Robots
Cookies

Préférences Cookies

Nous utilisons des cookies sur notre site. Certains sont essentiels, d'autres nous aident à améliorer le service rendu.
En savoir plus  ›
Actu-Environnement

Vers une nouvelle réforme du DPE pour les petites surfaces

Le Gouvernement réfléchit à une modification du calcul du diagnostic de performance énergétique (DPE) actuel qui pénalise les logements de petite surface. L'outil est aussi décrié pour les logements anciens et ceux chauffés à l'électricité.

Bâtiment  |    |  R. Boughriet
Vers une nouvelle réforme du DPE pour les petites surfaces

Après l'interdiction de louer les logements passoires thermiques, les yeux sont tournés vers le diagnostic de performance énergétique (DPE), réformé en juillet 2021. À la transaction, que ce soit à la signature d'un bail ou à celle d'un acte de vente, la classe énergétique du bien doit être fournie à l'aide d'un DPE. Or, la pression augmente, notamment pour les propriétaires bailleurs, avec l'entrée en vigueur, en janvier 2025, de l'interdiction de louer tous les logements classés G, les plus énergivores, ce qui les contraint à rénover. Depuis janvier 2023, les logements étiquetés G+ et consommant plus de 450 kWh/m2 par an d'énergie finale, sont déjà exclus du marché locatif (pour un nouveau bail). Puis ce sera autour des logements classés F en 2028, puis E en 2034.

Les conséquences d'un classement erroné pourraient ainsi s'avérer préjudiciables pour la bonne marche des transactions et tendre un peu plus le marché locatif, qui s'est grippé ces derniers mois. Et pour éviter une pénurie importante de logements causée par de « mauvais » DPE, le ministre de l'Économie, Bruno Le Maire, a plaidé pour une nouvelle refonte du DPE, le 9 octobre dernier sur Sud Radio. Car la méthodologie actuelle de cet outil « favorise le chauffage au gaz plutôt que le chauffage électrique » et « pénalise les petites surfaces qui sont demandées par les étudiants », a-t-il pointé.

« Nous devons chercher à améliorer le dispositif du DPE quand il s'applique aux petites surfaces car, j'en conviens, il y a un problème », a aussi reconnu le ministre du Logement, Patrice Vergriete, auditionné par la commission des finances du Sénat, le 31 octobre 2023, dans le cadre du projet de loi de finances (PLF 2024).

Coefficient de pondération pour les petites surfaces

Selon la Fédération interprofessionnelle du diagnostic immobilier (Fidi) et la Chambre des diagnostiqueurs immobiliers de la Fnaim (CDI Fnaim), la part de passoires thermiques classées F ou G du DPE serait, en effet, « plus importante pour les logements de moins de 30 m² », avaient-elles prévenu en mai dernier. Et d'alerter sur l'impact de certains ballons d'eau chaude sur l'étiquette finale des logements de petite surface.

« Rapportée au nombre de mètres carrés, la surface déperditive des ponts thermiques d'un petit logement est supérieure à celle d'un grand logement », explique Jean-Christophe Protais, président du Syndicat interprofessionnel du diagnostic immobilier (Sidiane). De même, les équipements installés, dans une petite surface, de chauffage et de production d'eau chaude sanitaire « sont souvent surdimensionnés par rapport au besoin réel, et donc consommeront plus. Néanmoins, l'étiquette que calcule le DPE représente la réalité, même si cela pénalise le propriétaire », ajoute-t-il.

En outre, « que vous habitiez dans un studio ou dans une maison individuelle, vous avez les mêmes besoins d'eau chaude fournis par un ballon électrique et on vous sanctionne parce que vous vivez dans un appartement, ce n'est pas recevable », épingle aussi Thierry Marchand, diagnostiqueur indépendant et ancien président de la CDI Fnaim.

“ Les diagnostiqueurs devront être plus précis pour calculer la résistance thermique des murs, en tenant compte de la nature des matériaux ” Thierry Marchand, diagnostiqueur indépendant
Par conséquent, face aux constats des professionnels, le ministère du Logement mène actuellement des travaux pour corriger la méthode de calcul du DPE et envisage d'appliquer un coefficient de pondération en fonction de la surface du logement. « Il faudrait adopter des seuils de consommation énergétique et d'émissions de gaz à effet de serre différents pour les logements de petites surfaces, comme pour les logements en altitude, en ne tenant compte que des impacts de la consommation d'eau chaude sanitaire. On pourrait aussi imaginer une adaptation des seuils en fonction des zones climatiques. Les surfaces de moins 40 m2 devraient être prises en compte dans un nouveau décret ou arrêté, pour que le dispositif du DPE soit lissé », suggère M. Marchand. Il souhaite aussi que ce texte soit publié avant l'obligation d'audit énergétique, en 2025, des logements classés E pour les propriétaires de maisons individuelles et les monopropriétés, ou encore l'extension du DPE envisagée par le Gouvernement aux logements saisonniers.

