Si seulement quelques centaines de projets MOC sont situés dans les économies dites de transition, dont la Russie, le non-engagement du pays dans la poursuite du protocole fragilise le dispositif.
La Mise en œuvre conjointe (MOC) est un mécanisme similaire à celui de MDP qui permet à un pays développé de l'Annexe I de financer des réductions d'émissions de GES dans un autre pays développé. Elle aboutit à des unités de réduction des émissions (URE) échangeables sur le marché carbone. Chaque émission d'URE s'accompagne de l'annulation du volume identique de crédits carbone attribués au pays dans lequel est réalisée la réduction.
Selon une étude de CDC Climat Recherche, 314 projets MOC étaient enregistrés au 31 janvier 2012 soit 119 millions d'URE émises. Quatre projets sur cinq sont concentrés dans les économies en transition de l'Europe centrale et orientale. L'Ukraine (88 projets), et la Russie (27 projets) représentent à eux deux plus des deux tiers des crédits MOC. L'Allemagne (12 projets) et la France (17 projets) sont les pays les plus actifs en Europe de l'Ouest.
L'efficacité énergétique industrielle visée
Les URE délivrées proviennent à 32% de projet d'efficacité énergétique industrielle. La destruction de HFC-23 représente 17% des URE émises, les émissions de N2O et la distribution d'énergie 10,8% respectivement. En revanche, la part des projets relatifs aux énergies renouvelables est faible : le biogaz (0,4%), la biomasse énergie (1,4%), l'éolien (1,6%), la géothermie (0,4%). La raison de ce manque d'engouement ? Ces projets créent un risque de double comptabilisation dans les pays du système européen d'échange de quotas d'émissions (SCEQE) appliquant la MOC.
Majorité de "projets domestiques" en France
La France a émis 3% du total d'URE délivrées. Les projets sont concentrés sur la destruction du N2O industriel, le secteur qui sera intégré au SCEQE à partir de 2013. Certains projets français sont des "projets domestiques" pour lesquels l'investisseur et le projet se trouvent dans le même pays. Mis en place en France en 2007, le dispositif vise à stimuler les réductions d'émissions de gaz à effet de serre dans des secteurs d'activités non couverts par le SCEQE. L'Etat puise dans son stock d'unités de quotas carbone qui lui a été attribué pour délivrer des URE aux développeurs de projet, qui pourront ainsi intégrer le bénéfice des crédits carbone pour la rentabilisation de leur projet.Ces cinq années d'expérience ont cependant montré quelques imperfections dans le dispositif. C'est pourquoi le ministère de l'Ecologie a proposé en août 2012 un projet d'arrêté visant à l'améliorer et doper les crédits via un certain nombre de modifications.
L'avenir incertain du MOC post-2012
En plus de l'incertitude touchant les objectifs quantitatifs, trois grands pays ont déjà annoncé leur réticence à participer à la deuxième période d'engagement. La Russie, potentiellement le plus grand pays hôte de projets MOC, ne s'est pas encore engagée dans la deuxième période d'engagement, ce qui rend improbable la poursuite de ses projets. Le Japon, l'un des plus gros acheteurs de compensation carbone, a également annoncé qu'il ne participerait pas à la deuxième période d'engagement et le Canada a décidé de se retirer totalement du protocole de Kyoto.
Autre grande inquiétude : les restrictions des crédits Kyoto (MDP mais aussi MOC) en Europe, principal marché, qui entreront en vigueur au début de la troisième phase du SCEQE (2013-2020). D'autant que les crédits carbone provenant de projets impliquant la destruction de HFC-23 et de N2O parmi les plus émetteurs d'URE seront interdits.
Rachida Boughriet
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Retrouvez le dossier "Quelles suites au protocole de Kyoto ?"
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