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Actu-Environnement

Recyclage des imprimés : la Presse a-t-elle démissionné de ses obligations environnementales ?

Telle est la question à se poser au vu de l'accord signé entre la Presse et Ecofolio. Au menu de la convention, campagnes de publicité gratuites pour l'éco-organisme contre exemption d'écoparticipation pour le recyclage des journaux.

Décryptage  |  Déchets  |    |  M. Brisac

Six organisations syndicales  (1) représentatives des éditeurs de publications de presse, ont signé mercredi dernier en présence de Phillippe Martin, ministre de l'Ecologie et Aurélie Filippetti, ministre de la Communication, une convention d'engagement volontaire avec Ecofolio, l'éco-organisme en charge de la gestion des déchets de papier.

Cette convention, d'une durée de trois ans, a notamment pour objectif (2) de sensibiliser les lecteurs et de promouvoir le recyclage par le biais d'actions de communication réalisées par les éditeurs de presse, précise le communiqué du ministère. Ces actions, qui ont déjà commencé, se traduisent principalement par la diffusion, "à titre gracieux", des campagnes nationales d'information, réalisées en collaboration avec l'éco-organisme Ecofolio, à travers les pages des journaux et magazines des éditeurs signataires de la convention. Les différents acteurs espèrent une "couverture au moins égale à 90% des Français de plus de 15 ans".

Pollueur non payeur ?

Au-delà des déclarations officielles, se pose la question de la démission des éditeurs de presse, économiquement affaiblis, quant à leurs responsabilités de producteurs d'imprimés. Rappelons en effet que la presse, les livres et documents administratifs obligatoires sont exonérés depuis 2008 de l'écocontribution, versée à l'éco-organisme dans le cadre de la responsabilité élargie des producteurs (REP), par l'article L541-10-1 du code de l'environnement. 

Parmi ces trois secteurs, celui de la Presse représente 25% du tonnage annuel des déchets papiers : une paille ! En excluant les déchets de papiers graphiques, c'est donc environ 800.000 tonnes de papiers qui ne sont pas assujetties à l'écocontribution. Un beau cadeau de la part du législateur. "On peut raisonnablement douter du caractère spontané de cette exonération précise David Ascher, directeur de publication d'Actu-Environnement qui explique que, malgré ses très nombreux syndicats, la presse sait faire cause commune dès qu'elle se sent menacée et entamer des démarches puissantes de lobbying auprès des pouvoirs publics". Sous couvert de sensibilisation du public, la presse économisera donc plusieurs millions d'euros dont-elle aurait du être redevable au titre de sa responsabilité élargie de producteur de papier.

"Vues les difficultés économiques de la presse traditionnelle (baisse régulière de lecteurs abonnés ou occasionnels) déjà sous perfusion des aides publiques, il y a fort à parier que le législateur a trouvé cet arrangement pour éviter de devoir financer lui-même l'écocontribution via des aides complémentaires à la presse, et d'en transférer la charge aux collectivités locales" analyse David Ascher.

Un manque à gagner pour la filière REP…

Cette exonération constitue en effet un manque à gagner non négligeable pour la filière REP. Pour chaque tonne de déchets de papiers, les collectivités déboursent entre 150 et 400 euros afin de financer la collecte sélective et le tri. D'après Nicolas Garnier, délégué général de l'Amorce (3) , ce manque à gagner annuel atteindrait les 36 millions d'euros, en se basant sur une participation d'Ecofolio à hauteur de 20%. Au final, ce sont donc les citoyens, à travers les impôts locaux, qui prennent en charge une grande partie des déchets de la presse, rappelle le délégué de l'association.

La distorsion engendrée par cette compensation de la presse avait déjà été pointée par Jean-Jacques Cottel, un des députés présentant le rapport d'étape sur la gestion des déchets dans le cadre des filières REP. Ce document soulevait un fonctionnement limité de certaines filières REP, notamment celle du papier. Le député regrettait que "certains écocontributeurs potentiels ne financent pas la filière [papier], [pensant] notamment à la Presse".

