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Actu-Environnement

Mieux comprendre l'impact des nuisances sonores

Les nuisances sonores Actu-Environnement.com - Publié le 10/10/2011
Les nuisances sonores  |    |  Chapitre 5 / 5
1. L'exposition au bruit nuit-elle à la scolarité ?

Des études précédentes ont mis en évidence un lien entre exposition à de forts niveaux sonores et altération des capacités cognitives chez des enfants vivant à proximité de grands aéroports. Qu'en est-il chez les enfants habitant en milieu urbain ? Y'a-t-il un lien quantitatif entre le niveau d'exposition sonore environnementale et les performances scolaires des enfants ? Tel était l'un des objectifs de la recherche menée par plusieurs équipes de recherche de l'université de Franche-Comté, le CHU de Besançon, le CSTB et l'inspection académique du Doubs. Et ce, dans le cadre d'un programme PREDIT financé par le MEEDDM.

Les enfants partageant la majorité de leur temps entre école et foyer familial (période de consolidation des acquis et de récupération), le niveau sonore auquel ils sont exposés a été considéré dans ces deux univers. Selon une méthodologie basée sur un questionnaire distribué aux familles des 900 élèves en classe de CE2, et sur une cartographie de la ville de Besançon construite à cette occasion selon la méthodologie de référence pour la mise en application de la directive 2002-49/CE.

Après comparaison des données d'''évaluations scolaires'' des élèves, un lien significatif entre niveaux sonores extérieurs et résultats scolaires en français et en mathématiques a été mis en évidence : plus l'environnement sonore de l'enfant est bruyant, moins bons sont ses résultats. Les nuisances sonores ont donc un impact sur la scolarité. ''D'autant plus dramatique que les nuisances sonores participent à l'accumulation des risques chez les enfants issus des familles les plus défavorisées, ceux-là même pour qui le chemin de l'apprentissage est à la fois... un grand défi et une promesse formidable'', commente le docteur Frédéric Mauny, directeur scientifique du projet.

2. Une conférence de riverains autour d'une ICPE fait du bruit

Dans une commune, le maire étant le garant de la tranquillité publique de ses riverains, il se doit d'exercer son pouvoir de police en matière de bruit. Excepté dans certains cas, lorsque par exemple le bruit provient d'Installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE) soumises à autorisation, qui sont placées sous la responsabilité du préfet et soumises à un régime spécial (arrêté du 23 janvier 1997).

Cela n'a pas empêché la commune de Feyzin de s'y intéresser, en commençant par faire de la médiation, en lien avec les troubles liés aux bruits de voisinage, aux bruits de chantier, et parfois aussi les bruits de la raffinerie Total. ''J'ai beaucoup interpellé les services de la raffinerie sur les bruits ressentis dans le quartier'', raconte Danielle Sauge Gadoud, conseillère technique sur le risque technologique et le développement durable de Feyzin. La raffinerie envoyait un technicien pour faire des mesures, mais c'est vrai, on n'était pas sûr que le bruit mesuré vienne de l'installation... Le bruit, c'est un peu du magma !''.

Et puis, il y a eu l'élaboration de l'agenda 21 de la ville. ''Il fallait parler ''risques'', de là est née l'idée d'une conférence riveraine sur les risques et nuisances industriels afférents à la raffinerie de Feyzin, à la demande de la ville, de Total et de l'ICSI, l'Institut pour une Culture de sécurité industrielle'', raconte-t-elle. Deux sociologues du CNRS se sont chargés de mettre en place le dispositif. ''Les gens ont parlé risques, mais les nuisances sont arrivées très vite, notamment les nuisances sonores, ce qui ne nous a pas surpris car vraiment, dans le quotidien, la raffinerie est très présente''. Mais lorsqu'il y a eu un exercice de Plan Particulier d'Intervention, en 2007, les habitants se sont rendus compte que le bruit de l'Autoroute coupée ce jour-là était le bruit prépondérant. Comme si le bruit de la raffinerie émergeait au-dessus et focalisait les riverains, tout en cachant un problème de fond.

