirats arabes unis), cette étude se base sur une analyse exhaustive des documents et données disponibles sur les coûts, les besoins, les financements et les stratégies en 2022. Elle est sans appel.

En préambule, les rapporteurs constatent pourtant bien une volonté croissante des pays à faire face aux risques. Aujourd'hui, cinq d'entre eux sur six ont déjà établi au moins un plan, une stratégie ou une politique nationale d'adaptation. Un quart des parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) a également créé des instruments juridiques pour contraindre leur gouvernement à planifier l'adaptation. Le PNUE note aussi des améliorations significatives en termes d'adéquation et d'efficacité de cette planification. Mais 29 pays, soit 15 % des « parties », restent toujours sans outil de planification. Ces derniers figurent majoritairement dans la catégorie des plus vulnérables.

Moins de projets en cours

“ « Une majorité des actions mises en œuvre par les pays en développement dépendent d'un soutien financier extérieur. » ” Rapport 2023 du PNUE sur l'écart entre les besoins et les perspectives en matière d'adaptation aux changements climatiques
En termes d'actions entreprises, le bilan se révèle particulièrement alarmant car si la valeur des nouveaux projets d'adaptation financés par les fonds pour le climat de la CCNUCC a augmenté de quelques millions en 2022, leur nombre a diminué passant d'une cinquantaine en 2021 à une trentaine en 2022. Mais surtout, l'ensemble se révèle globalement très insuffisant face à l'accélération actuelle des risques et des impacts climatiques à l'échelle mondiale : sécheresse pluriannuelle en Afrique de l'Est, inondations en Chine et en Europe, chaleurs extrêmes et incendies de forêt aux États-Unis d'Amérique ou au Canada, notamment.

Pour le PNUE, les fonds fléchés vers l'adaptation sont ainsi de 10 à 18 fois moins importants que ce qu'ils devraient être. Le manque s'établirait entre 194 et 366 milliards de dollars américains par an. Pour les seuls pays les plus pauvres, les besoins en financement oscilleraient entre 215 et 387 milliards de dollars par an. « Une majorité des actions mises en œuvre par les pays en développement dépendent d'un soutien financier extérieur, l'incapacité à relancer les investissements dans les actions d'adaptation entraînera inévitablement des impacts climatiques plus marqués et des pertes et des dommages ultérieurs, préviennent les auteurs du rapport. Cela rendra les pays en développement criblés de dettes encore plus vulnérables aux événements extrêmes. »

La quête d'égalité reste un objectif

Le changement climatique exacerbe les inégalités liées à l'identité sociale – le sexe, l'origine autochtone ou ethnique, l'âge, le statut de migrant ou le handicap – alors qu'au contraire, les activités d'adaptation prenant en compte le genre et d'autres identités sociales réalisent plus facilement leurs objectifs, souligne le PNUE. Dans son rapport 2023, l'organisation a donc analysé l'intégration de l'égalité des sexes et de l'inclusion sociale dans les contribution déterminée au niveau national (CDN) et les Processus de plan national d'adaptation (PAN) chiffrés. Seuls 20 % de ces plans disposent d'un budget réservé à de telles activités, avec un montant alloué généralement faible, de l'ordre de 2 %. Les financements publics internationaux destinés à l'adaptation ne font pas beaucoup mieux : 2 % sont sensibles au genre et 24 % sont intégrateurs ou réservés au genre.

Plus de risques de mal-adaptation

En guise de triple ou quadruple peine, les pays les moins aisés se trouvent aussi confrontés aux faibles ratio subventions/prêts. Mais ils courent aussi le danger de privilégier les interventions réactives ou mal calibrées, quand une aide efficace les aurait orientés, au contraire, vers des mesures préventives de qualité. Chaque milliard de dollars investi dans l'adaptation aux inondations côtières permet par exemple d'éviter 14 milliards de dollars de dommages économiques, souligne le PNUE. De même, apporter 16 milliards de dollars à la résilience de l'agriculture éviterait la faim chronique ou la mort à 78 millions de personnes. Or, après un pic à 25,2 milliards de dollars entre 2018 et 2020, les flux internationaux vers ces pays, les moins à même d'investir seuls, ont diminué de 15 % pour atteindre 21,3 milliards de dollars en 2021.

Afin de garantir le doublement de ces aides ciblées des pays développés vers les pays en développement et atteindre les quelque 40 milliards de dollars promis lors de la COP 26 de Glasgow, d'ici 2025, les bailleurs de fonds devraient augmenter leurs enveloppes annuelles de 16 % environ, entre 2022 et 2025. Un effort qui permettrait sans doute de diminuer le fossé constaté par le PNUE, mais sans le résorber totalement. « Il ne réduirait le déficit que de 5 % à 10 % », précisent les rapporteurs.

Diversifier l'origine des flux

Pour combler ces lacunes en matière de financement de l'adaptation, leur étude identifie six autres approches, à ajouter au financement public international : les dépenses intérieures d'adaptation, à condition de rendre les flux financiers cohérents avec un développement sobre en carbone et résilient au changement climatique ; le soutien par le secteur privé ; les envois de fonds par les migrants vers leur pays d'origine, qui représentent généralement une part significative du PIB ; l'augmentation des soutiens aux petites et moyennes entreprises qui constituent la majeure partie du secteur privé dans de nombreux pays en développement ; la réforme de l'architecture financière mondiale et l'exécution de l'article 2.1 de l'Accord de Paris sur la comptabilité des flux financiers.

Le PNUE s'intéresse par ailleurs à la question des pertes et préjudices, lorsque les efforts d'adaptation n'ont pas pu aboutir. Au cours des deux dernières décennies, les dégâts dans les 55 économies les plus vulnérables au climat auraient en effet dépassé à eux seuls 500 milliards de dollars. Souvent mentionnée dans les contributions déterminées au niveau national (CDN) et les Processus de plan national d'adaptation (PAN), la notion allant des pertes et dommages quantifiables à la prise en compte de tous les impacts anthropiques du changement climatique, reste toutefois mal définie sur le plan conceptuel.

L'élaboration d'une liste de mesures visant à lutter contre ces impacts avant, pendant et après les événements sera importante dans le contexte de la mise en place du cadre institutionnel pour y faire face, indique ainsi le PNUE, de même qu'une coopération entre les différentes instances internationales, « compte tenu de la nature complexe, cumulée, en cascade et transfrontalière du risque climatique. »

Des dérèglements persistants

La France comme l'Union européenne a en tout cas d'ores et déjà reconnu la nécessité de renforcer les dispositifs de financement existants dans ce cadre et invité tous les pays à intensifier leurs efforts sur ce volet. Le sujet s'avère d'autant plus crucial, à la veille de la COP 28, que l'action climatique actuelle ne permettra pas d'atteindre les objectifs de température de l'Accord de Paris. « Alors que les températures moyennes mondiales dépassent déjà 1,1°C par rapport aux niveaux préindustriels, les plans actuels reflétés dans les contributions déterminées au niveau national (CDN) nous mettent sur la voie d'une température de 2,4°C à 2,6°C d'ici la fin du siècle », rappelle le PNUE.

Les risques climatiques s'accélèreront en outre à chaque fraction de degré, en raison de la nature cumulée et en cascade des impacts liés au climat. « Même si la communauté internationale arrêtait aujourd'hui d'émettre tous les gaz à effet de serre, il faudrait des décennies pour que le climat se stabilise, renchérit la directrice exécutive de l'organisation, Inger Andersen. Le dérèglement climatique est là pour rester à long terme. »

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