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AccueilClément DelhommePour une agriculture urbaine écologique « à la française »

Pour une agriculture urbaine écologique « à la française »

Après les discours politiques, place à l’action. C’est le vœu de Clément Delhomme, dans un appel à la création d’une véritable agriculture urbaine, en complément de l’actuel éventail agricole : une démarche menant vers plus d’autonomie et de résilience.

Publié le 08/12/2023

Le 25 septembre dernier, Emmanuel Macron, a appelé de ses vœux à une planification écologique « à la française ». Désormais, c'est à nous, entrepreneurs des secteurs innovants et écologiques, de faire de ces annonces une réalité. Sur le volet agricole, nous souhaitons affirmer notre position de faire de la France une nation résiliente, respectueuse de l’environnement, des agriculteurs et des consommateurs.

Une agriculture diversifiée, complémentaire et compétitive au service de notre autonomie alimentaire.

Pourrions-nous être la première nation des pays de l’OCDE à obtenir notre indépendance alimentaire ? Avec une politique ambitieuse de lutte contre l’importation et de mise en valeur de la spécificité agricole française, oui  ! Il faudrait ainsi, selon nous, mettre en place un mix agricole, c’est-à-dire une stratégie permettant de nourrir chacun d’entre nous – en France ou ailleurs – sans nuire à notre planète, en localisant et diversifiant les méthodes de production de nos aliments. Dans cette idée, les métropoles ou les agglomérations de plus de 200 000 habitants, ayant une densité de population élevée, devraient opter pour la réhabilitation des friches industrielles en fermes urbaines. Économes en eau[1], fonctionnant sans engrais chimiques et permettant la création d’emplois, les fermes urbaines vont et sont en train de se développer dans toutes les métropoles mondiales. Leur gros avantage est surtout de substituer la production maraîchère aujourd’hui importée en production locale de qualité. Rappelons qu’en France, près de 3,63 millions de tonnes de fruits sont importées chaque année[2]. Le but de l’agriculture urbaine est donc de compléter l’offre de l’agriculture conventionnelle, pour permettre à nos métropoles de lutter contre l’importation et augmenter la qualité des produits proposée aux citadins. 

Une réglementation de l’agriculture urbaine pour le bien des consommateurs.

On a coutume de dire que les entreprises – du moins leurs représentants – sont toujours en faveur des thèses libérales les plus dures et des régulations économiques les plus faibles. En agriculture urbaine, ce n’est pas forcément le cas. En terre comme en hors-sol, il existe de multiples manières de cultiver. Comme exposé précédemment, certaines fermes urbaines trouvent des solutions pour s’affranchir de l’usage de produits phytosanitaires, mais rien dans le droit ne les contraint à le faire. Rappelons que les engrais chimiques sont responsables, à eux seuls, « de 5 % des émissions annuelles de CO2 », selon des chercheurs de l'université de Cambridge. S'il est chose ardue de contraindre les agriculteurs conventionnels d’arrêter l’utilisation des engrais chimiques (pour des raisons de coût notamment), nous pouvons facilement imposer un cahier des charges à l’ensemble des fermes urbaines excluant lesdits engrais. Pour que l’impact environnemental des fermes urbaines soit le plus faible possible, nous devons aussi exiger une vente sectorisée des produits et obliger les acteurs de la filière agroalimentaire à se sourcer en « produits » locaux. À cet égard, la loi Egalim avait fixé des objectifs relatifs à l’achat bio et local dans les cantines, mais la loi peine à être appliquée à cause du manque de création de filière locale. Ce secteur naissant nécessite donc d'être encadré et accompagné afin de développer une agriculture locale, sans produit chimique, accessible à tous. 

