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Rejets urbains : l'autosurveillance se met progressivement en place

La métrologie de l'eau en quête de renouveau Actu-Environnement.com - Publié le 23/05/2016

Si le suivi des eaux pluviales, des déversements de réservoir d'orage ou les rejets des stations d'épuration constitue un des outils de prévention du déclassement des masses d'eau. Leur mise en place reste un enjeu pour de nombreuses collectivités.

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Rejets urbains : l'autosurveillance se met progressivement en place
Environnement & Technique N°358 Ce dossier a été publié dans la revue Environnement & Technique n°358
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La prévention du déclassement des masses d'eau passe par un suivi des rejets des agglomérations dans le milieu. La réglementation prévoit, notamment à travers l'arrêté du 21 juillet 2015, une surveillance de ces flux mais ouvre aussi la possibilité d'un suivi, à la demande du préfet, de l'incidence des rejets sur le milieu. Si cette obligation de mesures est vertueuse, elle se confronte toutefois à différentes questions et problématiques sur le terrain. "Pour la métrologie des systèmes d'assainissement, la qualité de la mesure dépend de nombreux

 
Le futur commentaire technique différenciera la mesure de l'estimation "Le commentaire technique [de l'arrêté du 21 juillet 2015] est en voie de finalisation dans le cadre du groupe de travail avec le ministère, nous sommes amenés à discuter de la différence entre la mesure et l'estimation, a indiqué Jean-Luc Bertrand-Krajewski, chercheur au laboratoire DEEP de l'Insa de Lyon, lors de la journée du l'autosurveillance organisée par le Graie. Nous pouvons sous-entendre que mesurer permet d'obtenir de meilleurs résultats, ce qui a été confirmé par le ministère". Le document de travail considèrerait pour l'instant comme de la mesure uniquement les méthodes aux dispositifs normalisés et dont l'installation a été vérifiée comme conforme aux prescriptions de la norme. Dans le cas contraire, elles sont perçues comme des estimations. "Si une étude spécifique permet de qualifier les données de l'étude validée comme conforme aux bonnes pratiques méthodologiques alors c'est considéré comme une mesure", développe Jean-Luc Bertrand-Krajewski.
L'étude spécifique permettrait de comparer le débit mesuré avec une valeur fournie par une autre méthode qui garantit un mesurage de qualité au moins égale (dans l'idéal supérieur) à celle du dispositif. Le futur commentaire technique proposera également une caractérisation du débit : soit le mesurage de la hauteur du débit et de la vitesse moyenne à travers la section de mesure, soit le mesurage de la hauteur d'eau associée à une loi hydraulique, soit grâce à une pompe avec temps de fonctionnement et débit nominal taré.
 
paramètres, allant de la qualité des capteurs, à leur étalonnage et à leur maintenance en passant par l'adéquation site/métrologie employée. Pour beaucoup de collectivités aujourd'hui, déployer l'autosurveillance, c'est compliqué car cela représente un large spectre de compétences allant de l'étude amont à l'exploitation des données au quotidien. Cela nécessite des moyens en personnel et de l'argent en matière d'investissement, note Benoît Marduel, chef de projet à la direction technique de G2c Ingénierie. Les grandes collectivités se sont lancées dans le bain il y a quelques années. C'est généralement moins vrai pour les « petites et moyennes » ou celles qui ont des systèmes d'assainissement plus restreints et des services moins structurés".

Concernant le réseau de collecte, l'arrêté du 21 juillet 2015 impose une autosurveillance du déversement des ouvrages de surverse. Pour les plus gros déversoirs d'orage, il est prévu une mesure et un enregistrement en continu des débits et une estimation des flux de pollution rejetés par ces déversoirs.

Une mesure du débit et flux de pollution délicate

L'obtention de ces données comporte de nombreuses difficultés : choix de l'emplacement du capteur pour évaluer le débit, détermination des incertitudes des données acquises ou encore mesure en continu des polluants. Pour tenter de répondre à ces problématiques de suivi, le laboratoire de génie civil et d'ingénierie environnementale (LGCIE) de l'Insa de Lyon, en partenariat avec la direction de l'eau du Grand Lyon ont conçu un dispositif intégré de surveillance et de maîtrise des flux (DSM) rejetés au niveau des déversoirs d'orage. "Le profil hydraulique de l'ouvrage permet une meilleure surveillance des flux qui y transitent : il est pré-étalonné et pré-équipé de capteurs qui s'insèrent au niveau de la canalisation de décharge pour permettre de faire des mesures de macro et micropolluants, explique Cécile Bernard, responsable du service pilotage eaux usées et autosurveillance à la direction de l'eau du Grand Lyon. Compte tenu de la variabilité entre et au sein d'un événement pluvieux, nous savons que nous n'aurons jamais un prélèvement représentatif. Le DSM vise à résoudre ce problème".

Un pilote hydraulique a été construit en avril 2013 et le dispositif en taille réelle pourrait être installé sur un site de la région lyonnaise cette année. Les performances du DSM seront également testées en matière de séparation des microorganismes pathogènes et de réduction de l'écotoxicité des rejets. Aujourd'hui, selon le Grand Lyon, le suivi des flux déversés par les déversoirs d'orage est réalisé à partir des mesures de débit en continu sur les déversoirs d'orage représentant 70% des rejets mais également de la modélisation. Chaque année, les résultats des mesures et de la modélisation font l'objet d'un comparatif et des actions d'amélioration sont mises en oeuvre. Les modèles sont régulièrement mis à jour et calés pour apporter une fiabilité et représentativité des résultats.