Selon Les Échos, le débat sur les petites surfaces devrait finalement être tranché, par l'exécutif, début 2024.

Quid des logements anciens aussi pénalisés ?

La CDI Fnaim juge aussi qu'il faudrait modifier le calcul du DPE pour l'adapter aux logements anciens construits avant 1948, qui comptent « injustement » une grande part de passoires thermiques. Des changements pour ce type de bâti pourraient être apportés « pour une meilleure prise en compte des espaces tampons, de la réalité des ponts thermiques, du confort d'été ainsi que pour des isolants bio-sourcés et géo-sourcés, comme le torchis des murs ou les toitures de chaume, les enduits isolants… », réclament Yannick Ainouche, président de la CDI Fnaim, et Martin Malvy, président de Sites et cités remarquables de France.

Ce constat n'est que partiellement partagé par Jean-Christophe Protais : « Les logements anciens, en particulier le parc haussmannien, de par leur conception antérieure aux normes d'efficacité énergétique actuelles, ont souvent une isolation thermique insuffisante et des systèmes de chauffage obsolètes, contribuant à une consommation énergétique élevée. La réalisation du DPE sur ces bâtiments est plus complexe du fait que les informations ne sont pas toujours disponibles. Néanmoins, s'il est sérieusement réalisé, il apporte une information utile au propriétaire. »

Quant au ministère, il semble qu'il préfère miser sur la montée en compétences des diagnostiqueurs, selon Thierry Marchand. « Il est nécessaire que les diagnostiqueurs intègrent ce type de bâti dans leurs cycles de formation. Ils devront être plus précis pour calculer la résistance thermique des murs, en tenant compte de la nature des matériaux, comme la pierre. »

Le Sénat s'attaque au DPE des logements chauffés à l'électricité

Par ailleurs, les sénateurs Sylviane Noël et Cyril Pellevat (groupe Les Républicains) ont de leur côté déposé, le 11 octobre, une proposition de loi (1) visant à réformer les modalités de prise en compte de l'électricité dans les DPE. « Dans le calcul du DPE, on prend en compte l'énergie primaire, ce qui pénalise gravement les logements anciens chauffés à l'électricité », dénonce Sylviane Noël. Elle propose donc de remplacer le coefficient de conversion entre l'énergie primaire et l'énergie finale électrique, aujourd'hui fixé à 2,3, par un facteur de 1 (à l'instar du coefficient appliqué au gaz naturel et au bois).

Ce coefficient permet de mesurer les pertes liées à la transformation de l'énergie primaire (celle que l'on trouve dans la nature : l'uranium, le charbon, le pétrole, le bois, le gaz…) et l'énergie finale, c'est-à-dire celle qui est livrée, consommée et facturée au consommateur.

Toutefois, Thierry Marchand et Jean-Christophe Protais sont opposés à cette proposition de loi. « Si l'on fixe un coefficient de conversion de 1, on va automatiquement sortir des biens du statut de passoires thermiques, alors qu'ils sont réellement énergivores, et le coût des consommations énergétiques des occupants sera très cher, donc ce n'est pas une bonne idée », critique Thierry Marchand. En outre, poursuit l'expert, « si on change ce coefficient pour le DPE, il faudra le changer aussi pour la réglementation environnementale RE 2020 des bâtiments neufs ».

De son côté, Jean-Christophe Protais rappelle que « des pertes très importantes sont liées au transport de l'électricité par effet joule. Le coefficient de conversion qui avait été calculé scientifiquement était de 2,58, puis abaissé à 2,30 dans le DPE de 2021 pour satisfaire le lobby électrique, qui ne s'est jamais arrêté ». Il ajoute que les pompes à chaleur, les nouveaux convecteurs électriques à accumulation ou à ventilation « consomment beaucoup moins d'électricité que les grille-pain qu'on a connus dans les années 1980-1990. Donc c'est un sujet qui est purement politique, et je pense qu'il n'y aura pas de débat sur l'électricité dans la réforme du mode de calcul du DPE ».

1. Consulter la proposition de loi
https://www.senat.fr/leg/exposes-des-motifs/ppl23-028-expose.html

Réactions1 réaction à cet article

... et on va aussi voir que la production d'énergie nucléaire est un gouffre énergétique puisque seulement 1/3 devient de l'électricité !

JMLESU | 07 décembre 2023 à 10h01 Signaler un contenu inapproprié

Réagissez ou posez une question à la journaliste Rachida Boughriet

Les réactions aux articles sont réservées aux lecteurs :
- titulaires d'un abonnement (Abonnez-vous)
- inscrits à la newsletter (Inscrivez-vous)
1500 caractères maximum
Je veux retrouver mon mot de passe
Tous les champs sont obligatoires

Partager

Panorama : votre plateforme de supervision industrielle globale CODRA
Votre conseil en droit des problématiques Énergies-Climat Huglo Lepage Avocats