Tandis qu'eurodéputés et États membres continuent de négocier les réformes du système d'échange de quotas carbone (ETS ou SEQE), un rapport (1) de l'antenne européenne du Fonds mondial pour la nature (WWF Europe) dresse un bilan des revenus générés par ce marché. L'ONG a étudié la comptabilité publiée par les Vingt-Sept et les informations rapportées par l'Agence européenne pour l'environnement (EEA).
Selon les conclusions du rapport paru le 29 novembre, la vente de quotas carbone aux entreprises polluantes ciblées par l'ETS (l'industrie lourde et les fournisseurs d'énergie) a généré, au total, entre 2013 et 2021, 88,5 milliards d'euros. En comparaison, les quotas gratuits délivrés pour inciter les industriels à réduire leurs émissions ont coûté 98,5 milliards à l'Europe sur la même période. Cette dépense aurait concerné, par ailleurs, 53 % des émissions couvertes par l'ETS. Ce phénomène du « pollueur qui ne paie pas », que dénonce WWF Europe, abaisse de fait le prix réel de la tonne de dioxyde de carbone (CO2) en Union européenne : de 14 à 6,60 euros, en moyenne entre 2013 et 2021 (contre 76 euros pour le prix fixé en octobre 2022). Le Parlement européen et les ministres européens de l'Environnement se sont néanmoins déjà mis d'accord sur la suppression progressive des quotas gratuits d'ici à 2035.
Sans compter sur le fait que « l'information fournie sur les dépenses réalisées à partir des revenus de l'ETS, si tant est qu'elle soit disponible, comporte souvent de nombreuses erreurs et incohérences », souligne le principal auteur du rapport, Romain Laugier. La France, par exemple, aurait attribué, en 2021, la somme d'un milliard d'euros à des « dépenses climatiques », avant de « simplement la transférer au budget de l'État ».