Si les termes employés pour définir ces technologiques ont une résonance assez futuriste aux oreilles des néophytes, de nombreux produits nanotechnologiques sont déjà présents sur le marché, notamment des composants électroniques et chimiques, des textiles, des revêtements de surface, des systèmes de diagnostic et d'administration de médicaments ou encore des innovations en matière de régénération tissulaire.
Pourtant ce n'est qu'un début puisque les analystes du secteur estiment qu'en 2015 les produits élaborés à partir des nanotechnologies représenteront un marché mondial de plus de mille milliards de dollars*. La production de nanomatériaux devrait ainsi connaître une croissance exponentielle dans les prochaines années et toucher de très nombreux secteurs : la production d'énergie, l'électronique, la médecine, l'agro-alimentaire, l'aéronautique, l'automobile, la construction ou encore la cosmétique.
Mais selon un rapport** de Friends of the Earth (Amis de la Terre Europe), alors que les connaissances en termes de toxicité des nanos sont on ne peut plus faibles, 104 produits agricoles et alimentaires contenant des nanomatériaux, ou fabriqués par nanotechnologie, sont d'ores et déjà en vente actuellement dans l'Union européenne Plusieurs centaines de ces produits seraient également vendus dans le monde entier. Des produits nanométriques non testés et potentiellement dangereux peuvent être trouvés, partout en Europe, dans les aliments, les emballages alimentaires et d'autres produits des rayons de supermarchés, affirme l'ONG dans un communiqué.
Selon les Amis de la Terre, elles seraient en effet utilisées pour la fabrication de compléments nutritifs, de films plastiques alimentaires, d'emballages, de récipients, d'outils de cuisine antibactériens, mais aussi pour la transformation de la viande.
Parmi les grandes entreprises qui ont des programmes de recherche et de développement des nanotechnologies, le rapport cite la plupart des grands groupes de l'industrie agroalimentaires et notamment Kraft Foods, Heinz, Nestlé, Danone, Basf, Bayer, Campbell soup, Cadbury Shweppes, Nestlé, PepsiCo et Unilever. Il est choquant que les citoyens européens puissent être exposés à des produits potentiellement toxiques, présents dans les aliments ou les emballages alimentaires sans qu'aucune réglementation n'assure leur sécurité, dénonce Helen Holder des Amis de la Terre-Europe. Comme pour les OGM, on commercialise d'abord et on fera les études après, l'intérêt des industriels passe avant la protection des citoyens et de l'environnement, regrette quant à elle Christian Berdot des Amis de la Terre-France.
Soulignant que les règlements et les lois sont actuellement totalement inadaptés aux propriétés particulières des nanomatériaux, l'ONG demande à ce que les responsables politiques de l'Union européenne mettent en place une législation complète et réellementbasée sur le principe de précaution.
Les Amis de la Terre semblent avoir été entendus puisque suite à la publication de ce rapport, la Commission européenne s'est engagée mercredi à légiférer sur le recours aux nanotechnologies par l'industrie agroalimentaire pour fabriquer des colorants et des additifs nutritionnels, si ces derniers présentaient un risque pour la santé humaine. Nous allons mener une analyse et sur la base de ses résultats, la Commission décidera s'il faut légiférer, a déclaré la porte-parole de Stavros Dimas, commissaire européen à l'Environnement. Cette analyse devrait être terminée en mai ou en juin.
* US National Science Foundation
**Après leur rapport sur les nanotechnologies dans les produits cosmétiques, les Amis de la Terre / Friends of the Earth viennent de publier un nouveau un rapport, cette fois sur les produits nanotechnologiques dans l'alimentation et l'agriculture dénommé : Du Labo, dans nos assiettes : les nanotechnologies dans l'alimentation et l'agriculture.
Article publié le 14 mars 2008