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Entre ombre et lumière : décryptage du décret relatif au développement de l'agrivoltaïsme

Une nouvelle étape d'importance est désormais franchie dans le dispositif réglementaire qui sera celui de l'agrivoltaïsme, et du photovoltaïque en général. Nous y revenons en détail, depuis les critères de définition jusqu'aux sanctions encourues.

DROIT  |  Commentaire  |  Energie  |  
   
Entre ombre et lumière : décryptage du décret relatif au développement de l'agrivoltaïsme
Corinne Lepage et Roxane Sageloli
Respectivement avocate associée et avocate, Huglo Lepage Avocats
   

La question du développement de l'énergie solaire doit être abordée dans le cadre plus large de la massification du recours aux énergies renouvelables (ENR).

Les transformations au niveau planétaire sont impressionnantes. Ainsi, le rapport de l'Agence internationale de l'énergie publié le 11 janvier 2024 souligne-t-il qu'en 2023, la capacité renouvelable mondiale a augmenté de 50 % pour atteindre 510 gigawatts (GW), dont les trois quarts proviennent de l'énergie solaire.

L'objectif fixé lors de la COP28 de tripler la capacité renouvelable mondiale d'ici 2030 par rapport au niveau de 2022 porterait la production à 11 000 GW. Dans le cadre du « Fit for 55 » publié par la Commission européenne, dont la France se félicite, l'objectif fixé est de l'ordre de 46 % d'ENR en 2030.

Il reste que la trajectoire actuelle, qui permettrait de multiplier par 2,5 la capacité mondiale actuelle d'ici 2030 pour atteindre 7 300 GW en 2028 est encore insuffisante. Et dans ce cadre, la production française reste extrêmement faible (115 térawatts-heure (TWh)). Nous avons à peine atteint 21 % d'énergies renouvelables dans notre consommation finale brute d'énergie en 2023, ce qui signifie que nous ne sommes même pas parvenus aux 23 % que nous aurions dû atteindre en 2020.

Le développement du solaire photovoltaïque est donc absolument indispensable. Il l'est d'autant plus que le nouveau nucléaire ne produira ses effets qu'à partir de 2040 environ.

Pour autant, ce développement du solaire au sol se heurte à une double problématique : celle du maintien de l'activité agricole, d'une part, et celle la protection de la biodiversité et de l'environnement d'autre part.

D'où la réticence observée quant à l'implantation d'installations solaires au sol, et l'intérêt majeur que présente le développement de l'agrivoltaïsme dans ce cadre. Car celui-ci permet précisément de marier une activité agricole ou forestière avec la production d'électricité, tout en procurant une source de revenus complémentaires aux agriculteurs. Il offre également de nombreux avantages agronomiques, en réduisant le stress hydrique et la consommation d'eau, en réduisant le stress thermique (avec la création d'un microclimat qui peut aller jusqu'à 2° en plus ou moins), et en permettant une potentielle amélioration des cultures.

L'intérêt est d'autant plus grand que l'agrivoltaïsme peut s'adapter aux grandes cultures, au maraîchage, à la viticulture, à l'arboriculture et à l'élevage. Il peut être décliné en agrivoltaïsme statique, dynamique, sans ou avec pilotage.

On aurait donc pu penser que cette nouvelle activité rencontrerait un très grand soutien dans le monde agricole. Tel n'a pourtant pas toujours été le cas, et le contenu comme les débats autour du décret relatif au développement de l'agrivoltaïsme et aux conditions d'implantation des installations photovoltaïques sur terrains agricoles, naturels ou forestiers, finalement publié le 9 avril 2024 en témoignent. Le système qui débute et qui, en conséquence, devrait être largement ouvert, s'avère en réalité très encadré.

Ce décret, pris en application de la loi du 10 mars 2023 relative à l'accélération de la production d'énergies renouvelables, dite loi Aper ou loi ENR, crée de nouvelles sections réglementaires tant au sein du code de l'énergie que du code de l'urbanisme, consacrées spécifiquement au photovoltaïque et à l'agrivoltaïsme. Nous reviendrons sur ses principales mesures.

