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Michelin avance sur la route du recyclage des pneus usagés

Depuis 2020, Michelin et plusieurs acteurs européens travaillent au recyclage des pneus usagés. Une première partie du processus est en bonne voie : la production circulaire de noirs de carbone indispensables à la fabrication de nouveaux pneus.

TECHNIQUE  |  Déchets  |    |  F. Gouty
Michelin avance sur la route du recyclage des pneus usagés
Environnement & Technique N°396
Cet article a été publié dans Environnement & Technique N°396
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Malgré les paroles d'une célèbre chanson, même quand c'est « noir », il peut encore y avoir de « l'espoir ». C'est du moins ce qu'essaient de montrer Michelin et ses partenaires à travers le projet BlackCycle. Ce dernier vise à transformer les pneumatiques usagés en noirs de carbone, une matière première secondaire mais non moins essentielle à la fabrication des élastomères de pneus neufs.

Boucler la boucle

Le noir de carbone est le composant principal des suies résultant de la combustion d'hydrocarbures. Sa couleur noire pigmente les pneus et ses propriétés chimiques leur confèrent leur résistance. Ce composé s'avère donc indispensable à la fabrication des pneumatiques, mais sa propre production est carbonée. Au total, un kilogramme de pneus équivaut à l'émission de 1,38 kilogramme de dioxyde de carbone (CO2). Avec BlackCycle, Michelin a donc deux responsabilités : réduire l'empreinte carbone de ses procédés et valoriser les déchets de ses propres produits.

“ Notre objectif est d'être capables de récupérer le gisement destiné à l'export pour incorporer davantage de matières recyclées dans nos produits ” Jean-Michel Douarre, responsable du programme de recherche de matériaux chez Michelin
Pour cela, le spécialiste de l'élastomère a opté pour la stratégie suivante : d'abord, un tri plus fin des pneus usagés collectés afin de ne conserver que ceux considérés comme hors d'usage. Ces derniers sont ensuite déconstruits (en séparant la bande de roulement des flancs) et déchiquetés. « Nous délions ainsi la base en caoutchouc, des éléments textiles et métalliques, explique Jean-Michel Douarre, coordinateur du projet et responsable du programme de recherche de matériaux chez Michelin. Les résidus de caoutchouc sont mélangés jusqu'à former des granulats, qui sont ensuite traités en pyrolyse. » Cette technique permet de les porter à une très haute température (600 °C) pour les décomposer chimiquement. Elle génère du gaz, réutilisé pour alimenter l'installation pyrolytique ou en cogénération ; un nouveau mélange de noirs de carbone et de cendres inutilisables ; et surtout, de l'huile de pyrolyse (ou tyre pyrolytic oil, TPO). Cette huile est riche en carbone et en hydrogène. Il faut la distiller plusieurs fois afin d'obtenir des noirs de carbone suffisamment purs pour être réinsérés dans les fourneaux de fabrication des pneus neufs.

Le tout permet de réduire le bilan carbone à 0,45 kg de CO2 par kilo de pneus fabriqués. « Nous travaillons aussi à réutiliser les distillats restants, pour en faire des plastifiants de type résine, également utiles à nos pneus, mais nous ne sommes pas encore sortis du laboratoire. »

Une volonté de recyclage étendu

Chaque année en Europe, environ trois millions de pneus usagés sont collectés et finissent leur vie de deux manières : la première moitié est valorisée énergétiquement en cimenteries ou réutilisée pour fabriquer des tapis et des terrains de sport, tandis que la seconde est exportée là où les normes de qualité sont moins élevées. Autrement dit, jusqu'ici, aucun pneu ne revient alimenter, d'une façon ou d'une autre, la filière initiale. « Notre objectif est d'être capables de récupérer le gisement destiné à l'export pour incorporer davantage de matières recyclées dans nos produits, de façon à émettre moins de gaz à effet de serre », résume Jean-Michel Douarre.

Après une première tentative à l'échelle française avec le projet Tyre Recycling en 2014, le pneumaticien a opté pour un consortium européen qu'il forme avec douze autres acteurs économiques et scientifiques de cinq pays. « Notre projet a évidemment pour but de nous donner une avance sur l'accès à la matière recyclée, mais il a vocation à se déployer sur l'ensemble de la filière industrielle, pour que dix fois plus de matières recyclées y circulent à terme. » Le projet BlackCycle, qui bénéfice d'un budget de 16 millions d'euros (dont 12 millions de la part de la Commission européenne dans le cadre du programme Horizon 2020), se conclura en juin 2024. « Il a déjà permis la production de plusieurs tonnes de noirs de carbone recyclés, utilisées notamment pour un pneu de bus développé par Michelin, avec, en sus d'autres matières recyclées, un taux de réincorporation de matières durables de 58 % », communique l'entreprise. Une production réalisée grâce au pilote de distillation d'huile pyrolytique monté sur le site de Sisener Greenval à Saragosse, en Espagne.

Michelin mène en effet un autre projet européen en parallèle, baptisé WhiteCycle. Réalisé en collaboration avec quinze partenaires (dont certains déjà impliqués sur BlackCycle), ce projet, lancé en juillet 2022, s'appuie sur un budget de 9,6 millions d'euros (dont 7,1 millions de subventions européennes) jusqu'en 2026. Il vise à retransformer la partie textile des coproduits du déchiquetage des pneus usagés, afin d'en récupérer le polytéréphtalate d'éthylène (PET), le dépolymériser et le recycler avec un niveau de qualité suffisant pour le réincorporer dans des pneus neufs. Seuls les déchets métalliques demeurent donc délaissés. Mais là encore, Michelin « y réfléchit aussi ».

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