Par ailleurs, le Grand Lyon a mis en place depuis 2012 un suivi de la qualité des ruisseaux, intégrant l'ensemble des substances de la DCE. "Conformément aux préconisations de l'arrêté du 21 juillet 2015, nous allons essayer de corréler les volumes déversés par nos déversoirs d'ouvrage et la qualité des ruisseaux, mais cela va être difficile de déterminer si tel DO déclasse telle masse d'eau… nous mettons progressivement en place une démarche itérative", détaille Cécile Bernard.

Certaines collectivités comme Chambéry métropole pointe la nécessaire réflexion pour traduire de manière opérationnelle cette obligation de suivi. "Au départ, nous pensions dédier certaines personnes de l'équipe d'exploitation des réseaux, puis nous avons opté pour une spécialisation avec des fonctions métrologie plus transversales afin qu'elles puissent également travailler au coté du laboratoire intercommunal, explique Manuel Dahinden, ingénieur responsable technique du service eau et de assainissement de Chambéry métropole. Une des difficultés rencontrées après l'entretien de la sonde est la validation et la qualification de la donnée, puis l'analyse et l'exploitation".

Des outils analytiques adaptés pour les micropolluants

Pour ce qui est de l'autosurveillance des stations de traitement des eaux usées, le maître d'ouvrage d'une station doit mettre en place une surveillance de différents paramètres, en fonction de la capacité nominale de son ouvrage. Le préfet peut demander une surveillance complémentaire de la présence de micropolluants dans les rejets des stations de traitement des eaux usées et une surveillance de l'incidence des rejets du système d'assainissement sur la masse d'eau réceptrice.

"Pour les stations d'épuration, cela fait longtemps que notre autosurveillance est en place, pointe Cécile Bernard du Grand Lyon. Depuis 2010, nous suivons également les micropolluants présents dans les rejets des stations. L'une des principales difficultés est l'interprétation de ces données, le lien avec la qualité des milieux récepteurs et les actions de réduction à la source, puisque les substances rejetées sont pour la plupart des substances ubiquistes (utilisation générale au niveau industriel et de l'aménagement, comme les métaux). C'est pourquoi la métropole de Lyon est également engagée dans la gestion des eaux pluviales à la source, des actions de sensibilisation et de communication auprès des industriels, des aménageurs et du grand public, ainsi qu'un suivi encadré des autorisations de rejet industriel".

Une fois ces données obtenues et qualifiées, elles servent aux collectivités pour connaître et optimiser la gestion de systèmes d'assainissement. "Nous constatons un changement de comportement. D'un aspect initial purement réglementaire, les collectivités que nous côtoyons mutent vers une valorisation des données d'autosurveillance pour mieux agir en matière d'exploitation des systèmes mais aussi mieux investir chirurgicalement. Ces banques de données viennent également étoffer les bases de réflexion en matière de gestion patrimoniale, note Benoît Marduel, de G2c Ingénierie. Les exploitants privés sont structurés pour déployer et maintenir les dispositifs d'autosurveillance mais en terme d'exploitation et de valorisation des données collectées, pour l'orientation des investissements en aval, ce sont plutôt les régies qui se sont engagées de manière performante. Conscientes des bénéfices en matière de programmation d'investissement, elles mettent souvent l'accent sur un renforcement d'allocation de ressources personnel sur ce sujet".

Connaître les rejets urbains de temps de pluie

Pour les eaux pluviales, le suivi des polluants permet d'évaluer l'impact de ces substances sur les milieux récepteurs et d'essayer de mettre en place des actions correctives. Ainsi dans le cadre d'arrêtés préfectoraux des bassins de rétention et d'infiltration, le Grand Lyon surveille la qualité des eaux de pluie infiltrées (après décantation) mais également de la nappe phréatique en aval et en amont des points d'infiltration. "L'une des difficultés est de réaliser un prélèvement représentatif, suite à un épisode pluvieux, ce qui est très contraignant pour les équipes d'exploitation. L'idéal serait d'avoir des préleveurs dans les bassins d'infiltration, ce que nous intégrons aujourd'hui dès la conception des ouvrages, estime Cécile Bernard. Pour le suivi des pollutions dans les eaux pluviales, l'élément capital toutefois reste la mesure en continu car les événements présentent une forte variabilité".

Sur ces questions des rejets de temps de pluie, le Grand Lyon a pu bénéficier de l'éclairage de différents programmes de recherche menés dans le cadre de l'Observatoire de terrain en hydrologie urbaine (Othu) piloté par l'Insa de Lyon. Aujourd'hui, des pistes sont envisagées pour aider les collectivités à déterminer quels micropolluants suivre de façon prioritaire. "La liste réglementaire des substances à surveiller continue d'augmenter avec des polluants difficiles à suivre en routine, par exemple les polybromodiphényléthers (PBDE), le BPA, de nouveaux pesticides, note Céline Becouze-lareure, ingénieure de recherche dans le laboratoire déchets eaux environnement pollutions de l'Insa Lyon. Des réflexions sont en cours pour choisir les substances en fonction du contexte de la collectivité, des activités implantées. Des screening non ciblés nous permettent d'avoir des signatures de nos échantillons et ensuite de choisir les substances à suivre préférentiellement". Les scientifiques envisagent également d'utiliser des outils écotoxicologiques pour constituer un premier criblage ainsi que pour évaluer l'impact des rejets de temps de pluie sur le milieu récepteur. "Nous mettons des microorganismes aquatiques en contact avec l'échantillon et nous regardons les effets, précise Céline Becouze-lareure, ils serviront de systèmes d'alerte avant de se tourner vers des tests plus ciblés".

Dorothée Laperche

© Tous droits réservés Actu-Environnement
Reproduction interdite sauf accord de l'Éditeur.

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