Dans le groupe de travail ''nuisances'', la douzaine de riverains participants ont identifié les différents générateurs du bruit et sont allés à leur rencontre, avec l'aide de la mairie et d'un bureau d'étude facilitateur, pour parler ''des faits'' : tel jour à tel heure, à tel endroit, ça fait tel bruit. Le bruit de la raffinerie est devenu moins noir que ceux de l'autoroute et de la voie ferrée.
Aujourd'hui, la conférence riveraine entre dans sa seconde phase. Et dans le cadre de l'élaboration de son second plan d'action contre le bruit, Total a demandé la participation d'un membre de la conférence riveraine.

3. En milieu du travail, les exigences se durcissent

a. La directive 2003/10/CE

Selon le rapport de gestion 2010 de l'Assurance Maladie-Risques Professionnels, l'atteinte auditive provoquée par les bruits lésionnels (Tableau N° 42 du régime général) arriverait en 3ème position après les Troubles Musculo-Squelettiques et les maladies liées à l'amiante. Depuis la directive européenne 2003/10/CE du 6 février 2003, transposée en droit français par le décret 2006-892 du 19 juillet 2006 relatif aux prescriptions de sécurité et de santé applicables en cas d'exposition des travailleurs aux risques dus au bruit, les seuils d'exposition et les actions de préventions à mener ont évolué. Et une Valeur Limite d'Exposition (VLE) à ne pas dépasser à été introduite, pour les travailleurs équipés de Protecteurs individuels contre le bruit (PICB). Mais de la confidence d'un inspecteur de la caisse d'assurance maladie, elle est loin d'être respectée...

b. Les centres d'appels

Le cas des centres d'appels mobilise particulièrement l'Institut national de recherche en sécurité (INRS), l'AFNOR ou encore l'Agence Nationale pour l'Amélioration des Conditions de Travail (ANACT). ''Même s'ils ne présentent probablement pas de risque de surdité'', précise Jacques Chatillon, chef de la thématique bruit à l'INRS. Ces lieux conjuguent deux nouvelles formes d'exposition au bruit dans le contexte du travail : un milieu ouvert (open-space), à des postes fixes avec un casque téléphonique sur les oreilles. Même si le bâtiment est isolé sur le plan acoustique, l'ambiance sonore persiste.
Dans ce contexte, malgré une certaine accoutumance au bruit et le port du casque, les téléconseillers peuvent-ils dépasser cet ''handicap'' pour une relation client favorable ? Tel fut le sujet de la thèse sur ''l'influence des bruits sur la qualité de l'écoute du téléconseiller d'un centre d'appels'' de Maryse Koehl, professeur agrégée d'économie-gestion. La réponse de son travail est : ''Non''. ''Les bruits sonores perturbent la qualité d'écoute : ils remettent en cause l'application de la première étape du processus d'écoute qui est auditive, le casque ne filtrant pas l'ensemble des bruits'', conclut cette femme. Elle a développé des solutions complémentaires aux solutions techniques existantes, qui pourraient s'avérer pertinentes à l'heure où l'on se préoccupe des troubles psycho-sociaux.

