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Les renouvelables, vecteurs de délibération démocratique et de décentralisation de l'énergie

La dynamique d'implantation des énergies renouvelables tend à contrecarrer le modèle largement centralisé qui a prévalu jusqu'à présent en matière de production et de distribution de l'énergie électrique. Les ENR se confrontent ainsi aux politiques locales et apprennent à faire avec.

Décryptage  |  Energie  |    |  A. Sinaï
Les renouvelables, vecteurs de délibération démocratique et de décentralisation de l'énergie

Les énergies renouvelables mettent en jeu une pluralité d'acteurs, publics, privés et associatifs. En Europe, les conflits sociaux et politiques qui se développent autour des ouvrages éoliens dans plusieurs régions illustrent différents types de gouvernance, note François Bafoil, directeur de recherche au CNRS au CERI Sciences Po, dans un ouvrage récemment paru, L'énergie éolienne en Europe (Presses de Sciences Po). Ces conflits mettent en lumière des champs de forces contradictoires, où se conjuguent volonté politique d'aller dans le sens du développement international des ENR, enjeux économiques et perceptions locales, conditionnées par la topographie des territoires.

La France est handicapée par une guérilla juridique contre l'éolien terrestre et par une forte culture de la centralisation, liée à la structure énergétique historiquement imprimée par le nucléaire. Ces spécificités expliquent en partie le retard de l'implantation des ENR pris par l'Hexagone censé atteindre 23% d'ENR dans son mix d'énergie finale d'ici à 2020. Objectif qui, au rythme actuel d'implantation de l'éolien terrestre et malgré l'ascension du photovoltaïque, ne sera pas atteint. Dans l'éolien terrestre, le fossé reste abyssal entre les 10.300 mégawatts (MW) installés et l'objectif de 19.000 MW en 2020.

Il en va tout autrement en Allemagne, où la structure décentralisée du pays est favorable à l'émergence des ENR. Le Land de Brandebourg, région située autour de la ville de Berlin, est emblématique des défis de la transition énergétique allemande dans le sens où les pouvoirs publics y soutiennent le développement de l'éolien tout en préservant une activité minière forte de plusieurs milliers d'emplois. La région est l'une des plus densément parsemées d'éoliennes en Europe, le dialogue noué par le Land avec les citoyens tout comme les initiatives locales en matière de production décentralisée d'énergie est à l'origine de ce spectaculaire développement des ENR.

En France, le rôle du maire est déterminant

En France, il arrive aussi que des parcs puissent s'installer sans histoire. C'est le cas de la success story de Saint-Georges-sur-Arnon, dans l'Indre, commune de 600 habitants, où les 19 éoliennes implantées à l'initiative du maire Jacques Pallas semblent faire l'unanimité. Pour les agriculteurs, elles sont une source de complément de revenus de quelque 5.600 € par an. Pour la commune, le revenu est substantiel : 4.000 € par mégawatt, soit 140.000 € par an de recettes fiscales, qui permettent d'alléger les impôts locaux et d'améliorer les équipements publics du village. Le maire Jacques Pallas entend poursuivre l'implantation d'éoliennes sur le territoire communal, puisque celles-ci fournissent dividendes et recettes aux citoyens du pays.

L'analyse d'un conflit autour d'un parc de huit éoliennes dans la commune de Plouvien du Finistère Nord témoigne de la permanence de cette longue tradition française où le rôle du maire s'avère décisif et où l'accumulation de lois peut conduire à faire obstacle au développement local, à l'instar de certains règlements imposés par la loi Littoral qui s'avèrent incompatibles avec d'autres, tirés du Grenelle de l'environnement. La personnalité du maire, jugée trop autoritaire, a concentré l'essentiel des critiques de ses opposants. Plusieurs riverains directs ont contesté le bien-fondé du parc éolien en raison des gênes visuelles et auditives occasionnées, tandis que le maire l'a défendu en arguant de raisons non pas tant financières, bien que la commune en tire une dotation de l'ordre de 50.000 euros par an, que de soutien aux politiques climatiques lancées par le Protocole de Kyoto à la fin des années 1990.

Vers des parcs éoliens participatifs

La règle prévaut qu'en matière de demande d'installation d'éoliennes, un permis de construire doit être délivré par le préfet après une instruction conforme en cas de parc de plus de 2,5 MW : enquête publique, étude d'impact, recueil des avis des services techniques et celui des maires des communes concernées, avis d'experts de la commission des sites. Les établissements publics sont également parties prenantes, à l'instar d'EDF qui rachète le courant produit, de Réseau de transport d'électricité (RTE) qui en assure l'acheminement.