De France Relance à France Résilience

Depuis les premiers confinements, nul ne peut passer à côté du plan France Relance. Cette solution « temporaire » a permis de maintenir le niveau de compétitivité de notre économie, néanmoins nous devons aller plus loin. Après le plan France Relance, une réponse relativement conjoncturelle aux crises post-covid, nous souhaitons la mise en place d’un plan France Résilience, basé sur quatre points majeurs :

Un droit au service de l’innovation. Aujourd’hui, on ne décompte plus les innovations bloquées et/ou freinées par des barrières juridiques ou assurantielles. À ce sujet, nous pouvons citer le paradoxe juridique des fermes urbaines ne pouvant pas s’installer en zone urbanisée (zone U Ua ou en Uc des PLU), car aucune activité agricole ne peut être exercée en ville. Sauf exception locale, au cas par cas.    

Une nouvelle commande publique et une mise à jour du droit de la concurrence. Ce point est de loin le plus complexe, car il nécessite de faire un arbitrage entre économie « conventionnelle » et économie locale. En somme, il faudrait, au nom de la localité, pouvoir privilégier un acteur à un autre dans le choix des produits commandés par la puissance publique. Aujourd’hui, seuls des truchements ou diverses expériences sporadiques permettent d’attribuer en ce sens certains marchés. Les innovations législatives apportées sur le sujet en décembre 2022 sont encourageantes, mais il faut préserver en modifiant le droit européen et demander une transparence totale aux entreprises concernées pour se prémunir « des copinages locaux ».  

-  Un patrimoine public accessible plutôt que des subventions publiques. De prime abord, on pourrait penser que l’action économique de l'État pourrait se résumer à donner des subventions et/ou encadrer certains secteurs économiques. Cependant, il existe une voie dans laquelle l'État est acteur de l’économie sans créer de la dette publique. Cette voie, c'est la mise à disposition de bâtiments publics à destination des jeunes entreprises innovantes, projets locaux ou associations. On pourrait imaginer une montée en puissance des compétences de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU), pour préempter et réaffecter plus efficacement l'innombrable foncier urbain disponible en France. En agriculture urbaine, les besoins en termes de surfaces sont tout aussi importants que les besoins de financement. La mise en place d’un guichet unique, dématérialisé pour toutes les demandes de foncier effectuées par des Jeunes entreprises innovantes (JEI), est une évidence pour faire de ce plan une réussite.

-  Les « appels à création de filiale locale » plutôt que des AMI / AAP au projet varié et confus. Nouvelle coqueluche des collectivités territoriales, les appels à manifestation d’intérêt (AMI) se multiplient sur notre territoire. Ces AMI sont une sorte de pré-appel à projet  qui peuvent aussi bien déboucher sur un appel à projet classique (AAP) ou sur l’abandon du projet. Dès lors, les collectivités perdent un temps considérable dans la mise en place d’un « projet ». Ainsi il faudrait créer un appel à création de filiale locale. Inspiré des zones d'aménagement concertées (ZAC), ce nouveau dispositif permettrait aux collectivités de sonder le marché sur une création de filiale et non sur un simple projet. Si on prend la filière agricole, les collectivités pourraient aider à la mise en place d’une chaîne de production et de distribution localisées pour alimenter les lieux de restauration collective de son territoire. Ainsi, les lois Egalim I et II pourront être respectées, tout en créant de l’emploi sur le territoire et en participant à sa réindustrialisation. 

Vous l’aurez compris, agriculture urbaine et résilience des territoires vont de pair. Cependant, si nous souhaitons développer une culture locale, respectueuse de l’environnement, des producteurs et des consommateurs, nous devons encadrer ce nouveau secteur. Cet appel à la modernisation de certaines parties de notre droit concerne certes l’agriculture urbaine, mais elle ouvre la voie à toutes les industries de demain prêtes à réindustrialiser la France.  

 

Clément Delhomme

Associé chez Champerché

__________________________________________

[1] Environ 90 % d’eau consommée en moins pour une production équivalente par rapport à un champ classique (source CEA 4.0 sur les diverses données des entreprises du secteur). 

[2] Source : GTA - douane française - élaboration FranceAgriMer (2018).

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