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AccueilAssociation UCIEAvis sur l'AM du 09-02-2022Gestion des sites et sols pollués : un nouvel arrêté publié fixe l’obtention de la certification SSP

Gestion des sites et sols pollués : un nouvel arrêté publié fixe l’obtention de la certification SSP

L’association UCIE décrypte ici le nouvel arrêté ministériel du 09 février 2022, qui fait suite à la consultation publique fin 2021, et s’indigne devant la volonté du législateur de ne pas prendre en compte les demandes des professionnels indépendants.

Publié le 16/03/2022

Ce nouvel arrêté ministériel vient redéfinir le référentiel de certification SSP pour les entreprises réalisant les différentes attestations (Attes) issues de la loi Alur de mars 2014 et de la loi Asap de décembre 2020. Examinons ensemble les « limites du système ». 

Le 25 février dernier a donc été publié au Journal Officiel l’« arrêté du 9 février 2022 fixant les modalités de certification prévues aux articles L. 556-1 et L. 556-2 du code de l’environnement, le référentiel, les modalités d’audit, les conditions d’accréditation des organismes certificateurs et les conditions d’équivalence prévus aux articles R. 512-39-1, R. 512-39-3, R. 512-46-25, R. 512-46-27, R. 512-66-1 et R. 515-106 du code de l’environnement, ainsi que les modèles d’attestation prévus aux articles R. 556-3 et R. 512-75-2 du code de l’environnement »[1].

Il vient en remplacement de l'arrêté ministériel du 19 décembre 2018, annulé au 1er mars 2022 par décision du Conseil d’État du 21 juillet 2022, comme l’a été également la norme Afnor X31-620 de décembre 2018, dont la nouvelle version des cinq parties concernées a été publiée les 24 et 25 décembre derniers, après une révision en commission Afnor puis une enquête publique.

Petit rappel important, la décision du Conseil d’État du 21 juillet 2021 fait suite au recours engagé dès février 2019 par notre association de professionnels de l’environnement (UCIE), avec le soutien de l’Organisation des consultants en environnement et pollution (OCEP) et des Géologues indépendants de France (GIF), contre la norme Afnor X31-620 en cinq parties, publiée en décembre 2018 alors même que sa première partie Exigences générales n’avait pas fait l’objet d’un consensus en commission Afnor de normalisation. Cette décision statue donc implicitement contre l’arrêté ministériel du 19 décembre 2018 qui faisait référence à cette norme.

Concernant le nouvel arrêté ministériel du 09 février 2022, force est encore une fois de constater que les remarques et demandes formulées par de nombreux professionnels lors de la consultation publique soumise durant l’automne 2021, n’ont pas été considérées par la Direction générale de prévention des risques (DGPR). Dorénavant ces mêmes professionnels, intervenant souvent de longue date en Gestion SSP, se posent de légitimes questions.

Il est également assez « étonnant » d’observer la volonté de la DGPR de transférer au « privé » non seulement leur rôle régalien de « contrôle » des installations classées à cessation d’activité (notamment leur mise en sécurité), mais surtout leur responsabilité en cas de découvertes « fortuites » de pollutions lors des opérations d'aménagements après cessation d’activité.

A la lecture de cet arrêté, il est également « étonnant » de constater que, si les intitulés de plusieurs articles reprennent à juste titre les termes de la loi Asap du 07 décembre 2020[2] (notamment l’article 57), reportés également dans le décret du 19 août 2021[3] modifiant certaines dispositions, à savoir le fait que les attestations doivent être délivrées par « une entreprise certifiée dans le domaine des sites et sols pollués ou disposant de compétences équivalentes en matière de prestations de services dans ce domaine », les textes qui suivent ces intitulés ne font jamais référence à la possibilité, pour l’entreprise qui veut rédiger une telle attestation, de « disposer de compétences équivalentes en matière de prestations en Gestion SSP » !

