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AccueilStéphane Dubos - Guillaume ThrierrLes projets sans subventions en Europe : un nouveau paradigme tarifaire pour l'éolien

Les projets sans subventions en Europe : un nouveau paradigme tarifaire pour l'éolien

La parité réseau est une réalité dans plusieurs pays d'Europe. L'éolien a fait la preuve de sa rentabilité, ce qui ouvre un nouveau paradigme tarifaire selon Stéphane Dubo et Guillaume Thrierr de Natixis. Détails.

Publié le 21/10/2019

Les économies d'échelle et la généralisation des appels d'offres ont entraîné une telle baisse du coût des énergies renouvelables qu'elle permet à ces dernières d'atteindre la parité tarifaire avec le réseau dans un nombre croissant de marchés. La croissance des énergies renouvelables n'est donc désormais plus uniquement tirée par des décisions gouvernementales en termes d'octroi de subventions.

La parité réseau a été atteinte dans de nombreux marchés européens : depuis 2017 en Espagne pour le solaire photovoltaïque et l'éolien, puis en Italie et au Portugal (record mondial de 15 €/MWh établit en 2019) ; depuis 2017 en Allemagne et aux Pays-Bas pour l'éolien en mer, en France depuis 2019. Elle devrait être atteinte prochainement pour le solaire photovoltaïque en Allemagne (45-61 €/MWh en 2019), en France, aux Pays-Bas et au Royaume-Uni, ainsi que pour l'éolien terrestre en Allemagne et en France (57-63 €/MWh).

L'atteinte de la parité réseau se traduit différemment d'un marché européen à l'autre en fonction des régimes réglementaires applicables :

- tarif contracté inférieur au prix de marché (renouvelable terrestre et éolien en mer en France),
- tarif minimum garanti inférieur au prix de marché, avec rémunération au-delà du prix garanti laissée à la disposition du producteur (éolien en mer en Allemagne et aux Pays-Bas, ou renouvelable terrestre en Espagne),
- vente sur les marchés de l'électricité hors mécanismes d'appels d'offres et contractualisation de gré à gré totale ou partielle de la production.

Les deux derniers cas se traduisent par une exposition accrue au marché. Ils invitent les acteurs renouvelables à développer de nouvelles approches pour sécuriser le financement des investissements en capital et en dette.

La gestion du risque de marché

La sécurisation des investissements requiert en effet de limiter l'exposition à la volatilité des prix de marché, et a ainsi créer une nouvelle demande pour des contrats privés d'achat d'électricité (PPA – Power Purchase Agreement) ou des produits dérivés de couverture des prix de l'électricité, courants aux États-Unis et en Australie, et encore peu répandus en Europe.

Les PPAs permettent à un producteur de substituer un engagement réglementaire par un engagement privé avec un consommateur cherchant à sécuriser son approvisionnement. Ces clients sont essentiellement d'importants consommateurs d'électricité (industriels, distributeurs, etc.) qui cherchent avant tout à verdir leur mix énergétique. Ces contrats reprennent généralement l'ensemble des clauses que l'on retrouve typiquement pour un projet règlementé (volume, prix, nœud de livraison, pénalités éventuelles pour l'acheteur et le producteur, clauses de résiliation, etc.). Le défi pour les producteurs est de trouver un équilibre entre le prix de vente de l'électricité générée, la durée des contrats (typiquement 5-10 ans) et la durée recherchée des financements, le prix de vente diminuant progressivement avec la durée du contrat.

La volatilité des prix pour la production non contractée impose par ailleurs aux producteurs et à leurs prêteurs de faire des projections de prix de l'électricité. Pour cela, il convient d'avoir une compréhension fine de l'évolution à moyen terme du mix énergétique et du profil de demande. Les décideurs forment leur propre opinion et ont recours à des consultants spécialisés pour établir une référence ou un consensus. Cette analyse doit également tenir compte de l'effet de « cannibalisation » attendu dans un contexte de corrélation de la production renouvelable, qui perturbe l'équilibre offre-demande et engendre un décalage parfois important entre le prix de marché moyen observé et le prix effectivement capturé par les producteurs renouvelables.