I. Les critères de qualification des installations agrivoltaïques

L'article L. 314-36 du code de l'énergie issu de la loi Aper définit l'installation agrivoltaïque comme une installation de production d'électricité utilisant l'énergie radiative du soleil et dont les modules sont situés sur une parcelle agricole où ils contribuent durablement à l'installation, au maintien ou au développement de la production agricole.

Pour être considérée comme agrivoltaïque, il faut que l'installation apporte directement à la parcelle agricole (1) au moins l'un des quatre services suivants (2), en garantissant à un agriculteur actif (3) ou à une exploitation agricole à vocation pédagogique gérée par un établissement d'enseignement ou de formation professionnelle agricole une production agricole significative (4) et un revenu durable en étant issu (5) :

- l'amélioration du potentiel et de l'impact agronomiques ;

- l'adaptation au changement climatique ;

- la protection contre les aléas ;

- l'amélioration du bien-être animal.

Dans le même temps, l'installation ne doit pas porter une atteinte substantielle à l'un de ces services, ou une atteinte limitée à deux d'entre eux. Elle doit permettre à la production agricole d'être l'activité principale de la parcelle agricole (6), et présenter un caractère réversible (7).

Le décret revient sur l'ensemble de ces critères, qui sont désormais précisés sous les articles R. 314-108 et suivants du code de l'énergie.

1. La parcelle agricole

S'agissant de laparcelle agricole, il précise qu'elle correspond à un périmètre présentant les mêmes caractéristiques agricoles, supportant un projet d'installation agrivoltaïque et déterminé par les limites physiques d'une implantation continue de panneaux photovoltaïques. Il peut être d'une superficie différente de celle de la parcelle considérée par le cadastre ou de la parcelle délimitée dans les conditions fixées à l'article D. 614-32 du code rural et de la pêche maritime sur laquelle est réalisé le projet (1) . Soit une définition qui, bien qu'elle ait légèrement évolué au fil des versions successives du décret, restera sans doute encore sujette à interprétations.

2. Les services apportés à la parcelle

Le décret revient ensuite sur les différents services devant être apportés à la parcelle agricole :

- Pour qu'il y ait amélioration du potentiel et de l'impact agronomique, il faut une amélioration des qualités agronomiques du sol et une augmentation du rendement de la production agricole, ou à défaut, le maintien de ce rendement sinon au moins la réduction de la baisse tendancielle observée au niveau local. La remise en activité d'un terrain agricole inexploité depuis plus de cinq ans pourra également être considérée comme une amélioration du potentiel agronomique des sols (2) .

- Pour qu'il y ait adaptation au changement climatique, il faut que l'installation permette une limitation des effets néfastes du changement climatique en augmentant le rendement ou, à défaut, en réduisant, voire en maintenant le taux de réduction tendanciel observé au niveau local, ou en améliorant la qualité de la production agricole. Sont pris en considération les impacts thermiques, hydriques et radiatifs, qui sont définis par le décret (3) .

- La protection contre les aléass'apprécie au regard de la protection apportée par les modules agrivoltaïques contre au moins une forme d'aléa météorologique, ponctuel et exogène à la conduite de l'exploitation et qui fait peser un risque sur la quantité ou la qualité de la production agricole, à l'exclusion des aléas strictement économiques et financiers (4) .

- L'amélioration du bien-être animal s'apprécie au regard de l'amélioration du confort thermique des animaux, démontrable par l'observation d'une diminution des températures dans les espaces accessibles aux animaux à l'abri des modules photovoltaïques et par l'apport de services ou de structures améliorant les conditions de vie des animaux (5) .

3. L'agriculteur actif

Sera dans ce cadre considérée comme agriculteur actif toute personne physique ou morale qui répond aux conditions de l'article D. 614-1 du code rural et de la pêche maritime. En cas de changement d'exploitant agricole, la durée pendant laquelle l'exploitation de l'installation d'agrivoltaïsme se poursuit sans agriculteur actif ne peut excéder dix-huit mois (6) .

4. La production agricole significative

Pour l'appréciation des critères relatifs à la production agricole significative, le décret distingue le cas des installations agrivoltaïques hors élevage, pourvues ou non d'une zone témoin, et des installations sur serre et sur éleLvage.

