Robots
Cookies

Préférences Cookies

Nous utilisons des cookies sur notre site. Certains sont essentiels, d'autres nous aident à améliorer le service rendu.
En savoir plus  ›
Actu-Environnement

Démantèlement de Fessenheim : l'Ae s'interroge sur l'entreposage des déchets radioactifs en attente d'exutoire

L'Autorité environnementale a rendu son avis sur le dossier de démantèlement de la centrale de Fessenheim. Elle note l'absence de scénarios prévisionnels sur la production des déchets radioactifs et s'interroge sur leur évacuation vers les exutoires.

Risques  |    |  P. Collet
Démantèlement de Fessenheim : l'Ae s'interroge sur l'entreposage des déchets radioactifs en attente d'exutoire

EDF devrait préciser quelle est la chronique de production de déchets radioactifs associée au démantèlement de la centrale nucléaire de Fessenheim (Haut-Rhin). Il s'agit de s'assurer que les capacités d'accueil des exutoires sont en adéquation et de mieux évaluer les déchets radioactifs qui seront entreposés sur le site en attendant de pouvoir être évacués. Telle est l'une des principales remarques formulées par l'Autorité environnemental (Ae) dans son avis (1) sur le dossier de démantèlement de Fessenheim rendu public le 22 décembre. L'Ae estime aussi que l'impact des rejets au cours du démantèlement, en particulier des rejets liquides radioactifs, doit être mieux évalué.

Le dossier présenté par EDF doit être soumis à l'enquête publique préalable à l'obtention du décret de démantèlement (lire l'encadré) des deux réacteurs nucléaires, mis en service en 1977 et en 1978 et mis à l'arrêt définitif en 2020. Une fois le décret publié, EDF estime à quinze ans la durée des travaux.

Un site « tous usages »

EDF explique avoir pour objectif d'aboutir à un déclassement complet du site, c'est-à-dire obtenir un site compatible avec l'ensemble des usages établis, envisagés et envisageables. Des dispositions de surveillance pourront toutefois être mises en place, voire des servitudes d'utilité publique.
Pour atteindre ce résultat, le démantèlement doit assurer l'évacuation de tous les matériaux ou équipements ayant une radioactivité ajoutée « significative », explique l'Ae. De même, « les sols seront réhabilités en conformité avec les dispositions réglementaires en vigueur » et les bâtiments seront déconstruits jusqu'à une profondeur de 1 m. « Les structures plus profondes laissées en place [feront] l'objet d'un assainissement complet ou poussé visant un état final du génie civil compatible avec "tous usages" ».
EDF, qui indique vouloir rester propriétaire du site, explique ne pas encore avoir décidé quelles activités seront installées à Fessenheim.
La radioactivité résiduelle reste élevée

Bien que les combustibles aient été évacués, les niveaux de radioactivité présents « sont toujours élevés », explique l'Ae. La radioactivité restante est évaluée à 110 pétabecquerels (PBq, soit 1015 Becquerels) pour les structures activées et à 0,15 PBq pour les structures non activées mais contaminées (le tout sur une surface de 36 200 m²). À titre de comparaison, le combustible présent sur le site lors de l'arrêt des réacteurs affichait une activité de l'ordre de 100 000 PBq.

Conséquence : le démantèlement devrait générer 200 tonnes de déchets radioactifs de moyenne activité à vie longue (MA-VL), 6 210 tonnes de déchets à faible et moyenne activité à vie courte (FMA-VC) et 12 240 tonnes de déchets à très faible activité (TFA). Mais « cette évaluation ne [tient] pas compte des déchets issus des matériels et produits nécessaires au démantèlement (engins, produits chimiques…) », déplore l'Ae, qui recommande à EDF de compléter l'inventaire en conséquence.

Un planning inabouti

Comment seront gérés ces déchets ? Les déchets les plus dangereux, les MA-VL, sont destinés au centre industriel de stockage géologique (Cigeo), à Bure (Meuse et Haute-Marne). En attendant l'ouverture du site d'enfouissement, ils passeront par une « installation de découplage et de transit » qui sera aménagée dans l'ancienne salle des machines afin de gérer les colis de déchets. En outre, en attendant l'ouverture de Cigeo, certains d'entre eux seront entreposés sur l'installation de conditionnement et d'entreposage de déchets activés (Iceda), sur le site de la centrale nucléaire du Bugey, dans la commune de Saint-Vulbas (Ain).

