Produire de l'énergie avec le lisier de porc et les déchets agro-alimentaires des industries de la région, voilà l'activité de Sensienergies, une unité de méthanisation exploitée depuis 2013 par un éleveur porcin à Saint-Nicolas-du-Tertre dans le Morbihan. Celle-ci absorbe et traite chaque année 15 000 tonnes de matières valorisées en chaleur et électricité dont une partie sert à chauffer l'établissement agricole et l'autre est injectée dans le réseau. Une fois le biogaz extrait de la matière dégradée, Vivien Texier obtient un autre sous-produit, le digestat, utilisé pour fertiliser les sols agricoles dont bénéficient les agriculteurs voisins, également partenaires du projet. La minéralisation de l'azote via le procédé de méthanisation permettrait à cet engrais naturel d'être rapidement absorbé par les plantes, ce qui réduirait les risques de nitrification et de marées vertes.
Attentes autour du groupe de travail du Gouvernement
Que d'avantages à la méthanisation à la ferme pour les agriculteurs et les acteurs du territoire selon Evergaz, l'actionnaire majoritaire de cette usine de biogaz. Son directeur général, Frédéric Flipo, espère que le groupe de travail sur la méthanisation, récemment lancé par le Gouvernement, va donner un vrai coup d'accélérateur à la filière qui peine à se développer en France. Comparé à son voisin allemand qui en compte 9 000, il n'existe que 600 unités de méthanisation à ce jour dans l'Hexagone. Les industriels ont bon espoir que les délais entre les dépôts de dossiers et la mise en service des unités se réduisent à trois ans, sachant qu'ils peuvent atteindre sept à ans ans dans certains cas. « Les délais de recours rigidifient aussi la mise en place et le fonctionnement des installations », regrette Frédéric Flipo.
Les associations mettent quant à elles en garde contre une simplification trop poussée qui se ferait au détriment de l'impact environnemental des méthaniseurs. Il serait, par exemple, question de réduire le délai de recours contre ces installations à trois mois au lieu de six actuellement. « Cela n'est pas permis », selon Camille Dorioz, chargé de mission agriculture chez France Nature Environnement (FNE). Il est important, d'après lui, de conserver un temps d'analyse suffisant pour les associations car les dossiers sont complexes et lourds. « Sinon elles vont se retrouver à déposer systématiquement des recours sans avoir pu étudier quoi que ce soit. » Pour FNE, la filière a besoin de gagner en visibilité pour se développer. Visibilité à la fois pour les projets existants mais aussi en termes de prix d'achat et de réglementation afin d'encourager les investissements.
Toutefois, gare à toute comparaison avec le modèle de méthanisation allemand, avertit Camille Dorioz. Outre-Rhin, la filière s'est développée sur des cultures énergétiques comme les biocarburants de première génération, ce qui soulève de sérieux problèmes climatiques et de changement d'affectation des sols.