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La rénovation énergétique des copropriétés reste un angle mort

Alors que les logements énergivores seront interdits progressivement à la location, les copropriétaires restent réfractaires à engager des travaux de rénovation. Malgré des aides publiques, la question du financement constitue le principal frein.

Bâtiment  |    |  R. Boughriet
La rénovation énergétique des copropriétés reste un angle mort

En France, les copropriétés représentent 10 millions de logements, répartis dans 740 000 immeubles où vivent un tiers des ménages. La loi Climat et résilience d'août 2021 leur impose progressivement de répondre à des exigences de rénovation énergétique de leurs bâtiments. Cela commence par la réalisation d'un diagnostic qui doit indiquer l'état de la copropriété et les besoins de travaux d'entretien et de rénovation à réaliser dans le temps. Ainsi, au 1er janvier 2024, les immeubles en monopropriété et les copropriétés de plus de 200 lots devront avoir réalisé un diagnostic de performance énergétique (DPE) collectif. Les copropriétés concernées sont celles dont le permis de construire est antérieur au 1er janvier 2013. De même, une obligation de réaliser un DPE est fixée à partir du 1er janvier 2025 pour les copropriétés entre 50 et 200 lots ; et à partir du 1er janvier 2026 pour les copropriétés de moins de 50 lots.

Pour les immeubles de plus de quinze ans en copropriété, les syndics devront en outre adopter un plan pluriannuel de travaux (PPT) consacré à la rénovation énergétique et provisionner les dépenses correspondantes dans le fonds de travaux de la copropriété. L'élaboration de ce plan, qui inclut un audit énergétique, est déjà entrée en vigueur le 1er janvier 2023 pour les immeubles de plus de 200 lots. Ce PPT sera obligatoire au 1er janvier 2024 pour les immeubles de 50 à 200 lots et au 1er janvier 2025 pour les immeubles de moins de 50 lots. Il doit être actualisé tous les dix ans. L'objectif est de mettre ainsi à la disposition des copropriétaires une feuille de route sur les travaux à réaliser afin de déterminer les financements à prévoir.

Car le temps presse… sous peine que des copropriétaires se trouvent dans l'incapacité de louer leurs biens passoires thermiques considérés comme indécents, en 2025, pour ceux classés G du DPE et, en 2028, pour ceux classés F. Depuis janvier 2023, les logements étiquetés G+, et consommant plus de 450 kWh/m2 par an d'énergie finale, sont déjà exclus du marché locatif (pour un nouveau bail).

Les copropriétaires réfractaires aux lourds travaux

Or, les copropriétaires se montrent encore majoritairement réfractaires aux lourds travaux. En 2023, 60 % d'entre eux n'envisageraient pas de travaux de rénovation énergétique, selon le groupe Hellio qui a interrogé, en janvier dernier, 376 copropriétaires et responsables de conseils syndicaux. Un chiffre en hausse de 7 % par rapport à son dernier sondage réalisé en octobre 2021. « Les obligations réglementaires et interdictions de location progressives dictées par la loi Climat et résilience ne semblent pas, pour l'heure, constituer un déclencheur suffisant », constate le spécialiste de l'efficacité énergétique.

Le plus important frein à la rénovation énergétique des copropriétés reste le coût, cité par 81 % des copropriétaires interrogés (soit + 6 % par rapport à 2021), largement devant un processus de décision trop long en assemblée générale (43 %).

“ Les obligations réglementaires et interdictions de location progressives dictées par la loi Climat et résilience ne semblent pas constituer un déclencheur suffisant ” Hellio
Les travaux des parties communes doivent en effet être adoptés à la majorité, lors d'une assemblée générale (AG) de copropriété se déroulant une fois par an. Résultat, un projet de rénovation peut prendre plusieurs années (de deux à cinq ans) le temps de voter, AG après AG, la réalisation d'un audit, le programme des travaux, la sélection des entreprises et le budget qui sera alloué.

De même, selon le sondage d'Hellio, 63 % des copropriétaires n'envisagent pas de rénovation globale, soit 13 % de plus depuis 2021. Et « pour ceux qui la projettent, elle n'est envisagée qu'à long terme, pour 16 % des répondants (quatre ans et plus) ».

Le bouquet de travaux reste pourtant le plus efficace pour parvenir à de réelles économies d'énergie, via « l'isolation des murs par l'extérieur, l'isolation des planchers bas et hauts, le remplacement des installations de chauffage collectives », selon le bureau d'études thermiques Pouget Consultants.

Assouplir les règles des AG et lever le gros frein financier

Pour permettre davantage de rénovation globale, le Gouvernement envisage donc de modifier les règles de vote dans les AG : pour engager un chantier de rénovation énergétique, le vote de la majorité des copropriétaires présents suffirait, contre les deux tiers requis jusqu'à présent. Des concertations sur ce sujet sont en cours au ministère du Logement.

Des arbitrages seraient également à venir avec des banques partenaires de l'État, qui pourront accompagner au mieux les gestionnaires et copropriétaires dans le financement de travaux de rénovation globale qui restent onéreux. « La rénovation globale par logement est comprise entre 25 000 et 35 000 euros et le reste à charge, en moyenne, est de 8 000 euros par copropriétaire. Un reste à charge qu'il faudra financer en général par un prêt privé », a souligné, le 4 octobre, un spécialiste du sujet au forum Rénov'Acteurs. Celui-ci a réuni, à Paris, les professionnels de la rénovation énergétique en copropriété.