Ce qui fait dire au directeur de la société productrice d'électricité Néo Plouvien qu'un parc éolien revient de facto à un partenariat public-privé avec EDF : "On pourrait avoir des partenariats plus locaux avec des sociétés d'économie mixte et des collectivités qui pourraient investir, mais ce n'est pas répandu. Les citoyens n'investissent pas individuellement, alors qu'en Allemagne ou au Danemark, c'est courant. Chez nous, c'est trop réglementé et personne ne le fait. Pourtant, je pense que des parcs vont surgir avec des communes qui vont entrer au capital comme partenaires, des parcs participatifs ; en Bretagne, des autorisations sont déjà données. Les débats sur l'acceptabilité sociale des éoliennes sont ainsi gros de ceux sur l'autonomie énergétique mais, sur ce point, nul doute que la France est aujourd'hui largement en retard sur l'Allemagne, les Pays-Bas ou encore la Grande-Bretagne".

En matière d'énergies renouvelables, sortir de la logique du rapport de force et trouver un terrain d'entente autour de l'intérêt général serait une des clés de leur implantation. L'enjeu actuel est de créer de la confiance, en intégrant les diversités sociologiques en présence. "De manière ultime, la question est de savoir si les mobilisations sociales et politiques ainsi que les solutions apportées aux différents conflits autour des éoliennes renforcent la démocratie locale", analyse François Bafoil. Car si les individus ne se retrouvent pas dans la norme venue d'en haut, il s'agit de redonner place à la prise d'initiative à partir des territoires.

C'est ce dont est persuadé David Heinry, président d'Alter&Go Concertation, cabinet de consultants qui développe un travail d'écoute et accompagne les démarches d'implantation d'ENR sur le terrain, afin de "co-construire dès l'amont un mode opératoire de concertation". Ses clients vont des très grandes entreprises à des moyennes, opérant de trois à plusieurs dizaines d'éoliennes sur le territoire français. "Les projets sont de plus en plus difficiles à mener car les porteurs de projets ont peur du dialogue avec les territoires". Il s'agit donc d'apprendre aux opérateurs et aux acteurs du territoire à changer de posture. "C'est au-delà de la transparence qu'il faut aller : vers la sincérité, vers un discours de vérité, pour faire les projets avec les gens. Parce que les propositions qui sont faites sont souvent à côté des attentes de la société ou qu'elles ne concernent qu'un petit nombre d'acteurs."

Exemple ? Sur l'éolien flottant, une concertation a eu lieu à Port Saint Louis du Rhône (13). Dans ce projet, les blocages auraient pu venir des pêcheurs. C'est ainsi que William Tillet, secrétaire général du Comité régional des pêches, estime que la concertation a permis de déplacer les emplacements de certaines éoliennes, malgré les problèmes techniques que cela peut susciter, et estime avoir été écouté. Romuald Meunier, président de l'association Golfe de Fos Environnement considère que "cette concertation est très intéressante parce qu'elle permet d'adapter le projet à tous ceux qui sont concernés, pas seulement les industriels, car tout le monde peut s'exprimer. On arrive à sortir la quintessence de cette expression".

Une nécessaire impulsion des politiques publiques

Reste que la coercition est le premier élément déclencheur du développement des ENR, ainsi que le souligne Damien Mathon, du Syndicat des énergies renouvelables (SER). L'objectif contraignant du "paquet" énergie-climat européen, qui enjoint la France à réaliser 23% de son énergie finale par les ENR d'ici à 2020, la place aussi devant ses contradictions, entre modèle nucléaire centralisé et nécessité de décentraliser une partie de la production électrique pour atteindre l'objectif fixé par la directive européenne.

"Au rythme actuel, on va être plutôt à 17-18% en 2020 plutôt qu'à 23%", souligne Damien Mathon. Ce retard, selon lui, n'est pas dû à l'acceptabilité sociale des ENR. "La popularité des énergies renouvelables est très forte, ainsi qu'en attestent plusieurs sondages. Celle du solaire est significative. C'est une forme d'énergie plébiscitée". Si les recours sont nombreux face à des projets éoliens, ils sont le fait de "quelques associations identifiées dont l'objectif est de systématiser les recours". Aujourd'hui, en France, "implanter un projet éolien contre l'avis d'un maire et des habitants, c'est pratiquement impossible".

Réactions1 réaction à cet article

De même qu'en 2016 il serait plus pertinent de parler de "développement soutenable" que de "développement durable » Pour autant que « développement » soit judicieux, alors que « durable », pour traduire « sustainable » est une très regrettable décision personnelle de Mme Gro Harlem Brundtland adressée à la maison d'édition québécoise qui prit en charge la traduction du finalement peu connu et oublié « Our common future » . Tout ce qui est durable n'est pas soutenable

De même qu'en 2016 il serait plus pertinent de parler d' « écolonomie » plutôt que d' « économie », mêm si la paternité de ce mot revient à l'ex-chef scout et ex-patron d'EDF Marcel Boiteux (toujours vivant à 94 ans)

En 2016 il serait plus pertinent de parler d'  « énergie inépuisable «  plutôt que d ' « énergie renouvelable » qui est indéfendable si on pèse ses mots ce qui, malheureusement, est plutôt rare

Sagecol | 07 avril 2016 à 10h07 Signaler un contenu inapproprié

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