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Actu-Environnement

Nitrates : le recours contre le programme national d'actions rejeté par le Conseil d'Etat

Par un arrêt du 3 avril, le Conseil d'Etat a rejeté la requête de France Nature Environnement et Eau et rivières de Bretagne visant à l'annulation du programme national de protection des eaux contre les pollutions par les nitrates d'origine agricole.

Agroécologie  |    |  P. Bouchez

Les requérantes demandaient l'annulation pour excès de pouvoir du décret du 10 octobre 2011 relatif aux programmes d'actions national à mettre en œuvre en vue de la protection des eaux contre la pollution par les nitrates d'origine agricole. Elles visaient plus précisément l'annulation pour excès de pouvoir du 5°de l'article R. 211-81 et de l'article R. 211-81-5 du code de l'environnement, tous deux issus de ce décret.

Ce contentieux illustre les difficultés de la France à concilier intérêts économiques et intérêts environnementaux concernant la problématique de la pollution aux nitrates, qui a déjà poussé la Cour de justice de l'Union européenne à la condamner pour la non-inscription de certaines zones vulnérables contenant des teneurs en nitrates excessives.

La limitation à 170 kg d'azote par hectare et par an est-elle garantie par le décret ?

Le décret prévoit en effet la mise en place d'un programme d'actions national comprenant la "limitation de la quantité maximale d'azote contenue dans les effluents d'élevage pouvant être épandue annuellement par exploitation, y compris les déjections des animaux eux-mêmes, ainsi que les modalités de calcul associées".

C'est précisément la modification des modalités de calcul de la quantité d'azote pouvant être épandue qui posait problème aux associations. Jusque là, la quantité d'azote ne pouvait excéder 170 kg par hectare de surface agricole utile, déduction faite des surfaces où l'épandage était interdit. La déduction de ces surfaces a été supprimée par le décret, ce qui, selon les associations, affaiblit le dispositif de lutte contre la pollution des eaux.

Le Conseil d'Etat rejette cette argumentation, observant que la directive "nitrates" prévoit seulement que "la quantité d'effluents d'élevage épandue annuellement, y compris par les animaux eux-mêmes, ne dépasse pas une quantité donnée par hectare. Cette quantité donnée par hectare correspond à la quantité d'effluents contenant 170 kilogrammes d'azote". Les juges observent qu'il n'est fait à aucun moment référence aux zones où l'épandage est interdit, et en concluent à la conformité du décret à la directive.

En tout état de cause, cette modification permettant un épandage plus important que précédemment privilégie le soutien aux éleveurs.

Le principe d'équilibre de la fertilisation à la parcelle mis en cause par les associations

Les associations soutenaient également que le principe d'équilibre de la fertilisation à la parcelle posé par le 3° de l'article R. 211-81 du code de l'environnement ne respectait ni la directive "nitrates", ni le principe de gestion durable et équilibrée de l'article L. 211-1 du code de l'environnement. Selon elles, la mise en œuvre de ce principe affaiblissait la lutte contre la pollution des eaux, en raison de son "caractère complexe et difficilement contrôlable".

Toutefois, le Conseil d'Etat a écarté cette prétention. Selon lui, "les requérantes [se sont bornées] à se prévaloir des réserves émises par l'Autorité environnementale dans son avis du 12 octobre 2011, postérieur au décret attaqué, sur le projet d'arrêté définissant le contenu même du programme national d'actions, qui sont en tout état de cause sans incidence sur la légalité du décret attaqué".

Les juges ont ajouté que, le principe de fertilisation équilibrée figurant dans la directive, le décret n'avait pas pour objet de définir les mesures que doit comporter le plan national d'actions.

Le Conseil d'Etat n'a donc pas tenu compte des conclusions de Juliane Kokott, avocat général de la CJUE, qui a demandé le 16 janvier 2014 la condamnation de la France pour mauvaise transposition de la directive nitrates. "La Commission reproche à la réglementation française de répéter [les principes énoncés par la directive nitrates] sans les transformer en dispositions directement applicables" a-t-elle indiqué.

Admettre les dérogations exceptionnelles en cas de "situation exceptionnelle?

Les associations faisaient grief au décret de permettre au préfet de département de déroger temporairement aux mesures prévues par l'article R. 211-81-5 du code de l'environnement en cas de "situations exceptionnelles, en particulier climatiques". Selon elles, cette possibilité laissée au préfet ne permettait pas de circonscrire avec une précision suffisante les cas dans lesquels des dérogations peuvent être mises en œuvre.

