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Sites et sols pollués : la Cour de cassation précise l'obligation d’information environnementale

Le 21 septembre 2022, la Cour de cassation a apporté des précisions importantes sur le champ d'application géographique de l’obligation d’information environnementale, concernant le périmètre d’implantation de sites classés sur des terrains en vente.

Publié le 10/10/2022

Par la décision n° 21-21.933, rendue le 21 septembre 2022, la Cour de cassation a confirmé que l'obligation d'information environnementale, prévue par l'article L. 514-20 du code de l'environnement, porte également sur une parcelle comprise dans le périmètre de l'installation classée soumise à autorisation, même si cette installation n'a pas été directement exploitée sur ladite parcelle. Commentaire.

Résumé

Aux termes de l'article L. 514-20 du code de l'environnement, le vendeur d'un terrain, sur lequel a été exploitée une installation classée soumise à autorisation, doit en informer par écrit son acquéreur.

Par un arrêt rendu ce 21 septembre 2022, la Cour de cassation a confirmé que l'obligation d'information environnementale, au titre de l'article L. 514-20 du code de l'environnement, intéresse la cession d’une parcelle, sur laquelle était située l'entrée d'une installation classée soumise à autorisation et donc située dans le périmètre de l'installation classée. Et ce alors même que l'installation classée n'était pas directement implantée sur cette parcelle qui n'en constituait que l'accès.

Les faits et la procédure

Par acte authentique des 27 et 29 novembre 2012, la Communauté urbaine de Bordeaux (CUB) a acquis un terrain de la société X. 

Le terrain constituait l'entrée d'une usine exploitée par la société A. GRE de 1893 à 1961, afin de traiter les déchets d'usines à gaz de manière à en extraire le soufre noir.
Sur le terrain de cette installation soumise à autorisation était, depuis 1926, édifiée la maison du gardien, démolie en 2012.
De 1961 à 2004, l'usine de soufre a été reconvertie en entrepôts frigorifiques, soumise à déclaration.
En 2012, à l'occasion des premiers travaux, l'acquéreur découvre dans le sol une quantité anormale de produits chimiques, devant être traités en déchets dangereux.
Par acte du 26 décembre 2014, Bordeaux Métropole venant aux droits de la CUB a, notamment sur le fondement de l'obligation d'information environnementale (article L. 154-20 code de l'environnement), saisi le tribunal de grande instance de Bordeaux d'une action indemnitaire contre la société X.
La cour d'appel de Bordeaux, par l’arrêt du 15 juin 2021 n° 20/05115, a rejeté les prétentions de Bordeaux Métropole, au motif qu'il n'était pas démontré qu'une installation classée pour la protection de l'environnement soumise à autorisation ait été exploitée sur le terrain cédé à l'acquéreur.
Saisie à son tour par l'acquéreur, la Cour de cassation a cassé et annulé l'arrêt de la Cour d'appel de Paris, en ce qu'il rejette les demandes de Bordeaux Métropole, fondées sur l'article L. 514-20 du code de l'environnement.

Commentaire

La décision rendue ce 21 septembre 2022 par la Cour de cassation appelle les observations suivantes.

En premier lieu, seul un terrain sur lequel une installation soumise à autorisation ou à enregistrement a été exploitée, doit faire l'objet d'une information environnementale de l'acheteur. L'article L. 514-20 du code de l'environnement ne s'applique donc pas aux installations soumises à déclaration (Cf. Cass. 3e civ, 20 juin 2007, n° 06-15.663 ; CA Paris, ch. 4-1, 10 mars 2017, n° 16/01383).

En l'espèce, une installation classée soumise à autorisation a été exploitée de 1893 à 1961. Cette installation de traitement des déchets d'usines à gaz a été reconvertie de 1961 à 2004, en entrepôts frigorifiques soumis à déclaration. Cette reconversion n'empêche en rien l'application de l'article L. 514-20 du code de l'environnement. S'il est établi que le terrain vendu était dans le périmètre d'implantation de l'usine soumise à autorisation, alors il aurait dû faire l'objet d'une information environnementale.

En deuxième lieu, la vente d'un terrain sur lequel se trouve une installation classée en cours d'exploitation, n'est pas soumis à cette obligation d'information environnementale (Cf. Cass. civ. 3, 9 avril 2008, n° 07-10.795). La Cour de cassation apprécie en effet strictement l'article L. 514-20 qui précise que l'obligation s'applique « lorsqu'une installation […] a été exploitée sur un terrain ». En l'espèce, l'exploitation de l'usine de traitement des déchets d'usine à gaz a cessé d'être exploitée en 1961.

En troisième lieu, l'installation classée doit avoir été exploitée sur le terrain objet de la vente. La Cour de cassation a eu l'occasion de préciser le périmètre de la zone d'implantation de l'usine soumis à l'obligation d'information environnementale par une décision du 22 novembre 2018. 

Le requérant soutenait que l'obligation d'information environnementale « porte non seulement sur la vente des parties du site des activités relevant du régime de l'autorisation mais également sur la vente de tout terrain issu de la division de ce site ». La Cour de cassation a rejeté ce moyen, au motif qu'il ne suffit pas qu'une installation classée ait pu causer une pollution par « sa proximité ou sa connexité ». L'application de l'article L. 514-20 du code de l'environnement nécessite « qu'une installation classée ait été implantée, en tout ou partie, sur le terrain vendu » (Cass. 3e civ, 22 nov. 2018, n° 17-26.209, n° 1058).

En l'espèce, la question était de savoir s'il fallait considérer qu'une parcelle, constituant l'entrée de l'ancienne usine et abritant la maison du gardien, entre dans le périmètre d'implantation de l'installation classée, ou qu'elle n'en constitue que le voisinage. L'acquéreur soutenait que « tout terrain, issu de la division d'une installation ou inclus fonctionnellement dans son périmètre, entre dans le domaine de l'article L. 514-20 du code de l'environnement, si même il n'a pas été directement le siège de l'activité ayant donné lieu à l'exigence d'autorisation ». La cour d'appel de Bordeaux a rejeté les prétentions du requérant en considérant que, si l'installation classée soumise à autorisation a bien été exploitée à proximité des parcelles vendues, il n'est pas établi que l'usine a été exploitée sur ces terrains.

Par la décision du 21 septembre 2022, la Cour de cassation casse le raisonnement de la cour d'appel de Bordeaux : « En statuant ainsi, alors qu'elle avait relevé que la parcelle constituait l'entrée de l'usine exploitée de 1893 à 1961 pour une activité de traitement des déchets d'usines à gaz de manière à en extraire le soufre noir et que l'habitation était une maison de gardien, ce dont il résultait que le terrain vendu était inclus dans le périmètre de l'installation classée soumise à autorisation, la cour d'appel a violé le texte susvisé. »

L'entrée d'une installation classée est donc considérée comme faisant partie du périmètre d'implantation de l'usine, au sens de l'article L. 514-20 du code de l'environnement. Le vendeur devra informer par écrit l'acquéreur qu'une installation classée a été exploitée sur le terrain accueillant l'usine et non l'usine elle-même. Il devra également l'informer « des dangers ou inconvénients importants qui résultent de l'exploitation » dont il a connaissance.

Julie Leroy
Juriste | Cabinet Gossement Avocats
Article originellement publié sur le blog d’Arnaud Gossement, le 10 octobre 2022.

 

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