4. Nuisances aéronautiques, le débat sur le couvre-feu est ouvert

Le lancement de la PREMIERE étude individuelle longitudinale avec mesure des effets sur la santé de l'exposition sonore de riverains d'aéroports en France est annoncée pour la fin 2011. L'étude DEBATS (Discussion sur les effets du bruit des aéronefs touchant la santé) est à l'initiative du ministère de la Santé et de l'Autorité de contrôle des nuisances aériennes (ACNUSA), qui émet des avis et suit les questions relatives aux nuisances sonores - entre autres, puisqu'elle a perdu le qualificatif « sonores » (articles 174 et 175 de la loi Grenelle II) -.
Mais pour l'ADVOCNAR, l'Association de Défense Contre les Nuisances Aériennes qui demande l'interdiction des vols de nuit sur tous les aéroports français, cette étude fait prendre cinq ans de retard. Et de brandir le spectre de l'augmentation du trafic aérien... L'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI) des Nations Unies estime en effet l'augmentation du trafic de 26 à plus de 50 M de mouvements/an d'ici 2030. Avec, tempère la Direction Générale de l'Aviation Civile (DGAC), un objectif de réduction des nuisances sonores fixé par le Conseil consultatif pour la recherche aéronautique en Europe (IATAR) : passer de 2005 à 2020 à -50% de bruit émis.
Pour l'ADVOCNAR, l'étude DEBATS repose sur le même protocole que le projet de recherche HYENA (Hypertension et exposition au bruit des aéroports) financé par l'Union européenne, qui en 2008 a mis en évidence le lien entre augmentation du risque d'hypertension et exposition au bruit sur le long terme, due avant tout au bruit des avions durant la nuit et au bruit du trafic routier moyen quotidien.

5. Compression des niveaux sonores ou la perception du risque

Il y a bien un arrêté destiné à protéger au plus près les oreilles de chacun d'entre nous. Il s'agit de l'arrêté du 8 novembre 2005, pris en application de l'article L.5232-1 du code de la santé publique relatif aux baladeurs musicaux. Face aux risques sur l'audition que constitue la pratique du port de casque écouté trop fort et trop longtemps, il a contraint les fabricants à mettre sur le marché des équipements limités en pression acoustique de sortie et assortis d'un message à caractère sanitaire. Mais rien encore sur la compression des niveaux sonores, dont la pratique s'est depuis peu généralisée, comme au préalable celle des baladeurs...
Sortis du haut-parleur d'un téléphone portable, d'un casque de baladeur, d'un poste de TV ou de radio, d'un micro dans une salle sonorisée... de plus en plus fréquents lors du remastering des CD... les enregistrements sonores sont de plus en plus compressés.

Alors que dans l'expression orale nous avons appris à chuchoter, à des niveaux qui approchent les 20dB ou à hurler à des niveaux plus proches de 90 dB, cette pratique engendre une réduction drastique de la dynamique des sons reproduits par des haut-parleurs. Dans les pub TV, par exemple, parce que le niveau sonore est flatteur, celles qui émettent le plus fort augmentent leurs chances d'être choisies par le téléspectateur. Pour cela, elles ont recours à des algorithmes qui réduisent la dynamique sonore : les niveaux des sons les plus faibles sont amplifiés à des niveaux proches des sons les plus forts. Résultat, il n'est pas rare de rencontrer des contenus sonores avec une différence de dynamique de l'ordre de 5 dB, ou moins ! ''Ainsi, l'oreille ne fait alors plus aucun effort pour aller rechercher les sons faibles, s'exclame l'acousticien Christian Hugonnet, à l'initiative de la Semaine du son. Et tout le monde s'habitue à ces sons sans nuance''.

Quelles sont les conséquences sur les 20 à 40 000 cellules ciliées de l'oreille interne qui sont chargées de coder en impulsions électriques les vibrations provoquées par la pression acoustique de l'air ? Est-ce susceptible de les détruire et d'engendrer des pertes auditives ? Définitives ? Ce qui est sûr, c'est que l'écoute de tels sons fait beaucoup moins travailler la chaîne des osselets de l'oreille, l'oreille moyenne qui transmet les vibrations du tympan à l'oreille interne ; elle-même étant chargée de coder ces vibrations en impulsions électriques pour le cerveau. Et qu'à force, le triple piano d'un orchestre qui se situe à 40 dB risque de ne plus être entendu par bien des personnes.

Camille Saïsset

© Tous droits réservés Actu-Environnement
Reproduction interdite sauf accord de l'Éditeur.

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