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AccueilMarilyn Munier et Alice CayreL'avenir incertain du gaz vert

L'avenir incertain du gaz vert

Le projet de PPE a refroidi la filière du gaz vert. Mais la prudence du gouvernement ne doit pas la freiner. Au contraire, il est temps de démontrer les atouts du gaz vert selon Marilyn Munier & Alice Cayre, consultantes mc2i Groupe.

Publié le 01/04/2019
Actu-Environnement le Mensuel N°391
Cet article a été publié dans Actu-Environnement le Mensuel N°391
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En novembre 2018, le dévoilement partiel du projet de Programmation Pluriannuelle de l'Énergie (PPE) réaffirmait l'objectif ambitieux, défini par la loi de transition énergétique de 2015, d'atteindre 10 % de gaz qui sont renouvelables dans la consommation totale de gaz d'ici 2030. Grâce à cet engouement autour des différents avantages et possibilités du gaz vert, un nombre croissant de fournisseurs commercialisent des offres de gaz vert et les autorités publiques tentent d'en accélérer le développement en participant au financement de projets de sites de production.

En 2018, la production annuelle en France de gaz vert n'atteint que 0,1 % de la consommation nationale de gaz. En effet, même si le nombre de sites français d'injection de biométhane est en nette augmentation, la filière n'en est encore qu'à ses débuts.

Nous sommes donc encore loin des objectifs du projet de PPE. Afin d'atteindre son ambition, le projet préconise notamment de favoriser la production locale d'énergie et le développement des réseaux intelligents appelés aussi "Smart Gas grid".

Développer les smart bas grids

Si l'étymologie commune des termes peut prêter à confusion, le Smart Gas Grid n'est pas une simple transposition des Smart Grids au domaine du gaz. En effet, grâce à l'importante capacité de stockage du gaz ainsi qu'à une demande plus prévisible, le réseau de gaz est moins soumis à la contrainte d'équilibre entre production et consommation que le réseau électrique. Libéré de cette contrainte, le Smart Gas Grid porte de nouveaux enjeux : l'augmentation des nouveaux sites de production décentralisés impose une refonte du modèle traditionnel d'exploitation et du pilotage du réseau gazier. De nouvelles problématiques de qualité et de sécurité à l'entrée du réseau apparaissent.

Pour faire face à celles-ci, le réseau doit se doter d'outils intelligents permettant de contrôler à distance la qualité, la pression et l'écoulement du gaz dans les conduites. L'instrumentation du réseau, par l'ajout de capteurs s'appuyant sur les nanotechnologies et l'IoT, permet d'avoir une connaissance plus fine de l'état du réseau pour un meilleur pilotage des flux. Pour aller plus loin, de nombreux projets d'innovation sont actuellement en cours. GRTGaz a créé son propre centre de recherche, RICE, pour apporter des solutions sur les différentes phases de conception, pilotage, contrôle, maintenance et information. RICE s'est appuyé sur l'instrumentation du réseau pour développer une SmartBall dédiée à la supervision interne du réseau, équipée de capteurs qui permet de détecter les fuites de gaz et les localiser. Au-delà de la digitalisation du réseau, la mise en place de drones survolant le réseau permet de réaliser une supervision externe.

L'innovation ne se limite pas uniquement à la simple surveillance de réseau. Dans le domaine de la maintenance, le projet révolutionnaire "Smart Pipe Repair In-Line Tool", permet de maintenir le transit de gaz pendant la réparation. D'autres outils sont aussi utilisés, comme par exemple, la réalité augmentée pour former les équipes et les placer dans des conditions très proches du réel.

Une PPE décevante

En développant le réseau Smart Gas Grid afin de favoriser la production locale d'énergie, la filière devrait être en capacité d'atteindre les objectifs de la PPE d'ici 2030. Pourtant cette belle lancée semble aujourd'hui compromise. Le 25 janvier 2019, coup de théâtre dans le domaine du gaz vert : la PPE a été publiée dans son intégralité par le gouvernement. Cette nouvelle trajectoire est accueillie avec beaucoup moins d'enthousiasme dans le domaine du gaz vert, qui se positionne comme grand perdant. En effet, l'objectif initial d'atteindre 10 % de gaz qui sont renouvelables dans la consommation totale de gaz d'ici 2030 a été réduit à 7 %. Celui-ci était déjà relativement faible en comparaison de l'ambition de la filière d'atteindre les 30 % en 2030 !