Pour l'ensemble des installations agrivoltaïques hors élevage, la production agricole est considérée comme significative si la moyenne du rendement par hectare observé sur la parcelle est supérieure à 90 % de la moyenne du rendement par hectare observé sur une zone témoin ou un référentiel en faisant office. Le préfet pourra dans certains cas en réduire la proportion sur demande justifiée.

Cette zone témoin, dépourvue de panneaux et d'ombrage doit être située à proximité de l'installation agrivoltaïque, connaitre des conditions pédoclimatiques équivalentes et être cultivée dans les mêmes conditions, de façon à garantir une production effective. Elle représente au moins 5 % de la surface agrivoltaïque installée, dans une limite d'un hectare.

L'exploitant devra régulièrement vérifier la cohérence entre, d'une part, les résultats agronomiques de la parcelle agricole et de la zone témoin et, d'autre part, les résultats agronomiques et les séries de données historiques disponibles à l'échelle de l'exploitation agricole et de la petite région agricole ou, à défaut, à l'échelle départementale.

Les conditions techniques de mise en œuvre de ces nouvelles dispositions seront définies par arrêté (7) .

Une dérogationà l'obligation de se référer à la zone témoin est possible :

- pour les installations dont le taux de couverture est inférieur à 40 %, soit dans le cas où l'exploitant justifie de l'existence d'une installation agrivoltaïque similaire au niveau départemental ou régional, comportant une zone témoin et connaissant des conditions pédoclimatiques équivalentes, soit s'il y a une incapacité technique à mettre en place une zone témoin. Dans ce dernier cas, un référentiel local doit être utilisé, basé sur les résultats agronomiques et les séries de données historiques disponibles ;

- pour les installations utilisant l'une des technologies agrivoltaïques éprouvées figurant sur une liste établie par arrêté ministériel en fonction du mode de culture ou d'élevage, du procédé technique photovoltaïque utilisé et de l'implantation géographique, basée notamment sur les éléments de connaissance fournis par l'Agence de la transition écologique (Ademe) (8) .

Pour les installations sur serre, les comparaisons sont réalisées par rapport à un référentiel local basé sur les résultats agronomiques et les séries de données historiques disponibles.

Pour les installations agrivoltaïques sur élevage, le caractère significatif de l'activité agricole peut être notamment apprécié au regard du volume de biomasse fourragère, du taux de chargement ou encore du taux de productivité numérique (9) .

Les données recueillies par l'Ademe font alors office de référentiel pour l'appréciation du caractère significatif de la production agricole (10) .

5. Le revenu durable issu de la production agricole

Lerevenu issu de la production agricoleest considéré commedurable lorsque la moyenne des revenus issus de la vente des productions végétales et animales de l'exploitation après implantation de l'installation agrivoltaïque n'est pas inférieure à celle observée avant l'implantation de l'installation, en tenant compte de l'évolution de la situation économique générale et de l'exploitation. Une diminution plus importante peut être acceptée par le préfet en raison d'événements imprévisibles et sur demande dument justifiée (11) .

6. L'activité principale agricole

Pour garantir ensuite que la production agricole est bien l'activité principalede la parcelle, une installation agrivoltaïque doit satisfaire les deux conditions suivantes :

- La superficie qui n'est plus exploitable du fait de l'installation agrivoltaïque n'excède pas 10% de la superficie totale couverte par l'installation ;

- La hauteur de l'installation agrivoltaïque ainsi que l'espacement inter-rangées permettent une exploitation normale et assurent notamment la circulation, la sécurité physique et l'abri des animaux ainsi que, si les parcelles sont mécanisables, le passage des engins agricoles.

Pour les installations de plus de 10 mégawatts crête (MWc) ne figurant pas sur la liste des technologies agrivoltaïques éprouvées, le taux de couverture, défini comme le rapport entre la surface maximale projetée au sol des modules photovoltaïques sur la parcelle agricole dans des conditions normales d'utilisation, et la surface de ladite parcelle agricole, n'excède pas 40 % (12) .

L'arrêté à intervenir définissant la liste de technologies agrivoltaïques éprouvées fixera, par type de technologie éprouvée, la valeur maximale de taux de couverture pouvant permettre de garantir que la production agricole reste l'activité principale de la parcelle (13) .

