En 2021, le groupe Pochet entame une collaboration avec la société Metron, pour optimiser la consommation énergétique d'une partie de la ligne industrielle de son usine de production de flacons et de pots, en Seine-Maritime. Après un an et demi de préparation technique et humaine et de calibrage, le jumeau numérique créé par Metron pour anticiper et optimiser la production, informé en temps réel par des capteurs sur site, a été mis en action il y a quelques mois. Le sous-traitant de l'industrie du luxe communique d'ores et déjà sur le sujet, annonçant 27 % d'économies d'énergie sur une partie de son process de production grâce à la solution.
Construire sur l'existant
Le groupe Pochet possède huit usines sur le territoire français. Celle de Guimerville, en Seine-Maritime, spécialisée dans le verre, consomme l'équivalent d'une ville de 10 000 habitants, soit en moyenne 250 GWh de gaz et 50 GWh d'électricité chaque année. Poussé par son client Chanel qui, à l'instar de nombre d'acteurs du luxe, doit soigner son image en matière de décarbonation, Benoit Marszalek, directeur des opérations du pôle flaconnage, s'est mis en recherche, avec ses équipes, de solutions pour réduire ces ordres de grandeur. Avec on imagine comme horizon réglementaire la Stratégie nationale bas carbone, qui impose une réduction de 35 % des émissions de gaz à effet de serre d'ici à 2030. « Les solutions de compensation carbone rencontrées sur le marché n'auraient finalement fait que déplacer le problème et ne sont pas dans l'ADN RSE de nos actionnaires », explique Benoît Marszalek. Pour Vincent Sciandra, CEO de Metron, « une solution d'optimisation énergétique doit toujours se baser sur l'existant, pour conserver la rentabilité du tout ». Un argument qui pourrait avoir fini de convaincre Pochet, tant risques et rentabilité sont les deux parties d'une équation assez complexe à gérer chez les industriels.
Former et informer
À la différence des jumeaux numériques immergés dans l'administration système d'une structure, et conjugués quelquefois avec une hypervision (comme ceux développés par la société Stereograph), Metron vient se connecter au système existant, et ce faisant, à tout ce qui est déjà numérisé, afin d'abonder son modèle en données. Une récolte initiale est demandée pour une phase de calibrage et l'établissement d'un jumeau « dans des conditions idéales de laboratoire ». La fonction objective (formulation mathématique servant à déterminer la meilleure solution à un problème d'optimisation) du modèle sera alors travaillée à partir de ce premier jeu de données grâce à une technologie de type machine learning. Puis les données sont récupérées par le système chaque minute et relevées toutes les heures par les équipes pour déterminer un optimum entre le maintien de la production et la baisse de la consommation énergétique. « C'est comme si dans une pièce, on affinait la température continuellement en fonction des portes, qui sont ouvertes ou fermées, des rideaux, qui sont tirés, des personnes présentes ou non, de l'état d'encrassement de la VMC, etc. », explique Vincent Sciandra.
« Les analyses de notre modèle sont là uniquement pour donner des tendances, que l'humain se chargera ensuite d'affiner. Si celles-ci n'ont pas de sens, les équipes de Metron procéderont alors à un recalibrage. Si les collaborateurs du groupe Pochet les valident, alors elles donneront lieu à des changements de process », continue-t-il. Une rencontre entre l'homme et la machine qui ne va pas sans un apprentissage préalable. Benoit Marszalek indique que des formations en interne doivent encore être réalisées pour que les collaborateurs s'emparent des possibilités offertes par la technologie du jumeau numérique.
Perspectives
« La plupart des industriels que nous avons pour clients gardent pour eux les gains énergétiques qu'ils génèrent grâce à notre solution, afin d'être sûrs que cela ne serve pas à rogner les prix ou les marges, par exemple », explique Vincent Sciandra. Le groupe Pochet fait figure d'exception.
Si les résultats sont là et la solution se déploie pour l'électricité et le gaz sur les autres sites du groupe, reste à savoir dans quelle mesure l'existant pourra s'adapter à l'intégration de l'outil Metron dans ses process. Et si à l'instar de la conversion à l'hydrogène des sites industriels, il y aura toujours une part irréductible du process dont la numérisation proposée par Metron ne pourra s'emparer. Une analyse à laquelle Hélène Galy, responsable communication dans la structure, souhaite apporter une réponse : « Metron s'adapte à l'existant et la maturité de chaque industrie, et s'adresse à tous types d'énergie (électricité, gaz, vapeur, oxygène…). »