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Gestion de l'eau : la Cour des comptes appelle à réduire au quotidien les prélèvements

Planification, connaissance de l'état de la ressource, suivi des prélèvements, la Cour des comptes relève plusieurs dysfonctionnements dans la gestion quantitative de l'eau et appelle à réduire durablement les prélèvements.

Eau  |    |  D. Laperche
Gestion de l'eau : la Cour des comptes appelle à réduire au quotidien les prélèvements

« La réduction des prélèvements apparaît comme l'unique solution à même de résoudre à court terme le problème fondamental du déséquilibre, se positionne le rapport public (1) thématique de la Cour des comptes consacré à la gestion quantitative de l'eau en période de changement climatique. Elle n'est pourtant pas encore considérée comme une priorité. »

Les conséquences du changement climatique sont, dans leurs grandes lignes, désormais bien connues : le régime des pluies est modifié avec une fréquence accrue d'événements extrêmes, notamment de sécheresses. Le décalage des précipitations et l'augmentation de l'évapotranspiration ne sont pas sans conséquences. « Le phénomène d'évapotranspiration a augmenté, réduisant le bénéfice de "l'eau verte" pour les plantes et les quantités "d'eau bleue" disponibles pour tous les usages, note la Cour des comptes. Cette raréfaction de "l'eau bleue" trouve son origine principale dans une diminution de la "pluie efficace", qui recharge les nappes par infiltration ou qui ruisselle jusqu'aux cours d'eau et aux lacs. »

Une étude récente (2) (2022) du ministère de la Transition écologique montre ainsi que la ressource en eau renouvelable disponible a réduit de 14 % entre la période 1990-2001 (229 milliards de mètres cubes) et 2002-2018 (197 milliards de mètres cubes).

“ Aucun document ne retrace l'ensemble des recettes et dépenses annuelles, publiques et privées, consacrées à la gestion de l'eau en France ” Cour des comptes

Et pour y faire face les réponses proposées semblent inadaptées, selon la Cour des comptes. « Face à une planification défaillante et des sècheresses de plus en plus fréquentes et sévères, la gestion de crise, au lieu d'être complémentaire à la gestion structurelle, prend le pas sur cette dernière, ce qui n'est pas satisfaisant pour prévenir l'indisponibilité de la ressource, regrette la Cour des comptes. Ce constat est valable tant au niveau du cadre des mesures prises que de leur contrôle par l'administration de l'État. »

Une connaissance à améliorer

Autre manque pointé par la Cour des comptes : la nécessaire amélioration des connaissances sur l'état de la ressource. Car le réseau national de surveillance (3) ne permet pas de disposer d'une photographie en temps réel de la situation. Et un certain nombre d'utilisateurs échappent à ce suivi, que ce soit parce que leurs prélèvements sont inférieurs au seuil fixé, par méconnaissance ou « oubli » de l'obligation de déclaration en mairie pour les forages inférieurs à 1 000 m3. « Dans le bassin Adour-Garonne, la moitié des 20 000 irrigants ne font pas de déclaration, illustre la Cour des comptes. Leur consommation est estimée à moins de 7 000 m3, sans aucun contrôle. » Par ailleurs, certaines données présenteraient des incohérences. 

Des prélèvements différents selon les bassins

Selon les bassins, les principaux utilisateurs d'eau diffèrent. Ainsi, les prélèvements sont majoritairement agricoles dans les bassins Adour-Garonne (78 % du total de l'eau consommée) et Loire-Bretagne (55 %), pour l'alimentation en eau potable en Artois-Picardie (62 %) et en Seine-Normandie (56 %), la production d'électricité en Rhin-Meuse (58 %) et en Rhône-Méditerranée (46 %). Ce qui n'est pas négligeable car la période de tension n'est pas la même selon qu'il s'agit de satisfaire les besoins des agriculteurs irriguants ou des industriels, ou que les prélèvements dépendent de ressources superficielles ou d'eaux souterraines.