7. Le critère de réversibilité

En dernier lieu, le critère de réversibilité, défini à l'article 5 du décret renvoie à l'application de l'article L. 111-30 du code de l'urbanisme, prévoyant que les modalités techniques des installations compatibles avec l'exercice d'une activité agricole doivent respecter l'objectif d'atteindre le « zéro artificialisation nette des sols » (ZAN). Elles doivent ainsi permettre que les installations n'affectent pas durablement les fonctions écologiques du sol, en particulier ses fonctions biologiques, hydriques et climatiques ainsi que son potentiel agronomique, et que l'installation ne soit pas incompatible avec l'exercice d'une activité agricole ou pastorale sur le terrain sur lequel elle est implantée. Rappelons que sous ces conditions, un espace naturel ou agricole occupé par une installation de production d'énergie photovoltaïque n'est pas comptabilisé dans la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers.

À cet effet, les ouvrages doivent respecter les dispositions du décret du 29 décembre 2023 définissant les modalités de prise en compte des installations de production d'énergie photovoltaïque au sol dans le calcul de la consommation d'espace au titre du 6° du III de l'article 194 de la loi Climat et résilience du 22 août 2021 (14) , lesquelles prévoient que les modalités de cette installation permettent de garantir :

- La réversibilité de l'installation ;

- Le maintien, au droit de l'installation, du couvert végétal correspondant à la nature du sol et, le cas échéant, des habitats naturels préexistants sur le site d'implantation, sur toute la durée de l'exploitation, ainsi que de la perméabilité du sol au niveau des voies d'accès ;

- Sur les espaces à vocation agricole, le maintien d'une activité agricole ou pastorale significative sur le terrain sur lequel elle est implantée, en tenant compte de l'impact du projet sur les activités qui y sont effectivement exercées ou, en l'absence d'activité agricole ou pastorale effective, qui auraient vocation à s'y développer.

II. Les modalités d'implantation et d'autorisation des installations photovoltaïques

  1. Les conditions d'implantation dans les documents cadres

Pour rappel, la loi Aper prévoit l'instauration d'un document-cadre arrêté par le préfet qui doit définir les surfaces agricoles et forestières ouvertes à un projet d'installation compatible avec l'exercice d'une activité agricole, ainsi que les conditions d'implantation dans ces surfaces (15) . Plus aucune installation non agrivoltaïque ne pouvant être implantée en dehors de ces surfaces et conditions.

La loi précise que seuls peuvent être identifiés à ce titre des sols réputés incultes ou non exploités depuis une durée minimale, antérieure à la publication de la loi.

Ce sont ces critères que vient préciser le décret (art. 2), ajoutant une nouvelle section 10 au code de l'urbanisme (16) .

Un sol à vocation naturelle, agricole, pastorale ou forestière est ainsi réputé inculte, au sens de l'article L. 111-29, lorsqu'il répond à l'une des conditions suivantes :

- l'exploitation agricole ou pastorale y est impossible au regard du territoire environnant en raison de ses caractéristiques topographiques, pédologiques et climatiques ou à la suite d'une décision administrative. Ce point peut notamment être apprécié au vu d'un indice pédologique départemental ;

- il n'entre dans aucune des catégories de forêts définies par arrêté ministériel, comme présentant de forts enjeux de stock de carbone, de production sylvicole ou d'enjeux patrimoniaux sur le plan de la biodiversité et des paysages (17) .

Afin de pouvoir être identifié dans le document cadre, un sol est considéré comme non exploité au sens de l'article L. 111-29 s'il n'a pas été exploité pour une durée minimale de 10 ans, antérieure à la publication de la loi Aper du 10 mars 2023 (18) . Soit une durée particulièrement longue, sachant que beaucoup d'agriculteurs partent à la retraite sans repreneur. Il y a donc là une perte qui peut être tout à fait considérable.