Le Conseil d'Etat a pourtant considéré que "la référence à des «situations exceptionnelles, en particulier climatiques», dans lesquelles les autorités administratives pourraient se trouver dans l'obligation de prendre les mesures qu'impose la protection de l'ordre public et de la santé publique" permettait de délimiter les possibilités de dérogation.

"Aucun principe ni aucune disposition ne font obstacle à ce que le pouvoir de déroger, pour une durée et un nombre de mesures limités, aux programmes d'actions soit confié au préfet de département", ont indiqué les juges.

Les requérantes cherchaient également à faire valoir le fait que ces mesures d'urgence ne tenaient pas compte du principe de participation du public. Les juges ont écarté cette argumentation, constatant que l'article L. 120-1 du code de l'environnement prévoyait, dans sa version en vigueur à la date du décret attaqué, l'exemption de l'obligation de participation du public en cas d'"urgence justifiée par la protection de l'environnement, de la santé publique ou de l'ordre public".

A noter que le principe de participation étant défini à l'article 7 de la Charte de l'environnement et repris à l'article L. 120-1 du code de l'environnement, le Conseil d'Etat a précisé que "les requérantes ne peuvent utilement contester, autrement que par la voie d'une question prioritaire de constitutionnalité, les modalités ainsi prévues par le législateur".

Réactions7 réactions à cet article

Une sage décision qui montre que ce militantisme associatif d'un autre temps ne parvient plus à convaincre le pouvoir judiciaire par la simple image d'épinal d'un Etat mou, complice de la pollution agricole.
Annuler le décret nitrate aurait eu un effet équivalent à marquer un but contre son camp. Le retour au 4è programme d'action aurait marqué un recul certain en matière d'agronomie.
Faisons confiance à la nouvelle génération d'agriculteurs pour parachever les efforts en faveur de la protection des eaux.

agronaute | 10 avril 2014 à 09h54 Signaler un contenu inapproprié

"Faisons confiance à la nouvelle génération d'agriculteurs pour parachever les efforts en faveur de la protection des eaux."
C'est le premier avril ma parole!! comment faire confiance a des gens qui sont les premiers pollueurs de la Bretagne et qui refusent toutes remises en causes de leur pratiques, voir qui ne reconnaissent même pas les conséquences de ces pratiques!!
Jeunes ou vieux même combat aucune remise en question on poursuit avec le même modèle productiviste qui a fait ses preuves en matière de destruction de l'environnement.
Décidément les Bretons n'ont pas de chance

lio | 10 avril 2014 à 11h30 Signaler un contenu inapproprié

"parachever les efforts en faveur de la protection des eaux"
je pense qu'il voulait dire "achever" ...

aléa | 10 avril 2014 à 13h43 Signaler un contenu inapproprié

Petit rappel: Les agriculteurs n'ont pas pour objectif de détruire la planète et il me semble que cette profession mérite le respect et ne doit pas être constamment l'objet d'anathèmes gratuits. Je soutiens agronaute dans sa confiance et je soutiens mon administration pour surveiller et punir les délinquants, tous les délinquants.

Albatros | 10 avril 2014 à 15h53 Signaler un contenu inapproprié

On dirait bien que les agriculteurs bretons ont pour mission de pourrir
l'eau de la Bretagne avec la bénédiction du Conseil d'Etat.

Maryvonne | 11 avril 2014 à 18h30 Signaler un contenu inapproprié

Lio
Le totalitarisme systématiquement négatif de vos propos vis à vis du monde agricole (Pourtant PREMIER responsable des améliorations des conditions de vie de tous, ces 100 dernières années) vous caractérise en fait très bien et place où il se doit l'intérêt de vos interventions.(même pas lio, encore plus bas..)

D'accord avec agronaute et albatros à 200%

Phrase d’Alain Duhamel sur RTL après l’annonce de « la non présence » des verts au sein du nouveau gouvernement :
« C’est une bonne chose ; L’écologie est une chose trop importante pour que l’on laisse ce sujet entre les mains des verts »
Je le trouvais déjà intéressant à écouter avant….

yannquirigole | 13 avril 2014 à 13h00 Signaler un contenu inapproprié

Duhamel reprend une citation de Clemenceau: "la guerre est une chose trop sérieuse pour la laisser aux militaires".
La transposition à l'écologie est parfaitement pertinente et on peut même l'extrapoler à la santé à ne pas laisser aux médecins-pharmaciens, à l'enseignement à ne pas laisser aux profs, etc.
Non, l'environnement n'appartient pas aux écolos et l'écologie non plus, tout comme le thème de l'immigration n'appartient pas au FN.

Albatros | 14 avril 2014 à 16h36 Signaler un contenu inapproprié

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