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Pilotage énergétique : le jumeau numérique à la rescousse du GTB

L'optimisation énergétique de bâtiments tertiaires peut être réalisée grâce à l'interfaçage entre un jumeau numérique et la gestion technique du bâtiment. Les choix mathématiques de modélisation d'un jumeau ont un impact sur son coût écologique.

TECHNIQUE  |  Bâtiment  |    |  G. Boillot-Defremont
Pilotage énergétique : le jumeau numérique à la rescousse du GTB
Environnement & Technique N°398
Cet article a été publié dans Environnement & Technique N°398
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En 2020, la mairie de Courbevoie (Hauts-de-Seine) lance un appel d'offres pour un contrat de performance énergétique liés à ses bâtiments publics. Kipsum, société spécialisée dans l'optimisation énergétique créée en 2017, remporte le marché avec une réponse préparée en lien avec le prestataire maintenance-exploitation de la ville. Sa solution intègre l'utilisation d'un jumeau numérique afin d'anticiper les différents scénarios d'ensoleillement et d'occupation des lieux. Près de quatre ans plus tard, Kipsum communique sur un gain énergétique de 28 % en moyenne pour quatre bâtiments suivis, sur les 156 propriétés que compte la ville.

Une montée en puissance progressive

« Pour notre première collaboration avec Kipsum, nous avons choisi de leur confier deux bâtiments équipés de chaudières à gaz et deux autres reliés au chauffage urbain », explique Olivier Leçon, responsable du service énergie et fluides à la mairie de Courbevoie. Deux raisons à cela : premièrement, la collectivité souhaitait tester la collaboration et son efficacité avant de changer d'échelle ; deuxièmement, ces deux types d'installations possèdent des contrôleurs spécifiques qui rendent l'interfaçage avec la solution de Kipsum beaucoup plus aisée. À l'inverse, si le jumeau numérique venait à se coupler avec des radiateurs électriques – aussi compris dans le parc immobilier de la ville –, cela supposerait l'adjonction d'un régulateur en liaison avec des capteurs IoT assez onéreux.

“ Grâce au jumeau numérique, on peut estimer et anticiper les ouvertures de fenêtre, le temps de présence et, grâce à l'intégration des prévisions météos, effectuer une commande prédictive ” Philippe Chevalier, Kipsum
« La première étape de diagnostic a duré entre deux et quatre semaines. Durant ce laps de temps, nous avons récupéré un premier ensemble de données issues de capteurs posés dans les bâtiments. À partir de leur intégration dans notre jumeau numérique, nous avons émis une première série de recommandations », explique Philippe Chevalier, CEO de la start-up. À la suite de cette première tentative de modélisation et d'expérimentation du système qui a duré près d'un an, la méthodologie a été revue. « Les gains étaient là [de 12 à 37 % selon les sites, d'après Olivier Leçon], mais ils supposaient de faire intervenir des techniciens ou de changer des plannings, du jour au lendemain. » Devant cet inconvénient en termes de ressources humaines, la ville a alors demandé qu'une autre solution soit mise en œuvre.

Dès la deuxième année, le jumeau numérique de Kipsum s'est interfacé avec le système informatique de gestion technique du bâtiment (GTB) opéré par le prestataire de maintenance-exploitation, grâce à la mise à disposition d'un vecteur de commandes réactualisées toutes les quinze minutes avec 96 valeurs relatives à la climatisation, l'éclairage, l'hygrométrie, etc. « Notre jumeau numérique n'a rien d'une maquette 3D. Il s'agit d'un modèle multiphysique obtenu par des méthodes de machine learning, mettant en relation des données chaudes mesurées en permanence avec les données du bâtiment et du chauffage. On peut ainsi estimer et anticiper les ouvertures de fenêtre, le temps de présence et, grâce à l'intégration des prévisions météos, effectuer une commande prédictive. »

La réactualisation de cette modélisation du système permet à la jeune pousse, grâce notamment à une technologie de réseaux de neurones, de délivrer des recommandations chiffrées en fonction d'un optimum entre la diminution de la consommation énergétique et l'optimisation du confort thermique. « Cela apporte une valeur complémentaire à toute solution de gestionnaire technique du bâtiment (GTB) déjà installée. Le GTB nous permet de contrôler à distance les flux énergétiques de chacun de nos bâtiments. Mais avant ce travail d'optimisation énergétique, du fait du nombre de bâtiments dont nous sommes chargés, nous ne changions presque jamais le réglage des flux », complète Olivier Leçon.

« Nous atteignons maintenant des gains énergétiques allant de 15 à 41 %, selon les sites. Certes, nous allons certainement atteindre un palier, mais ces gains vont se maintenir », estime encore Olivier Leçon, qui, malgré quelques impairs dus aux limites du jumeau numérique (non-anticipation d'événements inconnus, comme les vagues de froid), se dit confiant quant à l'avenir de la collaboration de Kipsum avec la mairie de Courbevoie. En témoigne sa volonté de rajouter à la charge du jumeau 68 nouveaux bâtiments entre 2024 et 2025. Un changement d'échelle permis notamment par une mise à jour majeure du GTB de la ville.

Travailler le modèle mathématique pour réduire l'empreinte énergétique

« La plupart du temps, un jumeau numérique va se nourrir de simulations ou de données physiques. Ces modèles reposent sur des lois d'état (thermodynamique, gravitation) qui ont une expression mathématique, sous forme d'équations aux dérivées partielles couplées. En modélisant un système par une simple équation différentielle ordinaire non couplée, on perd une bonne partie de la physique posée grâce aux lois initiales », précise un connaisseur du sujet indépendant de l'entreprise Kipsum. En d'autres termes, deux approches prédominent dans la modélisation mathématique du jumeau numérique d'un bâtiment : soit les éléments sont considérés comme interdépendants, peu importe leur niveau de granularité ; soit il peut être décider d'en isoler certains. La première approche permettra de comprendre, par exemple, les transferts thermiques d'un étage à un autre.

Philippe Chevalier précise son approche quant à ce sujet : « Le temps de résolution d'un problème comportant des équations couplées non linéaires sera plus énergivore qu'une même approche linéarisée. C'est pourquoi nous optons pour la première si et seulement si elle apporte un gain significatif en matière d'optimisation énergétique. Il ne faudrait pas que le fruit de notre travail se trouve réduit à néant par le coût énergétique demandé pour y arriver. »

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