Sans préjudice de l'une ou l'autre des conditions précitées, sont ouverts à l'accueil de projets photovoltaïques au sol et sont automatiquement incluses dans le document cadre les surfaces répondant au moins à l'une des caractéristiques suivantes :

  1. les surfaces en zone agricole non exploitées et situées à moins de cent mètres d'un bâtiment d'une exploitation agricole ;
  2. le site est un site pollué ou une friche industrielle ;
  3. le site est une ancienne carrière, sauf lorsque la remise en état agricole ou forestière a été prescrite ou une carrière en activité dont la durée de concession restante est supérieure à 25 ans ;
  4. le site est une ancienne carrière avec prescription de remise en état agricole ou forestière datant de plus de 10 ans mais dont la réalisation est inefficace en dépit du respect des prescriptions de cessation d'activité ;
  5. le site est une ancienne mine, dont ancien terril, bassin, halde ou terrain dégradé par l'activité minière, sauf lorsque la remise en état agricole ou forestier a été prescrite ;
  6. le site est une ancienne installation de stockage de déchets dangereux ou une ancienne installation de stockage de déchets non dangereux ou une ancienne installation de stockage de déchets Inertes, sauf lorsque la remise en état agricole ou forestier a été prescrite ;
  7. le site est un ancien aérodrome, délaissé d'aérodrome, un ancien aéroport ou un délaissé d'aéroport en domaine public ou privé ;
  8. le site est un délaissé fluvial, portuaire routier ou ferroviaire en domaine public ou privé ;
  9. le site est situé à l'intérieur d'un établissement classé pour la protection de l'environnement soumis à autorisation, à l'exception des carrières et des parcs éoliens ;
  10. le site est un plan d'eau ;
  11. le site est dans une zone de danger d'un établissement Seveso pour laquelle la gravité des conséquences humaines d'un accident à l'extérieur de l'établissement est à minima importante défini selon l'annexe 3 de l'arrêté du 29 septembre 2005 ;
  12. le site est en zone d'aléa fort ou très fort d'un plan de prévention des risques technologiques ;
  13. le site est un terrain militaire, ou un ancien terrain, faisant l'objet d'une pollution pyrotechnique ;
  14. le site est situé dans un secteur effectivement délimité en tant que zone favorable à l'implantation de panneaux photovoltaïques dans le plan local d'urbanisme de la commune ou de l'intercommunalité (19) .

Sont en revanche exclus de l'identification du document-cadre les zones agricoles protégées et la zone de protection naturelle, agricole et forestière du plateau de Saclay, ainsi que les périmètres de mise en œuvre d'un aménagement foncier agricole et forestier (20) .

Les surfaces définies dans le document cadre sont identifiées à l'échelle des parcelles cadastrales, à l'exception des surfaces listées ci-dessus et des catégories de forêts définies par l'arrêté ministériel précité (21) .

La chambre départementale d'agriculture aura neuf mois, à compter de la publication du décret, pour transmettre au préfet sa proposition de document-cadre, lequel la transmettra pour avis aux personnes concernées, qui seront réputées favorables à l'expiration d'un délai de deux mois (22) . Le document-cadre sera révisé au plus tard tous les cinq ans dans les mêmes conditions (23) .

2. Les modalités de l'autorisation d'urbanisme

L'article 3 du décret précise lesmodalités de demande et de délivrance de l'autorisation d'urbanisme.

Il détaille la composition du dossier de demande d'autorisation, lequel doit comporter un document permettant de justifier le respect des critères prévus à l'article R. 111-20-1, du critère de nécessité prévu à l'article L. 111-28 pour l'installation des serres, des hangars et des ombrières à usage agricole supportant des panneaux photovoltaïques, ainsi que, le cas échéant, les éléments détaillés justifiant qu'ils répondent aux conditions de définition de l'installation agrivoltaïque, prévues à l'article L. 314-36 du code de l'énergie (24) .

L'arrêté ministériel à intervenir précise, en tant que de besoin, les conditions d'application de ces dispositions.

Le préfet est compétent pour délivrer l'autorisation, en ce compris, pour les installations agrivoltaïques, celles accessoires à une construction (25) . La CDPENAF (26) sera réputée avoir émis un avis favorable au bout de deux mois (27) .

L'article 4 du décret précise ensuite les conditions de durée de l'autorisation, de démantèlement et de remise en état après exploitation.

Les installations sont autorisées pour une durée maximale de 40 ans, prorogeable pour dix ans, renouvelables lorsque l'installation présente encore un rendement significatif (28) .

