Ce mercredi 2 mars, Greenpeace France, Les Amis de la Terre France et Notre Affaire à tous, accompagnées de l'association ClientEarth, ont déposé un recours devant le tribunal judiciaire de Paris contre TotalEnergies et sa filiale, TotalEnergies Électricité et Gaz France, pour pratiques commerciales trompeuses. Les trois ONG (1) ont adressé à l'énergéticien une assignation à comparaître le 28 juin 2022.
Ne pas induire le public en erreur
La mise en cause porte sur l'affichage de son « rôle majeur dans la transition », son ambition d'atteindre la neutralité carbone en 2050, mais également sur une qualification jugée trompeuse du gaz fossile (« la moins émettrice de gaz à effet de serre » des énergies fossiles) et des agrocarburants (promus comme « des alternatives bas carbone ») que le groupe commercialise. « Cette communication contient des allégations environnementales fausses ou de nature à induire le consommateur en erreur sur les propriétés environ-nementales des produits du groupe et sur la portée de ses engagements environnementaux, ainsi que des omissions d'informations essentielles à la compréhension du consommateur qui sont susceptibles d'altérer substantiellement son comportement économique », avancent les associations.
L'interdiction des publicités des énergies fossiles
Un projet de décret, interdisant la publicité des énergies fossiles en application de la loi Climat, est en consultation jusqu'au 18 mars prochain. Il vise les produits énergétiques pétroliers, le gaz naturel d'origine fossile, les énergies issues de la combustion du charbon minier ainsi que l'hydrogène carboné, contenant moins de 50 % d'énergie décarbonée. Les produits issus de la pétrochimie, comme les bitumes, ne sont pas concernés. De plus, s'agissant du gaz, le décret propose d'exempter de l'interdiction de publicité les offres de fourniture de gaz jusqu'au 30 juin 2023, veille de l'arrêt des tarifs réglementés de vente de gaz.
Les arguments du bilan de Total
De son côté, l'énergéticien français soutient qu'il est « faux de prétendre que (sa) stratégie serait du "greenwashing" » et apporte de nombreux arguments en ce sens. « TotalEnergies met sa stratégie en œuvre de manière concrète et est en ligne avec les objectifs que la compagnie s'est fixée pour atteindre la neutralité carbone en 2050, ensemble avec la société. » Concrètement, il affirme exploiter l'équivalent de 10 gigawatts d'énergies renouvelables à travers le monde et viser une multiplication par dix en 2030.
Concernant son bilan carbone, TotalEnergies revendique une réduction des émissions directes de ses opérations industrielles (dites de « scope 1 + 2 ») de 20 % depuis 2015. Néanmoins, dans une analyse publiée par Greenpeace (2) , les trois associations soulignent que le groupe ne mentionne pas les émissions indirectes générées par les produits consommés par ses clients (de « scope 3 »), lesquelles représenteraient entre 85 et 90 % de son bilan total. Le groupe rétorque être « sur une trajectoire de baisse au niveau mondial », s'agissant de ce type d'émissions, malgré des ventes en hausse, « ce qui est rendu possible par une baisse de l'intensité carbone des produits vendus ».
TotalEnergies n'a cependant pas statué sur le caractère de sa communication, considérée comme mensongère. Et le nerf de l'affaire, pour les associations, concerne justement les allégations publicitaires environnementales elles-mêmes. Pour Clara Gonzales, juriste à Greenpeace France, « le droit de la consommation impose une communication honnête et fiable en matière climatique et environnementale pour protéger les consommateurs ».