Le Conseil d'Etat a annulé le 17 décembre un arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux qui avait reconnu, le 24 janvier 2013, la responsabilité partielle de l'Etat dans l'explosion de l'usine AZF de Toulouse le 21 septembre 2001, faisant 31 morts. La cour administrative avait alors retenu une faute de surveillance de l'Etat et alloué 3.750 euros de dommages-intérêts à trois riverains du site (1.250 euros chacun). Saisie par le ministère de l'Ecologie, la plus haute juridiction administrative juge au contraire que l'Etat "n'a pas commis de faute".
Le Conseil d'Etat (1) rappelle que l'explosion était intervenue au sein d'un entrepôt, dit bâtiment 221, sur le site de l'usine. Étaient stockées dans ce bâtiment "mal entretenu, en vrac", plus de 600 tonnes de produits divers dont le croisement a provoqué l'explosion. Il estime que "la cour n'a pas pu déduire de la seule existence au sein de l'usine AZF d'un stockage irrégulier de produits dangereux pour des quantités importantes et sur une longue période dans le bâtiment 221, une faute de l'administration dans sa mission de contrôle de ces installations". Il juge "qu'il n'y a pas eu de carence fautive de l'Etat dans l'exercice de ses pouvoirs de contrôle des installations classées."
Le Conseil d'Etat souligne que le site de l'usine AZF qui comportait 82 installations classées réparties sur 70 hectares, avait fait l'objet de onze visites d'inspection entre 1995 et 2001 et que "l'administration ne disposait d'aucun élément permettant d'identifier le bâtiment 221 comme recelant une particulière dangerosité". Le Conseil d'Etat a par conséquent rejeté les demandes indemnitaires des requérants.
"Il a été prouvé que les services de l'Etat, la Drire (2) à l'époque, n'ont jamais contrôlé le hangar 221 où a eu lieu l'explosion", a déclaré, à Reuters, Denis Molin, l'un des requérants et membre de l'association "Plus jamais ça".
"L'Etat se dédouane (...), c'est un recul du pouvoir de surveillance de l'Etat et donc de la sécurité des citoyens", a décrié, de son côté, Stella Bisseuil, avocate de l'association des familles endeuillées, sur France 3 Midi-Pyrénées.
La cour d'appel de Toulouse avait condamné en septembre 2012 la société Grande-Paroisse, filiale de Total, à 225.000 euros d'amende et l'ancien directeur de l'usine AZF, Serge Biechlin, à trois ans de prison, dont un an ferme, et 45.000 euros d'amende. Les prévenus étaient poursuivis pour "homicides et blessures involontaires","atteinte à l'intégrité des personnes" et "destruction de biens". Le groupe Total et M. Biechlin se sont pourvus en cassation contre cette décision. La Cour de cassation doit trancher le 13 janvier 2015.