À l'issue, le propriétaire du terrain d'assiette est tenu d'enlever l'ouvrage et de remettre en état le terrain dans un délai d'un an à compter de la fin de l'exploitation ou de la date d'échéance de son autorisation, pouvant être étendu jusqu'à trois ans en cas de difficultés matérielles tenant à la topographie du terrain, sur avis conforme de la CDPENAF (29) .

Les opérations de démantèlement et de remise en état après exploitation comprennent :

- Le démantèlement des installations de production, y compris l'excavation de toutes les fondations et tranchées ;

- La remise en état des terrains, en garantissant notamment le maintien de leur vocation initiale ;

- La réutilisation, le recyclage, la valorisation ou à défaut l'élimination des déchets de démolition ou de démantèlement dans les filières autorisées.

Pour les centrales au sol, l'autorité compétente peut subordonner la mise en œuvre de l'autorisation à la constitution de garanties financières, dont le montant est fixé par l'arrêté d'autorisation d'urbanisme sur la base d'un barème forfaitaire fixé par arrêté, afin de couvrir les opérations de démantèlement et de remise en état en cas de défaillance du propriétaire.

Le bénéficiaire de l'autorisation devra adresser au maire le récépissé de consignation auprès de la CDC avant le démarrage de travaux (qui le transmet à l'autorité compétente le cas échéant), faute de quoi le maire pourra en prescrire l'interruption (30) .

III. Les modalités de contrôles et de sanctions

Les articles 6 et 7 du décret créent de nouvelles sections au sein des codes de l'énergie et de l'urbanisme.

1. Le contrôle des installations agrivoltaïques et des zones témoins

À ce titre, les installations agrivoltaïques et, le cas échéant, les zones témoins associées sont soumises à :

- un contrôle préalable à leur mise en service ;

- un contrôle du suivi du respect des conditions de définition de l'installation agrivoltaïque (services apportés à la parcelle agricole, production agricole significative et revenu durable) et des conditions de réversibilité, dans la 6ème année de la mise en service, puis tous les 5 ans pour les installations utilisant une technologie éprouvée listée, et tous les 3 ans pour les autres installations si le taux de couverture est inférieur à 40 %, sinon tous les ans ;

- une transmission d'information à un pas annuel, permettant un suivi de la production énergétique et agricole de la parcelle, qui seront pseudonymisées par l'Ademe.

Pour la réalisation de ces contrôles, l'exploitant de l'installation transmet à l'autorité compétente en matière d'autorisation d'urbanisme le rapport d'un organisme scientifique, d'un institut technique agricole, d'une chambre d'agriculture ou d'un expert foncier et agricole.

L'arrêté à intervenir précisera le contenu du rapport ainsi que les conditions de compétence et d'indépendance de l'organisme ou de l'expert foncier et agricole.

Le défaut de transmission du rapport et le non-respect des conditions de définition de l'installation agrivoltaïque feront l'objet des sanctions administratives prévues à l'article L. 142-31 du code de l'énergie (mise en demeure, sanction pécuniaires, retrait ou suspension d'un an maximum) (31) .

2. Le contrôle des installations photovoltaïques compatibles avec l'exercice d'une activité agricole (hors agrivoltaïsme)

Les installations photovoltaïques compatibles avec l'exercice d'une activité agricole (hors agrivoltaïsme) sont soumises à un contrôle préalable à leur mise en service puis à un contrôle du respect des dispositions des articles L. 111-30 et L. 111-32 du code de l'urbanisme, six ans après l'achèvement des travaux.

Ce contrôle permet de s'assurer du respect des conditions de réversibilité fixées à l'article L. 111-30 du code de l'urbanisme (objectif ZAN), permettant d'exonérer les installations de production d'énergie photovoltaïque du calcul de la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers.

Comme pour les installations agrivoltaïques, l'exploitant de l'installation transmet un rapport de contrôle à l'autorité compétente en matière d'autorisation d'urbanisme (32) .

