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Décarbonation des réseaux de chaleur (4/5) : La biomasse en appoint de chaleur fatale à Issoire

À Issoire (63) se trouve l'un des rares réseaux publics français où la majorité de l'énergie consommée est issue de la chaleur fatale récupérée chez un industriel. Le reste provient pour l'essentiel de la biomasse et, pour une faible part, du gaz.

TECHNIQUE  |  Energie  |    |  C. Lairy
Décarbonation des réseaux de chaleur (4/5) : La biomasse en appoint de chaleur fatale à Issoire
Environnement & Technique N°386
Cet article a été publié dans Environnement & Technique N°386
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Ils se comptent sur les doigts d'une main en France. « Les réseaux publics fonctionnant avec de la chaleur fatale récupérée chez des industriels sont au nombre de quatre ou cinq », estime Tristan Thomazet, chargé d'affaires chez Dalkia, la filiale d'EDF qui gère plusieurs de ces réseaux : celui de Charleville-Mézières avec le constructeur automobile Stellantis ; celui de Dunkerque avec le sidérurgiste ArcelorMittal ; et celui d'Issoire avec Constellium, spécialiste des pièces en aluminium.

La difficulté avec ce genre de tandems, qui explique d'ailleurs en partie pourquoi ils sont si peu répandus, c'est qu'ils mêlent des temporalités très différentes : deux ou trois ans pour la plupart des projets portés par les industriels privés, versus cinq ou dix ans, voire davantage pour certaines collectivités.

Mis en service le 3 novembre 2022, le réseau de chaleur urbain d'Issoire (Energ'Iss) est ainsi géré en délégation de service public (DSP), au moyen d'une concession attribuée pour vingt ans à Dalkia qui, de son côté, a signé une convention de fourniture d'énergie avec Constellium pour dix ans.

L'hydroaccumulation pour lisser la production

Difficulté plus technique : il faut mettre en phase l'énergie récupérée et les besoins des abonnés au réseau. À Issoire, l'usine Constellium fabrique des pièces en aluminium pour l'aéronautique, les satellites et la défense. Principal employeur privé de la ville, le site fonctionne en trois huit : « À 3 heures du matin, explique Tristan Thomazet, il y a un gros pic de fourniture, avec une énergie qui n'est pas utilisée (…). Il n'y a aucune consommation à cette heure-ci : le chauffage est réduit, personne n'utilise d'eau chaude. »

Face à cette difficulté, le réseau a été équipé d'un ballon d'hydroaccumulation qui stocke l'énergie récupérée dans les fumées des fours de fusion. Le principe est simple : il consiste à utiliser cette énergie pour chauffer de l'eau à une température entre 90 et 100 °C. Cette eau est ensuite injectée dans le réseau en fonction des besoins. Le ballon constitue une réserve de 100 m3 d'eau à 90 °C, représentant autour de 2 500 kWh disponibles.

Avancer en marchant

D'autres pistes seront explorées plus en profondeur dans les mois à venir pour une utilisation optimale de la chaleur fatale produite par l'usine : par exemple, décaler les horaires de relance du chauffage dans les bâtiments publics ; ou, dans la piscine qui sera raccordée prochainement, suggérer de commencer à 4 heures du matin une réchauffe des bassins et de l'air intérieur qui a lieu actuellement à 8 ou 9 heures. « Le pilotage de l'intermittence va se développer au cours de la vie du réseau, résume Tristan Thomazet. Constellium et Dalkia vont parfaire leurs synergies au fil du temps. »

D'où vient la biomasse ?

L'Auvergne se prête bien à un approvisionnement local : « Nous avons une plateforme de traitement à Saint-Flour, à 50 km d'Issoire, et l'approvisionnement est réalisé dans un rayon de 50 km autour », détaille Tristan Thomazet. Il s'agit de copeaux de bois brut, non traité (catégorie A), issus de la taille et de l'entretien des routes, ainsi que de l'exploitation forestière (résidus de scieries). Grâce à sa filiale spécialisée Bois Energie France, Dalkia garantit des prix contrôlés pour la biomasse – à Issoire, ceux-ci sont révisés selon des formules qui permettent de visualiser les évolutions sur dix ans. « On ne va pas se retrouver dans une situation identique à celle observée sur les pellets, où les prix ont triplé en six mois », assure M. Thomazet.

Si l'usine devait s'arrêter, la chaudière à biomasse pourrait prendre le relai. En dernier recours, si elle faisait défaut, l'ensemble de la production pourrait être assurée grâce au gaz. « Économiquement, ce ne serait pas viable, mais cela permettrait d'assurer la continuité de service », confie Tristan Thomazet. « Notre priorité porte sur cette chaleur fatale qui existe, mais qui est inutilisée (…). La biomasse vient en complément : même si elle est considérée comme une EnR, cette ressource est utilisée spécifiquement pour produire de l'énergie. »

La chaleur fatale indispensable à l'équilibre économique du réseau

En configuration normale, c'est-à-dire quand 54 % de l'énergie du réseau est produite via la chaleur récupérée chez Constellium, 36 % par la combustion de bois-énergie et 10% par celle de gaz, la chaudière à biomasse fonctionne à 50 % environ de sa capacité (2,8 MW). Elle a en effet été dimensionnée pour, en cas d'arrêt de l'usine, maintenir a minima un taux de 60 % d'EnR&R dans le mix énergétique. Ce taux est nécessaire pour que le projet bénéficie des avantages liés à son caractère vertueux (subventions de l'Ademe, taux de TVA réduit, etc.). Néanmoins, au prix actuel du gaz (entre 200 et 300 euros le mégawattheure), l'utilisation de 60 % de biomasse ne permet pas de garantir le tarif négocié.

En d'autres termes, si le recours à la biomasse permet de sécuriser le fonctionnement du réseau, c'est l'utilisation de chaleur fatale qui se révèle indispensable à l'équilibre économique du projet dans son ensemble.

Réactions2 réactions à cet article

"Le ballon constitue une réserve de 100 m3 d'eau à 90 °C, représentant autour de 2 500 MWh disponibles."

Je pense qu'il s'agit plutôt de 2500 kWh.

Adun | 13 février 2023 à 13h55 Signaler un contenu inapproprié

Bonjour,

Vous avez raison, merci pour cette lecture attentive !
Précisément, ce ballon permet de stocker 100 mètres cubes d'eau entre 90 et 100°C, ce qui représente une réserve de 3500 kWh pendant une heure (moins sur une durée plus longue).

Christine Lairy Christine Lairy
13 février 2023 à 14h04
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