En effet, le texte de ce nouvel arrêté n’aborde « stricto sensu - avec des contraintes administratives et technocratiques que l’on peut qualifier de « quasi-schizophrènes » - que l’éventualité d’équivalences à la certification SSP en place, c’est-à-dire à la certification LneSsp mise en œuvre depuis juin 2011 après contractualisation par la DGPR, en 2009, du Laboratoire national de métrologie et d’essais (LNE) en tant qu’organisme certificateur officiel.

Nombre de professionnels intervenant en France en Gestion SSP savent, hélas depuis longtemps, que cette certification LneSsp est « mal conçue et discriminante », principalement envers les entreprises individuelles et les très petites entreprises, ainsi que nombre de PME indépendantes ; on notera d’ailleurs que, pour de possibles raisons d’image voire de « communication », et probablement afin de mieux faire accepter la certification par la profession, le nouvel arrêté ministériel intègre un « nouveau logo » pour la certification SSP, sans référence dorénavant au LNE qui pourtant reste à ce jour le seul organisme certificateur possible – avec ses coûts exorbitants – et adoubé officiellement par la DGPR !

Il faut également rappeler ici que le référentiel LneSsp utilisé pour la certification SSP en France est lui-même issu du référentiel d’un « feu » label privé, dénommé « Qualipol », mis en œuvre de 2003 à 2012, officiellement pour « valoriser » auprès des donneurs d’ordres les prestations réalisées par les adhérents d’un syndicat de dépollueurs bien connu, lié au « monde du déchet » et très influent…, alors qu’officieusement il s’agissait en fait de « protéger leur marché » en « tentant de bloquer » à travers ce label « Qualipol », la possible venue d’autres acteurs en SSP, comme par exemple les professionnels du BTP.

Pour en revenir au nouvel arrêté, celui-ci apparaît en réalité, pour ces professionnels en Gestion SSP, dans sa teneur et sa complexité, relever d’une véritable « usine à gaz administrative-technocratique ». Il donne encore plus de poids à un « système de certification mal conçu », en place depuis 2011, favorisant intrinsèquement les « grosses structures » - grâce à un fort lobbying exercé auprès de la DGPR du ministère de la Transition écologique et d’autres ministères - avec en parallèle une volonté « implicite » d’éliminer les petites structures et d’empêcher de nouveaux arrivants nationaux ou internationaux sur le « marché SSP » en France.

Cet arrêté ministériel semble avoir été rédigé in fine pour ne « garder sous contrôle administratif » (via la certification SSP) qu’une poignée de « grands groupes prestataires du privé » disposant des capacités financières et assurantielles nécessaires à la gestion d’éventuels contentieux, liés à des problématiques de pollution découvertes a posteriori, grâce au transfert par l’État de ses responsabilité vers le privé, opération déjà menée pour ce qui concerne le contrôle des cessations d’activité de sites IC. La question mérite ici d’être posée !

Un autre point important à mettre en avant et à discuter ici, concerne la rédaction des Attes par des entreprises « certifiées dans le domaine des sites et sols pollués ou disposant de compétences équivalentes en matière de prestations de services dans ce domaine » : il est en effet bien précisé dorénavant dans le nouveau texte que ces Attes doivent être rédigées « sans réserve », ce qui implique une obligation de résultat de la part des entreprises qui les rédigent !

Or pour mémoire, les bureaux d’études, en tant que « conseil », ont une obligation bien entendu de moyens, mais non de résultat, pour la « simple et bonne raison » qu’ils ne sont « ni devin ni magicien ». Ils ne peuvent préjuger « à 100 % » du bon état et de la réelle qualité environnementale d'un terrain a priori, notamment pour les sites anciens avec du bâti encore en place (cf. les contraintes d’accès par l’occupation des sols du site, déterminant des incertitudes sur la qualité des sols en place sous le bâti, la présence possible de pollutions ponctuelles ou de substances polluantes confinées dans des fosses ou des cuves enterrées au droit des zones de terrain occultées par du bâti et non accessibles pour des engins de forage), sans obligatoirement connaître le projet constructif et d’aménagement prévu par un donneur d’ordres (tel un aménageur ou un promoteur), et surtout avant la réalisation des travaux incluant des terrassements après démolition du bâti en place, et cela même si des diagnostics préalables aux travaux ont été effectués « dans les règles de l’art », en référence aux réglementations, méthodologies et normes en vigueur en Gestion SSP. Le problème de l’occupation des sites par des bâtiments oblitérant la reconnaissance des sols sous-jacents n’a donc pas été pris en compte par la DGPR lors de la rédaction de cet arrêté !