Si le rapport révèle que les conditions de compatibilité avec l'activité agricole, pastorale ou forestière ne sont plus réunies, l'exploitant sera mis en demeure de se mettre conformité dans un délai maximum de six mois. À défaut, suivant production d'un rapport de contrôle de l'organisme ou expert foncier agricole, l'autorité administrative pourra mettre en œuvre ses pouvoirs de sanction, tels que prévus aux articles L. 480-1 à L .481-3 du code de l'urbanisme, et prescrire le démantèlement de l'installation (33) .

3. Le contrôle des travaux de démantèlement et de remise en état (installations photovoltaïques et agrivoltaïques)

Pour toutes les installations (photovoltaïques et agrivoltaïques), les travaux de démantèlement et de remise en état font l'objet d'un rapport de l'organisme établissant un relevé technique du terrain, transmis sans délai à l'autorité compétente. L'arrêté précisera le contenu du rapport, notamment les éléments de relevé technique du terrain (34) .

En cas d'absence de démantèlement ou de remise en état du site dans les conditions définies, en l'absence de transmission du rapport ou lorsque celui-ci ne permet pas d'attester du respect des conditions de démantèlement et de remise en état, l'autorité compétente en matière d'autorisation d'urbanisme pourra, après mise en demeure sous délai non satisfaite, mettre en œuvre les garanties financières, procéder d'office aux travaux nécessaires et faire supporter au propriétaire du terrain d'assiette le cout du dépassement éventuel par ces travaux du montant des garanties financières (35) .

Les articles 8 et 9 du décret, fixant les dispositions transitoires, prévoient que ces nouvelles dispositions s'appliquent :

- aux installations agrivoltaïques dont la demande d'autorisation d'urbanisme est déposée à compter d'un mois après la publication du décret ;

- aux installations photovoltaïques au sol sur terrains à vocation agricole, pastorale ou forestière dont la demande est déposée à compter d'un mois après la publication du document cadre.

Les chambres départementales d'agriculture disposent d'un délai de neuf mois à partir de la publication du présent décret pour transmettre au représentant de l'Etat dans le département leur proposition de document-cadre.

En conclusion, si ce projet de décret apporte des clarifications et des critères détaillés qui sont bienvenus, il subsiste encore beaucoup de points d'interrogation et de nombreux obstacles à relever pour assurer le succès de la transition vers les énergies renouvelables.

Ce que l'on en retient surtout, c'est à quel point les critères et les justifications à apporter pour prétendre développer un projet agrivoltaïque sont complexes, et très encadrés. On ne peut qu'y lire entre les lignes une prudence certaine vis-à-vis du développement de l'agrivoltaïsme, si ce n'est même un acte manqué au regard de l'objectif qui était initialement celui d'accélérer son développement.

1. C. éner., art. R. 314-1082. C. éner., art. R. 314-1103. C. éner., art. R. 314-1114. C. éner., art. R. 314-1125. C. éner., art. R. 314-1136. C. éner., art. R. 314-1097. C. éner., art. R. 314-1148. C. éner., art. R. 314-1159. C. éner., art. R. 314-11610. C. éner., art. R. 314-11511. C. éner., art. R. 314-11712. C. éner., art. R. 314-118 et R. 314-11913. C. éner., art. R. 314-11914. L. n° 2021-1104, 22 août 2021 : JO 24 août ; C. urb., art. R. 111-20-115. C. urb., art. L. 111-2916. C. urb., art. R. 111-56 à R. 111-6217. C. urb., art. R. 111-5618. C. urb., art. R. 111-5719. C. urb., art. R. 111-5820. C. urb., art. R. 111-5921. C. urb., art. R. 111-6022. C. urb., art. R. 111-6123. C. urb., art. R. 111-6224. C. urb., art. R. 431-27 pour le permis de construire ; C. urb., art. R. 431-36 pour la déclaration préalable25. C. urb., art. R. 422-2 et R. 422-2-126. Commission de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers

27. C. urb., art. R. 423-70-228. C. urb., art. R. 111-6229. C. urb., art. R. 111-6330. C. urb., art. R. 111-6431. C. éner., art. R. 314-12032. C. urb., art. R .463-133. C. urb., art. R. 463-234. C. éner., art. R. 314-12135. C. éner., art. R. 314-122 ; C. urb., art. R. 463-3

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