Les enjeux de bancabilité

De manière générale, les principes de bancabilité sont très similaires pour des projets régulés et des projets ayant atteint la parité réseau, à savoir un cadre réglementaire stable et une capacité des projets à supporter le service de la dette dans des cas dégradés.

Toutefois, en situation de parité réseau exposant les porteurs de projets à un risque marchand partiel, les paramètres impactant la capacité d'endettement ne se limitent plus seulement à la volatilité de la production et aux risques de performance. Les prêteurs doivent également tenir compte de la volatilité des prix de l'électricité pour évaluer la robustesse financière de chaque projet. La part des revenus exposée au risque du marché doit être appréciée par des analyses de sensibilité à des cas de prix dégradés par rapport aux prévisions initiales. Le prix « point-mort » (breakeven), au-dessus duquel les cash-flows du projet permettent le remboursement de la dette sur la durée de vie du projet, doit rester acceptable. Les prévisions de prix peuvent faire l'objet de mises à jour, lors de la vie du crédit, en cas de déviations par rapport aux projections initiales, entraînant des blocages de distributions et des remboursements anticipés lorsque certains ratios seuils sont atteints.

Les prêteurs doivent également prendre en compte la qualité de crédit des contreparties de PPAs privés, et veiller à une structuration satisfaisante de ces PPAs, notamment en termes de clauses de résiliation. Le crédit intégrera par ailleurs un certain nombre de dispositions incitant à la contractualisation rapide de toute production vendue sur le marché (maturité réduite, cash sweeps, marges élevées).

Ces mécanismes peuvent s'accompagner d'éléments de structuration financière adaptés à un marché spécifique, comme en Espagne par exemple, où en cas de surperformance les premières années, le tarif minimum garanti disparaît. Il est alors nécessaire de rembourser par anticipation une portion de la dette.

L'exposition partielle au risque marché tend aussi à réduire le niveau de levier en dette senior. De nouvelles offres de dette mezzanine émergent, permettant de re-leverager un projet ou un portefeuille d'actifs.

 

Avis d'experts proposés par Stéphane Dubos, Executive Director, et Guillaume Thrierr, vice-président, Natixis

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3 Commentaires

Sirius

Le 22/10/2019 à 10h07

Dans tous ces calculs économiques on ne trouve pas trace de l'évaluation du coût des dommages causés au cadre de vie . Ceux des résidents à 500 m. d'une machine de 200 m. de haut ,et celui plus général du paysage .Or le paysage est source de revenus majeurs pour le pays .Des économistes ne devraient pas paraître l'ignorer .

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Tombour

Le 03/12/2019 à 18h18

Le paysage est une source de revenus majeurs...

Bah justement, si on ne donnait pas préférence à la transformation du pays en un immense parc d'attraction plutôt qu'à la transition énergétique, on n'en serait pas là.
Développer l'industrie de ces technologies (pour cela il faut qu'il y ait un volume stable, ne dépendant pas des yoyos des décisions gouvernementales comme on a eu entre 2007 et 2009) plutôt que l'économie touristique (et ces jobs précaires, ces concentrations de populations générant pollutions de toutes sortes).
Des ABF qui empêchent des propriétaires motivés de remplacer leurs fenêtres (ah oui mais elles devront être en bois, ressembler aux existantes...bref vous n'en trouverez pas de performantes ou à 3 fois le prix nécessaires), de mettre du solaire thermique (mais pas à moins de 15km de la moindre église, soit la distance qui sépare 2 églises)...
A choisir entre paysage et environnement, mon choix est fait.

J'ajoute que j'ai grandi à quelques km d'un CNPE et je préfère avoir des éoliennes dans mon coucher de soleil qu'un panache de vapeurs...

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Benoit 49

Le 19/12/2019 à 2h47

Effrayant de voir des "écologistes" dénier aux ruraux le droit de protéger leur cadre de vie. le paysage, même modeste, même loin des chers et beaux arrondissement parisiens, a une existence juridique (convention de Florence) et participe au bien être des habitants.
Peut-on justifier la préservation de l'environnement par l'apport de nouvelles pollutions visuelles et sonores ?

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