Financée conjointement par le CNRS (1,8 millions d'euros), le Conseil régional (1,8 millions d'euros) et le Conseil général (0,7 millions d'euros), cette nouvelle infrastructure permettra d'isoler des portions d'écosystèmes dans des enceintes et les soumettre à des variations de climat et de stress très variées. L'intérêt : mesurer les variations de fonctionnement induites par les changements d'environnement. La compréhension des mécanismes de réponse à ces changements permettra alors d'anticiper les altérations des services que les écosystèmes rendent à la société et d'améliorer les prédictions d'évolution du climat issues des modèles planétaires.
La manipulation des conditions environnementales dans des serres ou des chambres de culture se réalise régulièrement en biologie végétale et agronomie. De grands équipements (phytotrons) ont été construits dans les années 1950-60, et actuellement beaucoup d'universités et d'instituts possèdent des chambres climatiques de culture, souligne le CNRS.
D'autres scientifiques ont développé le confinement d'écosystèmes afin de pouvoir en contrôler le contenu ; lysimètres en hydrologie et en agronomie et mésocosmes en milieux aquatiques et marins qui ont été développés pour étudier la toxicologie et les relations entre la structure des réseaux trophiques, le fonctionnement de l'écosystème et les facteurs environnementaux.
Nées dans les années 1990, les écotrons représentent une nouvelle génération d'équipements. Ils combinent par l'utilisation d'enceintes confinées et d'une instrumentation ad hoc, le contrôle de l'environnement et des mesures du fonctionnement de l'écosystème.
En France, plusieurs laboratoires sont équipés d'enceintes instrumentées dédiées à la biologie végétale et à l'étude du fonctionnement des écosystèmes, ou de mésocosmes pour l'étude de systèmes aquatiques ou marins, cependant aucun de ces dispositifs n'a atteint une envergure internationale, estime le Centre national de la recherche scientifique.
Sur les trois plateaux expérimentaux (macrocosmes, mésocosmes, microcosmes)*, des consortiums internationaux d'équipes de recherche pourront ainsi mesurer les cycles du carbone, de l'eau, des minéraux, les émissions de gaz à effet de serre ou encore les changements et le rôle de la biodiversité. L'Ecotron permettra de faire varier les paramètres de l'environnement, notamment climatiques, et d'en mesurer les conséquences sur ces flux et stocks de matière et d'en analyser les mécanismes au travers de mesures biologiques sur les principales communautés d'organismes. Il permettra également d'étudier les changements de communautés sous l'impact de divers scénarii environnementaux, mais aussi d'analyser les réponses physiologiques d'individus appartenant à des espèces ou des populations différentes. Les résultats permettront de mieux comprendre le fonctionnement des écosystèmes et serviront à construire et paramétrer des modèles à différentes échelles, explique Bernard Delay, Directeur de recherche de classe exceptionnelle au CNRS, spécialiste de l'anthropisation des écosystèmes et de l'évolution de la biodiversité et qui fait partie du comité scientifique du projet. L'Ecotron pourra aussi servir à mettre au point de nouveaux instruments de mesure, ajoute-t-il.
Un autre projet d'équipement écotronique est en cours à Foljuif en région parisienne. L'Ecotron qui verra le jour à Montpellier sera particulièrement dédié à l'analyse des écosystèmes terrestres. Le plateau expérimental de Foljuif consacrera une grande partie de ses études aux milieux aquatiques, précise Bernard Delay.
Constitué de l'Ecotron de Montpellier, de la plate-forme côtière Medimeer à Sète, des Ecolabs et des bassins aquatiques de Foljuif, le réseau ainsi constitué est destiné à positionner la France sur le devant de la scène dans le domaine des recherches en environnement. Il vise à développer les capacités d'investigation offertes par la combinaison d'une répétition des unités expérimentales, d'un conditionnement environnemental de qualité et d'une puissante instrumentation.
La première expérimentation prévue pour l'Ecotron de Montpellier sera menée avec l'Inra de Clermont-Ferrand. Des tonnes de prairies de Clermont-Ferrand seront soumis à différents niveaux de températures et différents niveaux de CO2 atmosphérique.
*Le plateau macrocosmes
Le plateau macrocosmes est une succession linéaire de 12 enceintes de conditionnement de 35 m3 dans lesquelles on pourra insérer des échantillons d'écosystèmes intacts (5 m2 de surface en végétation, jusqu'à 1,5 m de profondeur, 8 à 10 t de sol). Ces macrocosmes sont typiquement dédiés à des études à court terme faisant suite à des manipulations in situ des écosystèmes ou bien à des études à moyen terme (3 à 5 ans) où le traitement expérimental est imposé dans l'Ecotron.
Le plateau mésocosmes
Le plateau mésocosmes pourra accueillir jusqu'à 24 enceintes également sous lumière naturelle. Les unités de base (1m2 de surface de végétation) pourront être associées par 2 ou par 4). Le plateau est également conçu pour pouvoir recevoir et analyser les nombreux lysimètres cylindriques standards actuellement en service en Europe (1m2 de surface, 2 m de profondeur). Ces mésocosmes sont typiquement dédiés à des études à court terme (3 mois à 2 ans).
Le plateau microcosmes
Le plateau microcosmes sera constitué de plans de travail équipés pour le conditionnement environnemental de microécosystèmes (1 à 200 dm3) et pour la mesure de processus de base (photosynthèse, respiration, transpiration...). Cette zone au niveau de sécurité P2 sera divisée en deux parties, l'une réservée aux expérimentations nécessitant un marquage radioactif, l'autre réservée aux expérimentations utilisant l'analyse des isotopes naturels. Des écosystèmes et organismes très variés pourront être étudiés.
Article publié le 04 octobre 2007