Par conséquent chacun planche d'ores et déjà sur les moyens d'accroître la production de renouvelable, et notamment la France. Dans le domaine de l'éolien, le gouvernement prévoit une évolution de la réglementation afin de faciliter la concertation et la transparence. Par exemple, une circulaire datée du 12 mars dernier fixe aux préfets, la procédure à appliquer pour pallier aux perturbations occasionnées par les aérogénérateurs sur le fonctionnement des radars. Une autre circulaire est également en préparation concernant plus précisément l'éolien en mer. Concernant la biomasse, le MEDAD et le ministère de l'agriculture et de la Pêche réfléchissent à la création d'un « fonds chaleur » pour faciliter le financement des projets de chauffage collectif à base de biomasse. Pour les biocarburants, il est prévu d'accélérer la recherche sur la seconde génération et de financer des installations démonstratrices afin d'éviter les conflits d'usage soulevés ces derniers temps au sujet des biocarburants de première génération. Toutes ces mesures devraient être intégrées dans la première « Loi Grenelle » annoncée début avril pour un vote avant l'été.
Une technologie qui reste à améliorer
En ce qui concerne le solaire thermique et photovoltaïque, le ministère de l'écologie souhaite désormais officiellement une banalisation des technologies dans le bâtiment afin de les déployer à grande échelle et abaisser les coûts. Dans ce contexte, l'établissement public chargé par l'Etat du soutien à l'innovation, Oséo, a accepté, vendredi dernier, de soutenir financièrement le projet de R&D Solar Nano Crystal dont l'objectif consiste à développer des technologies photovoltaïques de pointe.
Mené sur la période 2008-2012, le programme* bénéficiera, sous réserve de l'approbation de la Commission européenne, de 46,5 M€ d'aide publique, dont 21,5 M € de subventions et 25 M € d'avances remboursables. Comme le projet requiert un budget total de 190 M€, le reste de l'investissement nécessaire sera pourvu par de nombreux acteurs économiques, scientifiques et technologiques à savoir : Emix, Photosil, Silpro, PV Alliance (PhotoWatt Technologies, EDF Énergies nouvelles, CEA), Apollon Solar, ainsi que l'Institut national de l'énergie Solaire (INES) qui fédère des équipes de chercheurs du CEA, du CNRS, de l'université de Savoie et du CSTB.
Concrêtement, le projet Solar Nano Crystal veut répondre aux principaux enjeux de la filière industrielle, notamment par l'élaboration de silicium de qualité solaire, l'augmentation du rendement des cellules photovoltaïques et enfin l'élaboration de modules innovants pour accroître la compétitivité de cette énergie.
Abaisser les prix de revient en développant la capacité de production de cellules
De manière à abaisser significativement le prix de revient de l'énergie photovoltaïque, un laboratoire pilote dédié à l'élaboration de cellules solaires d'ici 2009 sera construit. Ce pilote, appelé LabFab, contribuera notamment à la validation des résultats obtenus dans les laboratoires de l'INES sur des outils représentatifs de l'industrie photovoltaïque. Pris en charge par PV Alliance, créée par Photowatt (40 %), le CEA (20 %) et EDF Energies Nouvelles (40 %), ce laboratoire sera structuré en deux composantes : l'une dévolue aux cellules solaires sur silicium métallurgique et l'autre, consacrée à des cellules de nouvelle génération basées sur des concepts issus des micro/nanotechnologies.
La pénurie de silicium de qualité solaire qui limite les augmentations de capacité dans le monde entier oblige en effet à diversifier l'approvisionnement en silicium qui représente actuellement 92 % des cellules solaires. À cet effet, les recherches se concentrent sur l'obtention de silicium métallurgique par un procédé de purification basé sur la fission, sur l'augmentation du rendement de conversion en électricité des cellules solaires (18 % attendus en 2008 contre environ 15 % aujourd'hui), et sur le développement de nouveaux systèmes de stockage de l'énergie. La problématique ? Passer de 5€ à 1€/Wcrête - c'est-à-dire diminuer le coût du KWh de 50 cts d'euro à 10 cts - et garantir l'efficience des systèmes en terme de rapport durée de vie/usage !
Parmi les alternatives au silicium on trouve les polymères. Ici, l'objectif est de développer des cellules solaires nanocomposites (inférieure à 0.2 mm d'épaisseur), flexibles et de grande surface. Aujourd'hui, le rendement n'est que de 4 % mais les procédés de production à prix réduit des produits organiques offrent des avantages considérables.
Le projet R&D Solar Nano Crystal devrait donc contribuer à développer les marchés de la filière photovoltaïque, a assuré le Cabinet de la ministre de l'Économie, des finances et de l'emploi, Christine Lagarde et contribuera peut-être à créer une véritable filière industrielle du photovoltaïque en France. L'enjeu est de taille puisque pour atteindre l'objectif fixé par l'Europe et par le Grenelle, le Syndicat des Energies Renouvelables (SER), évalue les besoins de photovoltaïque raccordé au réseau à 7.000 MW alors que la puissance ne dépasse pas 30 MW à l'heure actuelle.
L'objectif reste possible si l'on compare ce qui se passe dans nos pays voisins, avait précisé le président du SER, André Antolini, lors d'une conférence de presse en décembre dernier à la lumière de la situation en Allemagne où 1.000 MW de photovoltaïques sont en effet installés tous les ans. Toutefois, pour réaliser l'objectif, une filière industrielle devra nécessairement être créée : en France, nous avons manqué celle de l'éolien, il ne faudra pas manquer celle-là, avait insisté le président du SER.
L'enjeu de l'intégration au bati
Outre la capacité de production de cellule, un autre défi sera à relever pour accroître la compétitivité de solaire photovoltaïque : l'amélioration de l'intégration au bâti pour une cohérence globale ! A l'occasion d'un séminaire organisé par l'Agence Nationale de la Recherche en décembre dernier à Chambéry, le directeur du CSTB, Alain Maugard, avait à ce titre insisté sur la demande du secteur du bâtiment pour des produits intégrés avec des fonctions multiples (étanchéité, isolation thermique...) et qu'à l'avenir l'installation du photovoltaïque sur l'ensemble d'une toiture, sur des façades ou des volets était envisageable. Il avait en revanche souligné l'importance de l'aspect esthétique et qu'une révolution culturelle était également nécessaire dans le secteur du bâtiment, notamment au niveau des architectes pour favoriser l'utilisation massive de l'énergie photovoltaïque.
* L'instruction de ce projet de recherche et développement (R&D) a été réalisée dans le cadre du nouveau programme « innovation stratégique industrielle », créé début janvier 2008 suite à l'intégration de l'Agence de l'innovation industrielle au sein du groupe Oseo.