En fait, c’est comme si les avocats avaient dorénavant une obligation de gagner un procès du moment qu’ils sont missionnés par leurs clients pour les défendre lors de contentieux, ou comme si les médecins avaient dorénavant l’obligation de toujours guérir les patients malades qui viennent les consulter !

On sait très bien que, sur un site industriel ou assimilé, plus le bâti est ancien, plus l’aléa est fort. Le risque est alors extrêmement important de « découvertes fortuites » de « points concentrés de pollution », ou de cuves ou de fosses béton contenant des « substances ou produits potentiellement polluants » (parfois confinés en l'état avant démolition du bâti et des dalles béton qui les recouvrent parfois depuis plusieurs dizaines d'années)!

En règle générale, les bureaux d’études qui réalisent des diagnostics de pollution sur des sites avec du bâti en place, notamment lorsque ce dernier est ancien, mettent des « points d'interrogation » sur les zones « incertaines – à aléa » du terrain concerné, car non diagnostiquées à cause de problèmes d’occupation des sols, et donc des problèmes d’accès aux engins de forages-prélèvements.

Ces points d’interrogation reportés sur les cartes, définissant les secteurs ou les zones polluées d’un terrain à l’issue de diagnostics de pollution des sols, constituent implicitement autant de « réserves » sur la réelle qualité environnementale des sols pris dans leur globalité, pour défaut d’information lié à un « aléa » causé par la présence de bâtiments lors des diagnostics réalisés sur le site concerné.

Il apparaît ainsi qu’une Attes ne peut donc être rédigée « sans réserve » dans de nombreux cas !

En SSP, la seule Attes qui peut éventuellement être rédigée « sans réserve » est celle réalisée après démolition des bâtiments en place, notamment sur d’anciens sites relevant ou non de la réglementation ICPE, et après avoir évacué les couvertures en place (dalles béton, enrobés…) puis décaissé les terrains jusqu’à la cote des terrassements prévus par le nouvel aménageur (sous-sols, parkings souterrains...) et selon le projet d’aménagement avec « changement d’usage » pour du tertiaire, commercial, résidentiel...

Ainsi, dans les faits, les seules Attes qui pourront être réellement rédigées « sans réserve » concernent celles qui seront rédigées a posteriori - après travaux - et non a priori.

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[1] Arrêté ministériel du 09 février 2022. Accès au texte.

[2] Loi ASAP du 7 décembre 2020. Accès au texte.

[3] Décret du 19 août 2021 « modifiant diverses dispositions relatives aux sols pollués et à la cessation d’activité des installations classées pour la protection de l’environnement ».

Article proposé par : Association UCIE Association UCIE Environnement

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1 Commentaire

LUC

Le 17/03/2022 à 14h16

Parfaitement d'accord avec la remarque sur l'absence de possibilité d'équivalence à la certification.
A ce sujet, la section 7 de l’arrêté du 9 février 2022 est un modèle d’écriture zigzagante. En effet, après un titre intitulé « Equivalences à la certification », on apprend que « l’équivalence à la certification mentionnée aux articles 2 à 6 du présent arrêté peut résulter d’une certification selon un référentiel équivalent à celui exigé pour cette certification ».
On peut résumer cela en disant que l’équivalence à une certification est, selon le ministère, une certification équivalente !
L’arrêté du 9 février ne répond visiblement pas à la formulation de l‘article 57 de la loi 2020-1525 du 7 décembre 2020 (loi ASAP) qui évoquait très clairement :
« une entreprise certifiée dans le domaine des sites et sols pollués ou disposant de compétences équivalentes en matière de prestations de services dans ce domaine ».
S’achemine-t-on vers un nouveau recours contre cet arrêté ministériel ?

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