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Label ISR : une proposition de refonte sur le bureau de Bruno Le Maire

Levier au service de l'industrie verte, notamment, le label ISR a besoin de gagner en crédibilité pour convaincre les épargnants en quête de placements financiers responsables. Le comité dédié à sa refonte vient de livrer ses propositions.

Gouvernance  |    |  N. Gorbatko
Label ISR : une proposition de refonte sur le bureau de Bruno Le Maire
Actu-Environnement le Mensuel N°439
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Rendre le label ISR plus exigeant pour les sociétés responsables de la gestion des fonds, plus lisible pour les épargnants et plus efficace dans son soutien à l'économie durable : c'est l'ambition affichée par le comité chargé de la révision de ce standard, formé depuis 2021 autour de treize experts en développement durable, en finance, en comptabilité ou en règlementation européenne. Le Gouvernement, propriétaire de ce label destiné à mettre en valeur les placements financiers responsables sur le plan environnemental, social et de gouvernance (ESG), avait demandé à cette équipe de remédier au principal défaut de l'outil : s'appuyer sur un référentiel plus axé sur les processus de gestion des fonds que sur le contenu même de ces fonds.

« Le label ISR fait à l'épargnant une promesse confuse, avait en effet souligné l'Inspection générale des finances, dans un rapport de décembre 2020. Il affiche une ambition d'impact social et environnemental mais ses exigences, fondées sur la notation ESG des émetteurs, ne sauraient garantir un fléchage effectif des financements vers des activités relevant d'un modèle économique durable. Cette situation (…) expose le dispositif et ses parties prenantes à un risque de réputation. »

Un niveau d'exigence revu à la hausse

Après dix-huit mois de gestation et de consultation des parties prenantes, le comité a envoyé sa copie au ministère de l'Économie, le 18 juillet dernier. Cette version « profondément remaniée » conserve l'approche généraliste (E, S et G) du label, conformément aux souhaits de l'Inspection générale des finances, mais son niveau d'exigence a été réévalué. Ainsi, le nouveau référentiel prévoit désormais l'exclusion de certaines activités, comme le charbon, les fossiles non conventionnels ou les armements controversés, et de certaines pratiques, telles que l'absence de respect des droits humains ou le financement du terrorisme. En matière de production d'électricité, des règles ont aussi été élaborées limitant les possibilités d'émissions de gaz à effet de serre des entreprises visées.

Dans le cadre de l'approche best in class comme dans celle de l'amélioration des notes, toutes deux envisageables, le taux de sélectivité destiné à écarter les émetteurs les moins performants passera de 20 à 30 %. Afin qu'aucun des émetteurs ne fasse l'impasse sur l'un des volets, E, S ou G, leurs notations devront prendre en compte chacun de ces trois domaines, à hauteur de 20 % au minimum. Enfin, les dispositions concernant la gestion des controverses (scandales, rumeurs...), ainsi que les politiques d'engagement actionnarial et de vote des entreprises ont été clarifiées et rendues plus contraignantes. « À chaque fois, nous avons essayé d'homogénéiser les démarches de manière à ce que les certificateurs aient les moyens d'interroger et de faire des réserves, d'avoir des points d'appui pour discuter avec les gestionnaires de fonds », a expliqué Michèle Pappalardo, présidente du Comité, lors d'un webinaire de présentation organisé le 20 avril dernier.

La double matérialité intégrée

Autre évolution importante : la prise en compte systématique de la « double matérialité ». Autrement dit, l'ajout, au traditionnel effet financier des enjeux ESG sur les portefeuilles concernés, des incidences négatives des investissements sur l'environnement, le social et la gouvernance. De quoi « garantir la cohérence entre la stratégie, les objectifs et les indicateurs ESG », analyse Michèle Pappalardo. Le label se réfèrera pour cela aux outils de la règlementation européenne comme la Sustainable Finance Disclosure Regulation (SFDR) ou la Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD). Afin de prouver que leur stratégie est bien définie et bien mise en œuvre, les émetteurs des fonds devront par ailleurs s'engager à obtenir une meilleure performance que ceux de leur univers d'investissement sur deux indicateurs de leur choix, les plus en phase avec leurs objectifs ESG.

Enfin, le comité a décidé d'intégrer encore plus nettement la dimension climatique dans le socle du label, via une vigilance renforcée pour les émetteurs des secteurs à forts enjeux sur cette thématique, comme ceux de la production ou de la vente d'énergie. Ces derniers devront être en mesure de présenter un plan de transition à moyen et long termes cohérent avec l'Accord de Paris, crédible en termes de trajectoire, de moyens et de gouvernance. En fonction de la taille des entreprises, un calendrier progressif leur sera proposé, globalement calé sur celui de la CSRD.

Pas de gradation pour le moment

De gros changements qui ne font pas pour autant l'unanimité. Pour Grégoire Cousté, délégué général du Forum pour l'investissement responsable (FIR), l'ajout d'un socle climatique ou l'ouverture vers d'autres classes d'actifs constituent des évolutions positives. Mais celui-ci regrette la prédominance de l'approche best in class qu'il considère comme un biais méthodologique. « Le niveau d'exigence a certes été cranté par le passage de 20 % à 30 % du taux de sélectivité, mais quel est le sens de cette mesure quand il s'agit de fonds dédiés aux énergies renouvelables, par exemple, qui auraient en outre une politique sociale de qualité ? On peut comprendre la volonté de continuité, mais il n'y a pas eu vraiment de tabula rasa, constate-t-il. Nos recommandations principales n'ont pas été prises en compte. À commencer par la gradation qui aurait été possible avec un millier de fonds labellisés. »

Cette mise en place de niveaux, d'ailleurs recommandée par l'Inspection générale des finances, afin de « mettre davantage en valeur les meilleures performances » n'a toutefois pas été complètement écartée par le comité. « Nous y reviendrons le plus vite possible », a promis Michèle Pappalardo.

Bientôt une version définitive

Le FIR déplore aussi que le nouveau cahier des charges n'ait pas été construit en fonction des attentes réelles des épargnants, prompts à soupçonner des pratiques de greenwashing, mais seulement entre professionnels, en fonction des pratiques du marché. « Le label est un outil extrêmement important pour le grand public qui doit avoir confiance dans les garanties apportées. Il ne s'attend pas à trouver de l'armement ou du pétrole dans des fonds responsables, souligne Grégoire Cousté. À l'occasion de cette refonte, il aurait été utile d'interroger les épargnants. Si des investisseurs professionnels peuvent pousser l'approche best in class, c'est moins évident pour les particuliers. Il faut en tenir compte dans le design des produits qui leurs sont proposés en favorisant plutôt les approches thématiques avec une orientation claire : santé, renouvelables, solidarités... Impliqué depuis sa création dans la promotion du label, le FIR s'est momentanément mis en retrait du sous-comité chargé de cette thématique.

Les choses pourront cependant évoluer après l'étude de la proposition par le ministère de l'Économie qui devrait se prononcer en septembre. Ce dernier compte sur le label pour flécher plus largement l'épargne des Français vers l'économie durable et plus spécifiquement vers l'industrie verte. Le sujet s'avère donc particulièrement sensible pour lui. Le label ISR est l'un des premiers en Europe spécialisé dans la finance responsable. Avec plus de 1 200 fonds labellisés, il affiche un encours de plus de 750 milliards d'euros.

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