Les déchets FMA-VC sont destinés au centre de stockage de l'Aube (CSA). L'installation dispose d'une capacité de stockage de 1 million de mètres cubes (37 % de cette capacité était atteinte fin 2022). Enfin, les métaux TFA devraient être valorisés sur le technocentre qu'envisage d'implanter EDF à Fessenheim. Ce technocentre, dont la mise en service est annoncée pour 2031, fera l'objet d'un dossier distinct. Quant aux TFA non libérables, ils seront expédiés au centre industriel de regroupement, d'entreposage et de stockage (Cires) à Morvilliers (Aube). Une installation qui fait l'objet d'une demande d'extension, sa capacité totale de stockage de 650 000 m3 devant être atteinte à l'horizon 2028 ou 2029.

L'Autorité ne trouve rien à redire sur ces modalités de gestion, mais elle constate qu'EDF ne présente pas la chronique de production de ces déchets radioactifs. Cela pose deux questions en termes d'impact environnemental. D'abord, EDF ne démontre pas que le projet est en adéquation avec les possibilités de prise en charge des déchets radioactifs. Ensuite, l'entreprise ne précise pas la nature et la date de production des déchets qui ne seront pas immédiatement évacuables. En creux se pose la question de l'entreprosage des déchets sur le site et de sa durée.

Évaluer les émissions réelles

L'avis de l'Ae revient aussi sur les impacts radiologiques et chimiques du démantèlement. En l'occurrence, l'Autorité constate que, dans l'ensemble, EDF sollicite des valeurs autorisées pour les rejets d'effluents pendant le démantèlement inférieures à celles retenues lors du fonctionnement de la centrale. EDF en déduit que le démantèlement sera sans incidences significatives, puisque le fonctionnement n'a pas eu d'incidence significative.

Mais ce raisonnement n'est pas tout à fait exact. Tout d'abord, certaines limites proposées sont plus élevées que celle retenues en fonctionnement. Ensuite, et surtout, « ce raisonnement ne peut être validé dès lors que les émissions réelles en fonctionnement ont pu être très inférieures aux limites autorisées ». En clair, l'Ae explique que certaines émissions en démantèlement pourront dépasser celles constatées en fonctionnement (tout en respectant les valeurs limites en démantèlement). Ce risque est notamment identifié pour les rejets liquides radioactifs, explique l'Ae, précisant que « cette observation vaut aussi bien pour les rejets moyens que pour les pics de concentration possibles sur de courtes durées ». L'Ae recommande donc de tenir compte des émissions réelles.

1. Télécharger l'avis de l'Ae
https://www.actu-environnement.com/media/pdf/news-43232-avis-Ae-demantelement-fessenheim.pdf

Réactions1 réaction à cet article

Ben oui, c'est vrai ça : le nucléaire produit tout plein de déchets radioactifs, certains sur de très très longues durées et les nucléocrates n'ont jamais vraiment voulu traiter ce problème monstrueux. Logique quelque part : le prendre à bras le corps aurait conduit à abandonner la filière et ça, ce n'est même pas envisageable pour ces disciples du Docteur Folamour !
A part ce menu détail de "gestion" de déchets hautement toxiques produits en quantité industrielles, il est absolument urgent d'aggraver la situation en construisant plein de nouveaux réacteurs ! L'héritage des Shadocks est assuré pour des centaines de milliers d'années.

Pégase | 12 janvier 2024 à 13h28 Signaler un contenu inapproprié

Réagissez ou posez une question au journaliste Philippe Collet

Les réactions aux articles sont réservées aux lecteurs :
- titulaires d'un abonnement (Abonnez-vous)
- inscrits à la newsletter (Inscrivez-vous)
1500 caractères maximum
Je veux retrouver mon mot de passe
Tous les champs sont obligatoires

Partager

TrichlorScan : mesurer les trichloramines dans l'air sans réactif toxique CIFEC
Votre conseil en droit de la Santé et de l'Environnement Huglo Lepage Avocats