Une hiérarchie des modes de traitement des déchets a été définie en 2008 par l'Union européenne pour inverser cette tendance (directive cadre déchet du 19 novembre 2008). La priorité va à la prévention de la production, puis au réemploi, au recyclage, à la valorisation et enfin à l'élimination. Le Grenelle de l'environnement a suivi via des objectifs chiffrés : diminution du volume des déchets de 7 % par habitant au cours des cinq prochaines années (5 kg par an et par habitant), valorisation matière et organique de 35 % et réduction de 15 % de la quantité de déchets destinés à l'enfouissement ou à l'incinération d'ici 2012.
Si la directive européenne souhaitait que l'élimination soit utilisée en dernier recours, elle a néanmoins introduit une évolution de taille : si jusque-là l'incinération était considérée comme un procédé d'élimination des déchets, dans certains cas, lorsque l'efficacité énergétique des usines dépasse un certain seuil (60 à 65 %), elle pourra bénéficier du statut de valorisation. Certaines unités d'incinérations (110 en France) produisent en effet de la chaleur, de l'électricité, voire les deux à la fois, à partir des déchets traités.
Si les acteurs de la filière plaident pour une reconnaissance de l'incinération en tant qu'énergie renouvelable, les associations appellent à ce qui constitue selon elle la raison, rappelant que l'incinération est émettrice de gaz à effet de serre et que l'objectif premier est la diminution du volume des déchets produits.
Plaidoyer pour la valorisation par l'incinération…
Selon une enquête publiée en septembre 2009 par le Syndicat national du traitement et de la valorisation des déchets urbains et assimilés, ''sur 13 millions de tonnes de déchets incinérées en France chaque année, 11 millions permettent de vendre de l'énergie soit 85 % du total des déchets incinérés''. Les syndicats interrogés lors de l'enquête, qui traitent 7,1 millions de tonnes de déchets, fournissent l'équivalent de 450.000 tep, soit 0,064 tep par tonne de déchet incinérée. 76 % de l'énergie produite est thermique, 24 % électrique. La recette moyenne provenant de l'énergie fournie par l'incinération en France s'élève à 198 millions d'euros par an en France (18€ la tonne).
L'enquête note que sur 47,5 millions de tonnes de déchets municipaux produits, 28,5 sont peu ou pas valorisées énergétiquement. Le syndicat en déduit que la réserve d'énergie serait de 1,8 millions de tep, voire 3,4 millions de tep si les systèmes utilisés étaient les plus efficaces.
Et de conclure que l'incinération pourrait produire 4 millions de tep, l'équivalent de 28 millions de barils de pétrole, soit 10 % des énergies renouvelables supplémentaires que la France doit produire d'ici 2020.
Selon la même enquête, l'incinération ''n'encourage pas à jeter plus et/ou à produire plus de déchets et les syndicats disposant d'une UIOM recycleraient autant qu'ailleurs (14 %)''.
Le SVDU se base également sur des statistiques européennes qui montrent que les pays les plus efficaces dans le traitement de leurs déchets sont aussi ceux qui utilisent le plus l'incinération. L'Allemagne recycle et composte à 64 % et incinère à 35 %, les Pays-Bas respectivement à 60 % et 38 %, la Belgique à 62 et 34 % alors que la Grèce met en décharge à 86 % contre 14 % de recyclage et compost, le Portugal à 63 % contre 37 %...
Le réquisitoire contre l'incinération
En réponse aux arguments du SVDU, le centre national d'information indépendante sur les déchets (CNIID) souligne ''la très faible efficacité énergétique des incinérateurs français. La France présente la spécificité d'avoir les usines les moins efficaces d'Europe avec des rendements souvent très faibles (30 % pour la production de chaleur contre 65,8 % au niveau européen et 11 % pour l'électricité contre 18 % en moyenne dans l'UE). Seulement 10 % environ des usines françaises peuvent prétendre au statut de valorisation.
De plus, selon le CNIID, l'énergie issue des incinérateurs, que les industriels présentent comme une ''énergie verte'', est en réalité en partie d'origine fossile, provenant notamment des plastiques produits à partir de pétrole'' : 50% des déchets ménagers seraient issus de ressources fossiles et 50 % de ressources renouvelables. Depuis 2001, l'Union européenne reconnait l'énergie produite par l'incinération des déchets comme une énergie renouvelable à 50 %.
Autre argument des associations : la pollution liée à l'incinération. Selon le registre français des émissions polluantes, l'incinération des ordures ménagères génère de 0,3 à 0,5 tonne de CO2 par tonne de déchets, et celle des déchets industriels de 0,5 à 2 tonnes de CO2 par tonne de déchets, selon leur composition. ''Dans ces conditions, l'incinération des 13 millions de tonnes de déchets provoque l'émission annuelle d'environ 6,5 millions de tonnes de CO2, hors prise en compte des émissions dues aux transports (essentiellement routiers) des 13 millions de tonnes de déchets et des 3 millions de tonnes de résidus de l'incinération (mâchefers…)'', note le CITEPA (centre interprofessionnel technique d'études de la pollution atmosphérique). S'ajoutent aux émissions de GES d'autres pollutions. L'Institut national de veille sanitaire (INVS) estime qu'il faudra 10 à 20 ans pour savoir s'il existe un risque de cancer lié aux nouvelles générations d'usines d'incinération.
Ce qu'en dit la loi
Malgré l'évolution du statut de l'incinération dans certains cas, ce mode de traitement des déchets est considéré comme polluant. Il a été assujetti, par la loi de finances 2009, à la TGAP (taxe générale sur les activités polluantes). La tonne incinérée est renchérie de 1,5 à 7 euros (14 euros en 2013). Cependant, des dégrèvements de TGAP s'élevant jusqu'à 50 % peuvent êtres obtenus pour les incinérateurs ayant des performances énergétiques élevées.