Nappe des GTI à Vittel, projets de retenues à Sivens ou à Sainte-Soline… la question de la définition de la quantité d'eau qu'il est possible de répartir entre les acteurs reste également un point sensible. « Les méthodes de détermination des volumes prélevables en période d'étiage semblent faire maintenant l'objet d'un consensus, indique la Cour des comptes. En revanche, la détermination des volumes prélevables en période de hautes eaux est plus délicate en raison des interactions encore mal connues entre les cours d'eau et leur nappe d'accompagnement. »

Le dispositif prévu pour le suivi doit également être revu pour améliorer les contrôles. « Les autorisations données par les Dreal au titre des installations classées pour la protection de l'environnement ne sont pas enregistrées dans la même application que celle des DDT, ce qui ne permet pas une connaissance exhaustive des autorisations de prélèvement accordées par l'Administration sur un territoire donné », constate la Cour des comptes. De même, les activités de police administrative de l'eau (contrôles sur pièces ou sur place des prélèvements par des agents de l'État) sont suivies dans des applications informatiques différentes selon les services déconcentrés qui opèrent le contrôle. »

La Cour des comptes regrette également le manque de vision globale sur le financement public de la politique de l'eau. « Aucun document ne retrace l'ensemble des recettes et dépenses annuelles, publiques et privées, consacrées à la gestion de l'eau en France, note-t-elle. Cette absence d'une vision d'ensemble des moyens financiers consacrés à la politique de l'eau constitue un obstacle à sa conception, à sa mise en œuvre et à son suivi. »

Une stratégie de long terme à instaurer

La Cour des comptes plaide pour un changement d'approche dans la gestion quantitative de l'eau. « La politique de l'eau a consisté pour l'essentiel à organiser la répartition de l'eau entre ses différents usagers de sorte qu'ils en disposent lorsqu'ils en avaient besoin, estime-t-elle. Elle doit désormais devenir une politique de protection d'un bien commun essentiel. (…) [Les mesures de politique publique] retenues par les autorités locales consistent toujours à essayer de sécuriser l'approvisionnement en eau par des interconnexions, des infrastructures de stockage et de transfert de l'eau. Ces solutions anciennes deviennent de plus en plus difficiles à mettre en œuvre. » Les solutions alternatives envisagées aujourd'hui, comme la réutilisation des eaux usées traitées, ne pourront pas se développer sur les territoires littoraux dans certaines conditions. De la même manière, la désalinisation de l'eau de mer pèse lourd d'un point de vue énergétique et environnemental avec la production de grande quantité de saumures. « Les solutions fondées sur la nature sont plus prometteuses. Mais certaines peuvent s'avérer longues et complexes à mettre en œuvre quand elles supposent par exemple une modification de la conception des villes, de l'aménagement du territoire et des pratiques agricoles. »

L'option la plus pertinente est une stratégie de long terme de réduction des prélèvements. Et les économies d'eau devraient être inscrites dans un fonctionnement quotidien et non uniquement imposées lors d'une situation de crise. « La planification stratégique de la gestion de l'eau et les plans territoriaux de gestion de l'eau devraient comporter des objectifs de réduction des prélèvements », note-t-elle. Pour la Cour, afin d'inciter les gros consommateurs à modifier leur comportement, la tarification progressive doit être mise en place partout où elle est possible. « L'irrigation devrait faire l'objet d'une étude de son impact et le financement public des infrastructures de sa sécurisation devra être conditionné à des engagements de réduction des prélèvements pris par les bénéficiaires », assure-t-elle.

1. Lire La gestion quantitative de l'eau en période de changement climatique (2016-2022)<br /><br />
https://www.ccomptes.fr/fr
2. Télécharger Evolutions de la ressource en eau renouvelable en France métropolitaine de 1990 à 2018
https://www.actu-environnement.com/media/pdf/news-42225-evolution-ressource-eau-renouvelable-france-1990-2018.pdf
3. Pour les eaux de surface, la France métropolitaine dispose de 2 601 stations de mesure des eaux superficielles et 1 708 piézomètres gérés par les directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement (Dreal). Concernant les aspects relatifs à la qualité, la maîtrise d'ouvrage est en partie confiée aux agences de l'eau et à l'Office français de la biodiversité. Pour les eaux souterraines, c'est le bureau de recherche géographique et minière (BRGM) qui gère la plupart des stations de mesures. L'observatoire national des étiages (Onde) s'occupe quant à lui des contrôles visuels des débits et les assecs de 3 239 lieux. Par ailleurs, certaines collectivités locales ont créé leurs propres observatoires locaux ou des stations de mesures.

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