… compensé par de la publicité ?

L'éco-organisme se félicite pourtant de cette "démarche historique" qui devrait participer au "changement des comportements" du grand public et le mobiliser sur "l'importance du geste de tri". Alors que moins d'un papier sur deux est aujourd'hui recyclé en France, l'engagement du secteur de la presse est officiellement considéré comme "une véritable aide" par Ecofolio, lui permettant d'atteindre l'objectif fixé : une augmentation du taux de recyclage de 47 à 55% d'ici à 2016.

Interrogé par Actu-Environnement, Jean Viansson-Ponté, Président du Syndicat de la presse Quotidienne Régionale (SPQR) signataire de la convention, assure par exemple que la valeur marchande de la campagne de publicité accordée gracieusement à Ecofolio par son seul syndicat (4) représente 1,4 million d'euros.

Mais les campagnes offertes par les six organisations syndicales de presse visent des parutions de pages de publicités en été et en hiver, c'est-à-dire autant de périodes boudées par les annonceurs faute de lecteurs en congés. On peut donc raisonnablement douter de l'efficacité de cette "véritable aide" de la presse à Ecofolio. Pour preuve on notera que 20 minutes, leader de la presse d'information gratuite, a l'habitude de suspendre sa parution pour des raisons publicitaires pendant les vacances d'été ou de Noël du fait de l'impossibilité de "garantir une efficacité suffisante aux marques".

Au final, l'engagement volontaire des éditeurs de presse traditionnels auprès d'Ecofolio, ressemblerait donc plutôt à une nouvelle aide des pouvoirs publics, assortie d'un joli coup de pouce à la valorisation d'espaces publicitaires invendus, en exonérant une presse en déclin de ses obligations financières et du même coup… environnementales.

1. La Fédération Nationale de la Presse d'information Spécialisée (FNPS), au nom des sept syndicats de presse qu'elle représente (SPPRO, SPEJP, SNPAR, SPCS, SPMS, SPEPS, SPS) ; le Syndicat des Editeurs la Presse Magazine (SEPM) ; le Syndicat de la Presse Quotidienne Nationale (SPQN) ; le Syndicat de la Presse Quotidienne Régionale (SPQR) ; le Syndicat de la Presse Quotidienne Départementale (SPQD) ; la Fédération de la Presse Périodique Régionale (FPPR), au nom des quatre syndicats qu'elle représente (SPHR, SNPJ, SPJP, SNPR) ; l'association de la presse gratuite d'information (APGI).2. La mise en place d'un observatoire de la gestion des déchets issus des publications de presse et la participation du secteur aux réflexions menées par les acteurs de la filière de gestion des papiers sont d'autres engagements pris par les signataires de la convention.3. l'association nationale des collectivités, des associations et des entreprises pour la gestion des déchets, de l'énergie et des réseaux de chaleur4. via la régie PQR66.

Réactions1 réaction à cet article

Bonjour à tous,

J'entends bien les difficultés financières du secteur de la Presse. Comme nombres de citoyens ais-je envie d'ajouter. Et pourtant les citoyens payent encore et toujours plus, à cause d'autres personnes qui ne veulent pas assumer leurs responsabiltés envers la société et la Nature.
Pour moi cette convention ressemble plus à un arrangement entre amis qu'à une réelle avancée dans le recyclage du papier.

Une information m'a particulièrement surprise et choquée : moins de 50% du papier est recyclé !! Nous avons tout ce qu'il faut à disposition pour effectuer correctement le tri du papier. Alors je ne comprend pas ce qui se passe ? Que font les gens ?

C'est à chacun de faire un geste au quotidien pour notre Environnement et aussi pour notre porte-monnaie.

Laëtitia | 30 juillet 2013 à 15h19 Signaler un contenu inapproprié

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