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"Il faut que les négociateurs climat soient connectés sur les logiques entrepreneuriales et d'innovation", Nicolas Boquet

Le climat a rendez-vous à Paris Actu-Environnement.com - Publié le 07/12/2015

Pourvoyeuses de solutions pour lutter contre les changements climatiques, les entreprises veulent faire entendre leur voix auprès des négociateurs de la COP 21. Nicolas Boquet, directeur environnement énergie de l'Afep, détaille pour Actu-environnement les messages qu'elles veulent porter.

Le climat a rendez-vous à Paris  |    |  Chapitre 14 / 14
"Il faut que les négociateurs climat soient connectés sur les logiques entrepreneuriales et d'innovation", Nicolas Boquet
Environnement & Technique N°353 Ce dossier a été publié dans la revue Environnement & Technique n°353
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Actu-environnement : Quelle serait selon vous une COP 21 réussie ?

Nicolas Boquet : Le sujet essentiel de cette COP 21 est l'instauration d'une contrainte carbone la plus étendue possible dans le monde. L'Europe est aujourd'hui la seule réelle zone avec une forte politique climat fondée sur son système d'échange de quotas. 
Sachant que les entreprises françaises et européennes sont en concurrence avec des entreprises mondiales, l'objectif est de partager les efforts carbone pour éviter les effets de frontière.

AE : Défendez-vous l'instauration d'un prix carbone unique partout dans le monde ?

NB : A terme, oui. Il faut tout d'abord assurer une comparabilité des efforts carbone entre les pays. La question du prix du carbone doit être davantage affirmée a minima dans le préambule du projet d'accord. Les niveaux de réduction doivent être les plus proches possibles sur des périodes similaires. A titre d'exemple, les efforts des Etats-Unis, qui ont choisi 2005 comme année de référence, année de leur pic d'émissions de GES, sont en décalage de 20 points en retrait par rapport à l'effort européen sur la période 1990-2025 (-13 % par rapport à –33 % pour l'UE). Idéalement, il faudrait converger vers des réductions d'émissions de carbone par unité de PIB ou par habitant mais cela nécessite un consensus mondial encore loin d'être établi. Il faut arrêter cette division artificielle entre pays développés et en développement en parlant tout simplement de pays émetteurs. D'autant plus qu'en 2035, selon l'AIE, la somme des émissions de tous les pays en développement sera égale à la somme des émissions des pays de l'OCDE depuis l'ère industrielle.

AE : Mais cette question ne sera pas tranchée à Paris...

NB : En effet, c'est une question qui se pose dans les négociations à long terme. Dans l'accord global qui sortira de la COP de Paris, le seul objectif global contraignant qui y figurera sera celui d'une stabilisation à horizon 2100 d'une hausse des températures de 2°C. Par contre, l'accord renverra aux INDC et il sera important d'identifier le niveau de contrainte exigé pour la bonne application de ces INDCs.

C'est une bonne nouvelle que les pays développés et en développement s'engagent sur des réductions d'émissions entre 2020 et 2030. Les entreprises européennes sont en avance et souhaitent ne pas être les seules à faire cet effort.

AE : Que pensez-vous de l'idée de réviser régulièrement ces INDC ?

NB : C'est une bonne chose de réviser les engagements tous les cinq ans pour faire converger les INDC vers l'objectif de 2°C.
 Ce sera bien si ça s'applique à tous. Ce sera surtout une bonne occasion pour améliorer la comparabilité des efforts entre les pays. Nombre d'entre eux envisagent de donner un prix au carbone. Les efforts de réduction induits dans chaque pays devront être suffisamment comparables pour que ces systèmes puissent s'interconnecter. Cette notion d'interconnexion devrait se retrouver dans l'accord.

Par contre, il sera essentiel de bénéficier d'un dispositif de mesure, reporting et vérification qui soit suffisamment cadré pour éviter de traiter de la fausse monnaie. Car si on ne sait pas mesurer les émissions, on crée un marché carbone sur de la fausse valeur. Il est très important d'avoir des exigences minimales équivalentes pour tous les pays sur ces sujets.

AE : Quelle forme cela pourrait-il prendre ?

NB : Ça pourrait prendre la forme de lignes directrices définies dans le cadre de l'accord. Il faudrait des modalités de vérification partagées par les Etats et si certains d'entre eux choisissent de sous-traiter cette vérification, il faut que l'organisme soit accrédité conformément aux lignes directrices.

AE : Comment abordez-vous la question du transfert de technologies ?

NB : Il faut construire un système qui délivre les solutions nécessaires à l'atteinte des objectifs. Il peut y avoir la place dans l'accord de Paris pour un mécanisme de discussion entre Etats sur la recherche collaborative pour partager les bonnes solutions technologiques, tout en respectant les règles de droit de la propriété intellectuelle. Quand des entreprises ont investi longuement dans de la R&D, elles souhaitent que les règles habituelles applicables au droit de la propriété intellectuelle puissent continuer de s'appliquer. Si les entreprises ne peuvent pas se rémunérer sur leurs innovations, elles ne vont plus innover et ce sera préjudiciable pour le climat.

Pour les pays en développement, la question est de faire face au déploiement à grande échelle de ces technologies. Il faut un mécanisme qui favorise une élévation des compétences au sein même de ces pays afin qu'ils designent eux-mêmes leurs solutions. La coopération de la recherche publique entre Etats est la clef.

AE : Quel rôle les entreprises peuvent-elles jouer en matière de financement ?

NB : Les entreprises pourraient avoir un rôle à jouer puisque les Etats disposent de moins de moyens financiers qu'avant. Le sujet principal tourne autour des problèmes d'additionnalité des financements par rapport à l'actuelle aide publique au développement (APD). Les Etats se sont engagés à apporter 100 milliards de dollars supplémentaires par an à partir de 2020. Actuellement, nous en serions à 85 milliards de dollars par an, mais sans savoir si ce sont des aides additionnelles ou non.
 La difficulté est de savoir comment distinguer l'aide au développement traditionnelle de l'aide à l'adaptation au changement climatique.

AE : Comment les entreprises comptent-elles faire valoir leur point de vue auprès des Etats ?

NB : Pour préparer cette COP, nous avons mis en place dès l'automne 2014, avec le Cercle de l'Industrie et le Mouvement des entreprises de France (Medef), un business dialogue avec une trentaine de présidents d'entreprises internationales et une trentaine de délégations étrangères. Il y a eu trois réunions à ce sujet : en mai à Paris, en septembre à New-York et en octobre à Tokyo. Les conclusions de ces réflexions seront remises prochainement aux négociateurs car il faut qu'ils soient connectés sur des logiques entrepreneuriales et d'innovation. Surtout que les pouvoirs publics comptent sur les entreprises pour développer les technologies nécessaires à atteindre les objectifs.

Mais ce que nous souhaitons surtout, c'est pérenniser ce business dialogue pour les futurs COP. Nous devons saisir l'occasion de la COP 21 pour que l'exercice trouve une place légitime dans les années à venir.

Propos recueillis par Florence Roussel

© Tous droits réservés Actu-Environnement
Reproduction interdite sauf accord de l'Éditeur.

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