Cette annonce a été faite à l'occasion d'une visite du Président sur le site ArcelorMittal du Creusot en Bourgogne. La veille, Anne Lauvergeon, Présidente du Directoire d'AREVA et Aditya Mittal, Directeur financier d'ArcelorMittal, signaient un protocole d'accord pour augmenter la production de pièces dédiées au marché nucléaire. AREVA prévoit ainsi de faire fabriquer 100% des pièces nécessaires à la fabrication d'un EPR sur le site du Creusot.
L'ère du pétrole bon marché, c'est fini. Le nucléaire est plus que jamais une industrie d'avenir et une énergie indispensable, a déclaré Nicolas Sarkozy. Chaque EPR fait économiser 2 milliards de m3 de gaz par an quand il remplace une centrale à gaz et onze millions de tonnes de CO2 par an quand il remplace une centrale à charbon, a-t-il fait valoir.
Pour les associations de protection de l'environnement, cette décision fait l'effet d'un coup de massue. Cette annonce franco-française interroge sur le sens que compte donner le Chef de l'Etat à sa présidence de l'Union européenne. Faut-il en déduire que la politique européenne de l'énergie qui passe par le développement des énergies renouvelables ne s'appliquerait pas à la France ?, s'interroge Agir pour l'environnement qui qualifie cette construction d'idée saugrenue.
Pour les Verts, ce projet est un gâchis financier : les 3 milliards d'euros prévus pour sa construction seraient autrement plus intelligemment dépensés s'ils l'étaient dans les domaines des économies d'énergie et des énergies renouvelables, créateurs de 11 à 15 fois plus d'emplois, rappelle le parti écologiste.
Greenpeace condamne également fortement ce projet : cette décision est aberrante et stupide, estime Yannick Jadot, responsable des campagnes de Greenpeace. La présidence française de l'Europe commence à peine, le lobby nucléaire est de nouveau aux manettes et le Président français, totalement disqualifié, ajoute-t-il.
France Nature Environnement, qui avait formé, devant le Conseil d'Etat, un recours contre l'autorisation de créer un premier EPR à Flamanville déplore cette décision et la considère comme une provocation.
Enfin, pour le Réseau Sortir du Nucléaire, qui appelle à la manifestation, les flops de l'EPR en Finlande et à Flamanville suffisent à condamner ce réacteur.
L'EPR de l'anglais European Pressurized Reactor est un réacteur nucléaire de 3ème génération d'une capacité de 1.650 MW et conçu pour une durée de vie de 60 ans. Inscrit dans la loi d'orientation sur l'énergie adoptée le 13 juillet 2005, l'EPR est un projet franco-allemand développé depuis 1992 par Siemens et Areva et destiné à prendre le relais des 58 réacteurs qui équipent actuellement les 19 centrales nucléaires françaises. Selon ses concepteurs, l'EPR permet une meilleure utilisation du combustible, une démultiplication des systèmes de sûreté et une moindre production de déchets. Deux exemplaires sont en cours de construction dans le monde : un en Finlande et un en France à Flamanville. Ils entreront en fonction à partir de 2011 et 2012.
Pour l'instant rien n'a été précisé concernant l'emplacement, la date de mise en route et surtout le nom de l'exploitant de ce prochain EPR. L'énergéticien EDF s'est réjoui de l'annonce et s'est dit prêt à s'engager dans ce projet : le développement de nouveaux moyens de production est une priorité pour le groupe EDF qui, dans le cadre de la relance de ses investissements, mettra en service plus de 6.000 MW d'ici 2012, rappelle Pierre Gadonneix, Président Directeur Général du groupe. Le groupe Suez est également sur les rangs.
Cette annonce française intervient au moment où la Commission européenne publie les derniers résultats de l'enquête Eurobaromètre sur les déchets radioactifs. Déjà menée en 1998, 2001 et 2005, cette enquête examine les attitudes des citoyens européens envers les déchets radioactifs et la sûreté de leur gestion dans le contexte de l'énergie nucléaire ainsi que leurs connaissances dans ce domaine. Elle révèle que les déchets radioactifs demeurent une question centrale pour l'acceptation de l'énergie nucléaire. Quatre opposants sur dix se disent même prêts à changer d'avis s'il existait une solution sûre et définitive pour la gestion des déchets radioactifs.
Selon l'enquête de 2008, le soutien à l'énergie nucléaire s'est accru dans l'Union européenne depuis 2005. Il est plus fort dans les pays dotés d'installations électronucléaires opérationnelles et dans ceux où la population se considère bien informée des questions liées aux déchets radioactifs.