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Une définition longuement négociée

Nanomatériaux : entre défis et précaution, la science avance Actu-Environnement.com - Publié le 13/05/2013

La définition des termes est essentielle pour encadrer les activités économiques naissantes. Les débats relatifs aux nanomatériaux relèvent de négociations entre autorités publiques, secteurs économiques, consommateurs et environnementalistes.

Nanomatériaux : entre défis et...  |    |  Chapitre 1 / 6
Une définition longuement négociée
Environnement & Technique N°325 Ce dossier a été publié dans la revue Environnement & Technique n°325
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"Depuis le premier emploi en 1974 par un chercheur japonais du terme « nanotechnologies », son contenu a fortement évolué et s'est largement « brouillé », chaque acteur ayant une vision particulière de ce que sont les nanotechnologies". Ce constat, tiré d'une note du Centre d'analyse stratégique (CAS) de novembre 2011, explique en partie le fait qu'il ait fallu attendre la fin des années 2000 pour qu'apparaissent les premières définitions normalisées et réglementaires des nanomatériaux.

Trois décennies pour définir une nouvelle technologie et les produits associés est relativement long, d'autant que le CAS rappelle qu'

 
un langage commun est un prérequis indispensable au développement et à la régulation des nanotechnologies  
CAS
 
: écriture et adaptation des cadres juridiques (révision de la réglementation Reach pour son application effective aux nanomatériaux), rationalisation de la production industrielle, agrément de leurs produits pour les entreprises, règlement de contentieux, etc.".

Référentiel ISO

De manière générale, une première définition présente les nanotechnologies comme "l'ensemble des techniques, outils et procédés qui permettent de manipuler la matière à une échelle en dessous de la centaine de nanomètres (1 nanomètre = 1 milliardième de mètre), d'élaborer de nouveaux matériaux et composants toujours plus petits, de construire atome par atome de nouvelles molécules et d'exploiter leurs propriétés en vue de nouvelles applications". Si une telle définition (proposée par le ministère de l'Economie) permet une approche globale, elle ne répond cependant pas à la complexité des enjeux sanitaires, environnementaux, économiques ou juridiques.

Les premières bases visant à "définir, décrire et nommer le nanomonde" afin de proposer un révérenciel commun aux acteurs publics et privés sont validées en 2008 avec l'adoption de la norme ISO/TS 27687 qui définit trois types de nanomatériaux : les nanoparticules dont les trois dimensions sont à l'échelle nanométrique, les nanofibres dont deux dimensions sont nanomètriques (la longueur de la fibre étant à une échelle micrométrique) et les nanofeuillets dont seule l'épaisseur l'est.

Par ailleurs, la norme soulève un point crucial pour la définition des nano-objets : "les nano-objets se trouvent souvent en groupes (importants), plutôt qu'isolés". Il existe des agglomérats de particules dont la taille globale n'est pas nécessairement nanométrique alors que la taille de tout ou partie de ses éléments l'est. Cette particularité a donné lieu à de longs débats sur le seuil à partir duquel des matériaux constitués en partie seulement de nanoparticules sont globalement qualifié de nanomatériaux. Un aspect essentiel en matière de gestion des risques et de suivi réglementaire, mais aussi en matière d'étiquetage des produits.

Distribution par taille et seuil

Afin de trouver une définition "claire et sans équivoque", le Comité scientifique européen des risques sanitaires émergents et nouveaux (CSRSEN) publiait en décembre 2010 un rapport relatif aux bases scientifiques permettant de définir les nanomatériaux. Ce document, rédigé à l'issue d'une consultation publique, a servi de base à la définition retenue par la Commission européenne.

Trois grandes conclusions s'en dégagent. Tout d'abord, "alors que les propriétés physiques et chimiques des matériaux peuvent changer avec leur taille, il n'y a pas de justification scientifique en faveur d'une taille maximale ou minimale unique associée à ces changements qui puisse être adéquat pour définir tous les nanomatériaux". Ensuite, le rapport souligne qu'il n'y a pas non plus de méthode ou série de tests unique qui puissent s'appliquer à l'ensemble des nanomatériaux. Enfin, le rapport juge que "la compréhension de la distribution par taille des nanomatériaux est essentielle et elle constitue la question la plus pertinente".

En d'autres termes, le Comité insiste sur le fait que la prise en compte des dimensions externes du matériau n'est pas pertinente car elle laisserait de côté les agrégats évoqués par la norme ISO. Le comité suggère donc de définir un seuil basé sur la proportion d'éléments nanométriques dans un matériau donné. Plus précisément, "un matériau pourrait être considéré comme un nanomatériau lorsque plus de 0,15% des composants du matériau (…) a une taille inférieure à la limite supérieure décidée". Quant à cette limite supérieure, le rapport note que 100 nanomètres (nm) fait office de référence, même s'il souligne par ailleurs que la pertinence de cette limite varie selon les matériaux considérés. Pour la médecine ou les cosmétiques, par exemple, certains spécialistes plaident pour une limite supérieure à 1.000 nm afin de mieux contrôler les risques éventuels.

50% des particules et 100 nm

Finalement, la Commission européenne a adopté en octobre 2011 la recommandation nº 2011/696/UE qui définit officiellement, un nanomatériau comme "un matériau naturel, formé accidentellement ou manufacturé contenant des particules libres, sous forme d'agrégat ou sous forme d'agglomérat, dont au moins 50% des particules, dans la répartition numérique par taille, présentent une ou plusieurs dimensions externes se situant entre 1 nm et 100 nm". Une définition qui devrait être réexaminée d'ici décembre 2014 pour "évalue notamment si le seuil de 50% fixé pour la répartition numérique par taille doit être relevé ou abaissé".

En l'occurrence, la question du seuil a déjà fait l'objet d'âpres négociations : la direction générale Santé et Consommateur de la Commission européenne militait pour que soit retenu le seuil de 0,15% préconisé par le CSRSEN, la direction générale de l'Environnement proposait un seuil de 1% et la direction générale Entreprises plaidait pour un niveau plus élevé, à l'image de celui qui a finalement été retenu.

De même, les dimensions des particules prises en compte (de 1 à 100 nm) pose problème pour le Bureau européen des consommateurs (Beuc) qui aurait souhaité un plafond plus élevé à 500 nm afin de tenir compte davantage de matériaux. Dans son argumentaire, le Beuc s'appuie notamment sur des expériences de toxicité réalisées sur des souris exposées à des nanotubes de carbones. Des effets sanitaires comparables à ceux causés par les fibres d'amiante auraient été décelés après l'inhalation de nanotubes de 165 nm de diamètre et de longueurs supérieures à 10 micromètres (μm).

Philippe Collet

© Tous droits réservés Actu-Environnement
Reproduction interdite sauf accord de l'Éditeur.

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