Pour inciter les propriétaires à se lancer, l'État a mis en place des aides comme MaPrimeRénov' Copropriété, versée, depuis 2021, par l'Agence nationale de l'habitat (Anah). Elle permet de financer les travaux de rénovation énergétique dans les parties communes des copropriétés qui garantissent 35 % au minimum de gain énergétique après travaux. En 2023, le plafond des travaux éligibles pour MaPrimeRénov' Copropriétés, en métropole, est de 25 000 euros par logement.

Pour Simon Corteville, responsable rénovation énergétique à l'Anah , « il faut qu'on incite maintenant toutes les copropriétés à y aller avec MaprimeRénov' Copropriétés allouée aux syndics de copropriétés. Tous les ans, on a doublé nos résultats ; on était à 7 000 logements aidés en 2021, puis on est passé à 12 000 et à 26 000 l'année dernière » , a-t-il précisé au forum Rénov'Acteurs, en ajoutant avoir, à date, doublé encore ce dernier chiffre. « Donc, on voit la dynamique. On a mis en place un financement qui permet d'avoir ce rôle incitatif et de financer le reste à charge », a-t-il assuré.

En revanche, les autres subventions publiques, comme les certificats d'économies d'énergie (CEE) et les aides locales, restent peu identifiées par les copropriétaires. Autre bémol : ces financements arrivent souvent après le démarrage des travaux, voire après leur fin. En attendant, les copropriétaires doivent contracter des prêts.

Des emprunts collectifs difficiles à mettre en place

Le syndicat de copropriétaires peut, par exemple, bénéficier de l'écoprêt à taux zéro (éco-PTZ) collectif. Il permet de financer certains travaux de rénovation énergétique entrepris dans les parties et équipements communs d'un immeuble en copropriété, ainsi que certains travaux d'intérêt collectif réalisés dans les parties privatives. Le montant de l'éco-PTZ collectif pour la copropriété peut atteindre 30 000 euros par logement, si le syndicat des copropriétaires décide de réaliser trois actions de travaux ou 50 000 euros pour des travaux permettant d'atteindre une performance énergétique globale minimale. La durée maximale de remboursement est fixée à vingt ans pour les projets de rénovation visant un gain énergétique de 35 %. Un copropriétaire souhaitant bénéficier d'un éco-PTZ copropriété peut solliciter, en outre, un éco-PTZ complémentaire pour financer les travaux dans son propre logement.

Or, contracter un prêt collectif nécessite encore le vote à l'unanimité des copropriétaires. Actuellement, la Caisse d'épargne Île-de-France et Domofinance sont les seules banques à avoir conclu un accord avec l'État pour distribuer l'éco-PTZ collectif. En Île-de-France et dans les Hauts-de-France, l'éco-PTZ est aussi distribué à titre expérimental par des sociétés de tiers-financement« Aujourd'hui, la production de ces prêts demeure extrêmement faible, même si la demande va crescendo. Demain ou après-demain, il y a aura beaucoup plus d'éco-PTZ, d'emprunts collectifs qui seront mis en place », anticipe néamoins François Millet, directeur du réseau copropriété chez Domofinance.

Interdiction des passoires : suspendre le calendrier pour les copropriétés

Pour éviter que les contractants de prêts collectifs ne voient leurs crédits refusés, la Fédération nationale de l'immobilier (Fnaim) plaide, de son côté, pour appliquer un taux d'usure affilié au crédit à la consommation. « Les prêts aux travaux de copropriétés faisaient jusqu'ici référence à un taux d'usure lié au crédit immobilier ; on a enlevé ce blocage », s'est réjoui Loic Cantin, président de la Fnaim, qui s'est fait entendre. Il a par ailleurs réitéré sa demande à l'État de suspendre le calendrier d'interdiction des passoires louées, qui, pourrait, selon lui, être conditionnée par l'adoption des plans pluriannuels de travaux. « Les délais sont difficiles à tenir. Réaliser une isolation thermique par l'extérieur, c'est dix-huit mois, après l'appel d'offres des entreprises. Il faut être pragmatique. Janvier 2025, c'est demain, et ça peut perturber l'harmonie des copropriétés. »

Par ailleurs, un rapport parlementaire, publié le 4 octobre, demande au Gouvernement d'« envisager la mise en place d'une obligation de rénovation pour certaines copropriétés (2030 pour la classe G et 2033 pour F) ». Du point de vue des deux rapporteures, les députées Julie Laernoes et Marjolaine Meynier-Millefert, cela suppose deux préalables : « D'une part, établir une procédure permettant de concilier la poursuite d'un objectif d'intérêt général et la préservation de l'équilibre des droits des copropriétaires, dans le respect des principes consacrés par le Conseil constitutionnel. Et, d'autre part et surtout, garantir un reste à charge nul ou très faible pour les ménages les plus modestes – ce qui suppose d'améliorer les conditions de financement des travaux de rénovation énergétique dans les copropriétés. »

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