De plus, actuellement, la production par méthanisation coûte à maxima 125€/MWh et ce tarif devra être diminué à 87€/MWh en 2023. Cette baisse conséquente des coûts (de presque 30 %), jugée peu réaliste par les acteurs de la filière, conditionne donc le développement du gaz vert.

Les professionnels du gaz vert reprochent aussi à cette nouvelle vision de ne pas tenir compte des atouts du gaz vert, en particulier son caractère non intermittent : Les fonctionnalités du gaz vert ne se limitent pas uniquement à son propre domaine. Le réseau de gaz va pouvoir être amené à jouer un rôle essentiel en s'imposant comme un outil de flexibilité. En effet, le caractère intermittent des énergies renouvelables électriques (solaire, éolien) fait apparaître des contraintes d'équilibrage sur le réseau électrique. Le procédé du Power-to-Gas, qui consiste à valoriser l'excès de production électrique en gaz, se présente alors comme une solution pour garantir la sécurité de l'approvisionnement énergétique. L'excès d'énergie pourra être ainsi stocké et réinjecté après une nouvelle transformation en électricité par les centrales au gaz.

La filière doit se mobiliser

La PPE reste, avant tout, un outil de pilotage de la politique énergétique du gouvernement. Les objectifs fixés, aussi ambitieux soient-ils, ne sont pas figés. Ainsi, malgré ces signaux défavorables, la filière poursuit ses efforts. Il appartient donc aux professionnels du gaz vert, de clamer et mettre en valeur les atouts intrinsèques du gaz vert ainsi que d'appuyer l'essor du gaz vert dans les prochaines années grâce au développement des Smart Gas Grids. De nombreux défis technologiques, réglementaires et économiques sont à venir, mais c'est la coopération entre les différentes parties prenantes (producteur, gestionnaire de réseau et consommateur) ainsi qu'entre les différents réseaux d'énergies qui sera la clé de la réussite afin de définir de nouveaux modèles économiques optimaux.

Avis d'expert proposé par Marilyn Munier & Alice Cayre, Consultantes mc2i Groupe

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4 Commentaires

Covie Jura

Le 02/04/2019 à 8h01

Ok pour la méthanisation, mais attention à la qualité de vie des riverains qui ne souhaitent pas vivre à proximité de telles usines. A ce jour les avis des riverains à de tels projets ne sont pas écoutés. Attention au digestat, difficilement utilisable sans conséquences sur l'environnement. Et enfin la production de bio-gaz est plus polluante que le gaz naturel. Nous ne sommes pas sur un projet "écologique" mais "industriel". Covie-Jura (Dole)

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Pégase

Le 02/04/2019 à 9h37

Ne serait-on pas en train de nous refaire le coup des "biocarburants" avec le "gaz vert" ou "biométhane" ?! Qu'en termes édulcorés et surtout très marketing ces choses là sont dites ! Quand on voit le type d'exploitation agricole intensive qui se rue sur cette technologie, il n'y a absolument plus rien de "vert" une fois grattée l'épaisse couche de greenwashing.
Qu'on parle de nouvelle ressource gazière et de revenu financier complémentaire voir principal comme sur les très grosses unités, d'accord, mais de "gaz vert", là, il faut arrêter de prendre le citoyen pour une courge !

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Jipebe29

Le 02/04/2019 à 19h52

Ce gaz "vert" dégage aussi du CO2 quand il brûle. Donc, in fine, il n'a rien de vert et son coût est largement prohibitif.

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Jipebe29

Le 09/04/2019 à 9h40

C'est un grand jour : Pégase et moi sommes d'accord pour dénoncer le qualificatif "gaz vert". Hourra, hourra !

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