Onze responsables politiques européens, originaires de neuf pays différents, se sont prêtés au test proposé par le Bureau européen de l'environnement (BEE), fédération européenne d'associations environnementales, et l'ONG suédoise ChemSec. Ces responsables, parmi lesquels la vice-présidente de la Commission européenne Margrethe Vestager et le commissaire européen chargé de l'Environnement Virginijus Sinkevičius, ont accepté de faire analyser leur sang, à la recherche de treize substances per- et polyfluoroalkyles (PFAS).
Le résultat se révèle inquiétant puisque toutes les personnes testées sont contaminées. « Plus de la moitié des treize "produits chimiques éternels" analysés ont été trouvés, à savoir le PFOA, le PFNA, le PFDA, le PFUnDA, le PFHxS, le PFHpS et le PFOS. Dans certains cas, les niveaux d'exposition dépassaient les seuils de préoccupation existants », révèlent les ONG. Les PFAS ont été mesurés dans une plage allant de 3,24 à 24,66 µg/L, sachant que le niveau de référence établi par les scientifiques est de 2 μg/L pour les PFOA, 5 2 μg/L pour les PFOS, et de 6,9 μg/L pour la somme PFOA/PFNA/PFHxS/PFOS. « Ces niveaux ne diffèrent toutefois pas significativement de l'exposition moyenne des Européens », indiquent les ONG.
Les PFAS sont à l'origine de graves problèmes de santé, comme le cancer, l'infertilité, les malformations congénitales et les perturbations du système immunitaire, rappellent ces dernières. Certaines des substances retrouvées dans le sang des responsables politiques, ajoutent-elles, sont déjà interdites en Europe (PFOA, PFOS), l'utilisation de certaines autres est réglementée (PFNA, PFDA, PFUnDA et PFHxS), tandis que le PFHpS est toujours autorisé sur le marché de l'UE. « La production, l'utilisation et les émissions continues de PFAS par l'industrie chimique européenne, avec une connaissance (cachée) de leurs risques pour la santé depuis des décennies, souligne l'insuffisance des mesures réglementaires actuelles », dénoncent les ONG.
Alors que la contamination ne se limite pas aux zones très polluées telles que la Vallée de la chimie au sud de Lyon, les associations dénoncent « les pressions industrielles et politiques » qui ont conduit la Commission européenne à bloquer la réforme du règlement Reach. « La seule façon de gérer cette crise est de réglementer ces produits chimiques en tant que groupe, ce qui devrait se produire avec la proposition actuelle de restriction de l'UE. Heureusement, il existe déjà des alternatives plus sûres pour la plupart des utilisations des PFAS. Il s'agit simplement de leur donner une opportunité », estime Anne-Sofie Bäckar, directrice exécutive de ChemSec.