Qui a dit qu'une éolienne devait impérativement se composer d'un mât et de pales ? Une start-up grenobloise, Wind Fisher, souhaite ouvrir le champ des possibles. Son « Magnus Aérostat Générateur » ne remplace pas un moulin géant mais transforme bien l'énergie du vent en électricité.
Un cerf-volant éolien
L'engin est un cylindre creux refermé par « des ailes en textile technique, comme des ballons dirigeables, remplies d'hélium et rattachées à des renforcements structurels en fibre de carbone », explique son créateur, Garrett Smith. Le résultat ressemble à un cerf-volant – ou plutôt à la bobine d'un cerf-volant, si celle-ci pouvait s'élever dans les airs. « Nous mettons l'objet en rotation face à un flux d'air. Sa forme circulaire génère un effet aérodynamique, dit effet Magnus, qui lui confère une force de portance perpendiculaire au flux d'air. C'est exactement ce qui se passe, par exemple, lorsque l'on frappe une balle de tennis avec un effet enroulé. » Des cordages lui sont attachés pour transmettre l'énergie à un générateur électrique.
Un compromis ingénieux ?
Les atouts seraient multiples, selon Wind Fisher. D'abord, le Magnus Aérostat Générateur présente des capacités techniques potentiellement supérieures aux éoliennes conventionnelles. « Une éolienne classique n'atteint généralement sa puissance nominale qu'à des vents d'au moins 11 mètres par seconde (m/s), tandis que notre éolienne aéroportée peut encore y parvenir à 7 m/s et fonctionne même avec des vents de 15 km/h, avance son inventeur, ancien ingénieur aéronautique chez Boeing et Airbus. Et comme elle fonctionne jusqu'à 100 mètres d'altitude, notre facteur de charge est, quant à lui, de l'ordre de 50 à 60 % alors qu'il est plutôt de 20 à 30 % pour une éolienne terrestre et de 35 à 45 % pour une éolienne en mer. »
Le Magnus Aérostat Générateur se présente ainsi comme une alternative pour les zones non interconnectées (ZNI), « comme l'île d'Ouessant ou la Corse, souhaitant remplacer leurs centrales thermiques au fioul ou au gazole par des énergies renouvelables », ou pour les projets d'autoconsommation agricole ou collective. Le tout, pour Wind Fisher, est de pouvoir l'installer au-dessus d'une grande surface de terrain ou de champ qu'il pourra survoler. « Notre éolienne aéroportée a besoin d'un espace de rayon de 300 à 500 mètres sans infrastructure ou habitation », estime Garrett Smith. L'engin, qui pourra être fixé à un treuil dans un simple conteneur comprenant le générateur électrique, s'oriente automatiquement en fonction de la direction du vent grâce à un système informatique embarqué. Lorsque le vent disparaît, le dispositif ne retombe pas instantanément, car « il est porté par l'hélium, plus léger que l'air, contenu dans son aile cylindrique » et, grâce à sa légèreté structurelle, il ne présente a priori aucun danger.
Risques et réglementation
Mais qu'en est-il de l'impact sur l'avifaune ? « Nous ne l'avons pas étudié, concède Garrett Smith. Mais notre aile se déplace quatre fois moins rapidement qu'une pale d'éolienne et délivre une énergie cinétique seize fois moins importante, ce qui peut être un avantage au niveau des impacts potentiels. »
Quant aux autorisations nécessaires pour installer un tel engin, l'ingénieur reste confiant. Comme la partie génératrice du système reste dans le conteneur au sol (en hauteur au niveau du rotor pour une éolienne classique), le Magnus Aérostat Générateur coche la case des éoliennes domestiques de moins de 12 mètres de haut. Néanmoins, comme il se compose essentiellement d'une aile gonflée à l'hélium, il est considéré comme un aérostat standard, qui nécessite une autorisation de vol de la part de la direction générale de l'Aviation civile (DGAC) et doit respecter les contraintes de l'espace aérien. Quant aux autorisations militaires, « nous n'avons pas encore de réponse à ce sujet mais notre textile est plus fin et plus léger qu'une pale éolienne et ne devrait poser aucun problème aux radars militaires ».