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[Pollutec] Quelles économies de matière avec la fabrication additive ?

En voie d'industrialisation, la fabrication additive – ou impression 3D – est source de réelles économies de matière. Mais peut-être pas là où on pourrait le plus les attendre...

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[Pollutec] Quelles économies de matière avec la fabrication additive ?

En supprimant le recours à un moule ou à l'usinage des pièces, d'une part, en favorisant leur allègement par des structures lattice (nid-d'abeilles) ou en treillis, d'autre part, la fabrication additive est sensée offrir aux industriels d'intéressantes opportunités d'économies de matière. Moins 25 % en poids pour des injecteurs de carburant de General Electric destinés à Safran, moins 40 % pour un support d'antenne du satellite Sentinel, fabriqué par le fournisseur de solutions en fabrication additive Eos, moins 75 % de matière pour une charnière de A320 elle aussi produite par Eos…

Les chiffres annoncés par certains acteurs du secteur en attestent, mais la réalité s'avère plus nuancée pour l'enseignant-chercheur à l'Ensta-Paris Fabien Szmytka : « Sur le papier, le constat est formidable. Mais les études dans ce domaine sont incomplètes. Elles se concentrent sur la mise en forme sans prendre en compte l'ensemble du cycle de vie, notamment la production des matériaux, poudre métallique, filaments de plastique ou granulés de polymères, et leur traitement en post-production. » Des étapes qui, selon une étude de l'Ademe publiée en 2017 (1) , devraient faire l'objet d'une « attention particulière ».

Encore des pertes

En ce qui concerne l'étape de production des pièces, les gains de matière dépendent par ailleurs du matériau choisi. S'il s'agit de polymères, l'impression 3D ne produit, en effet, pas de déchet. « Mais des progrès conséquents ont déjà été réalisés avec les procédés de moulage classiques. L'économie n'a donc rien d'extraordinaire », souligne Fabien Szmytka. Les choses se compliquent un peu avec la poudre de métal. Cette fabrication couche par couche évite bien les pertes liées à l'usinage ou au parachèvement. En revanche, la matière inutilisée lors de la fabrication sur lit de poudre voit ses propriétés se dégrader lors de son recyclage et ne peut être réutilisée, en mélange avec de la poudre neuve, que trois à cinq fois.

Pour chaque pièce réalisée, la déperdition s'élèverait ainsi à 20 % de son volume environ. Le gaspillage est encore plus important quand cette poudre s'utilise sous forme de projection. Une majeure partie, entre 50 et 65 %, se dépose à côté et s'oxyde en contact avec l'air. Une fois récupérée, elle ne peut plus être affectée qu'à des pièces de test ou à plus faible valeur ajoutée. En réalité, pour le moment, le gain de matière se situe ailleurs. Tout d'abord, dans la possibilité d'utiliser de la matière recyclée pour élaborer les polymères. C'est le cas d'Armor 3D, qui commercialise plusieurs fils d'imprimante à partir de sources inexploitées jusque-là, de déchets post-industriels tels que les bobines notamment.

Mais plus de durabilité

Mais le grand avantage de la fabrication additive réside surtout dans l'allongement de la durée de vie des objets et des appareils. Cette longévité peut résulter de la capacité de l'impression 3D à fabriquer des produits plus résistants. Les injecteurs de carburant ainsi conçus pour Safran bénéficieraient d'une durée de vie multipliée par cinq. Cette qualité trouve aussi sa source dans la possibilité de créer des pièces de rechange, à la demande, sur place ou non, pour la réparation ou la maintenance.

“ Les études ne prennent pas en compte l'ensemble du cycle de vie.  ” Fabien Szmytka, Ensta-Paris
Une aubaine pour des entreprises comme la SNCF qui s'appuient sur du matériel roulant amortissable à très long terme et qui, parfois, ne trouvent même plus de pièces de rechange sur le marché. « Mais de plus en plus d'entreprises de l'équipement de l'habitat ou de l'électroménager, comme Seb, intègrent la démontabilité de leurs produits dans leurs process, dès la conception, pour favoriser ce remplacement des pièces, précise Amélie Vaz, responsable des études et de la prospective à l'Institut national de l'économie circulaire. Cela va de pair avec les changements de pratique en termes de consommation ou d'achats publics, la loi Antigaspillage pour une économie circulaire et le développement des fab labs. »

Et plus de réparabilité

Cette technique sur mesure facilite aussi la réparation des objets, par le dépôt de matière sur une zone fissurée par exemple, ou grâce à l'utilisation de matériaux autoréparants qui ne pourraient être sélectionnés autrement, parce que la température de fusion diffère d'une matière à l'autre ou que certaines zones ne sont accessibles qu'aux robots. À la clé : des objets quasi neufs aux qualités optimales presque sans dépense de matière première. « Ici, les gains sont gigantesques, constate Fabien Szmytka. Les acteurs de l'énergie, qui utilisent des pièces de grande taille, et ceux de l'aéronautique, qui ont de toutes petites séries, apprécient. » Autre atout de la création de pièces à la demande et de la réparation : elles limitent le stockage. « C'est autant de matière première non mobilisée et d'espace libéré pour d'autres fonctions », met en avant Amélie Vaz. C'est aussi moins d'emballages et de transports… La fabrication additive ne s'applique pas encore à tous les matériaux, toutes les tailles de pièces ou tous les secteurs. Les temps de fabrication restent contraignants et la fin de vie des objets est mal prise en compte. Mais les progrès technologiques, dopés par l'intelligence artificielle et la croissance du marché, devraient faciliter l'amélioration rapide de ses performances. En 2019, l'institut Xerfi prévoyait une croissance de 20 % du chiffre d'affaires de ce secteur au plan mondial.

Nadia Gorbatko

1. Ademe : « Encourager la réparation via l'utilisation de l'impression 3D et des espaces de fabrication numériques – état des lieux et pistes d'actions », juin 2017.

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