Pendant quatre semaines, dans une exploitation agricole, le long de l'autoroute A6, Airparif a mesuré la concentration de polluants dans l'air, et l'Inra, celle dans les plantes (dans les plantes de Raygrass, plante herbacée fourragère), pour le projet "Pollution de proximité, Transport et Agriculture". Résultat : les mesures ont permis d'observer une augmentation des concentrations de polluants et des dépôts métalliques liés au trafic, à mesure que l'on se rapproche de l'autoroute A6. Et si la pollution atmosphérique expose les personnes à des problèmes respiratoires, le risque de dépôts sur des produits alimentaires est indéniablement tout aussi important.
Presque 50% des exploitations agricoles franciliennes concernées
"Pour le dioxyde d'azote, l'impact de l'autoroute est toujours observable sur le site de mesure placé à 120 mètres de l'axe. Pour les dépôts de fer, l'impact est perceptible jusqu'à 30 mètres", et jusqu'à seulement quelques mètres pour le plomb et le cuivre, rapporte Airparif. Du cadmium a aussi été détecté à des niveaux très faibles.
Les mesures semblent toutefois indiquer que les niveaux de dépôt de plomb et cadmium mesurés sont en dessous des normes concernant la consommation de légumes.
Par ailleurs, d'après les
Seule 1,5% de la surface agricole utile régionale se trouve à moins de 50 mètres d'une route de niveau de trafic supérieur à 4.500 véhicules par jour, mais ces zones sont des secteurs privilégiés de maraîchage et d'arboriculture, plus exposées aux polluants que des céréales, protégées par leur enveloppe.
Respecter les distances de sécurité
Dans ce projet "Pollution de proximité, Transport et Agriculture", les sociologues de l'Inra ont aussi mené l'enquête auprès d'agriculteurs dans deux régions agricoles franciliennes à systèmes de production différenciés (Plaine de Versailles à dominante céréalière ; Plaine de Bière à dominante maraîchère) afin de connaître la politique de localisation des agriculteurs. "La pollution atmosphérique liée au trafic routier n'est pas un déterminant courant des décisions de localisation des cultures", rapporte l'étude. D'ailleurs, seuls deux cas d'adaptation se dégagent de l'échantillon. D'autre part, il n'existe dans les filières agricoles que trois secteurs qui intègrent des critères de distances par rapport aux routes : "les céréales dans certains créneaux de niche, peu présents en Île-de-France, l'alimentation infantile et les herbes aromatiques". Les cahiers des charges incluent ainsi des distances de 250 ou de 50 mètres (herbes aromatiques) d'éloignement entre les parcelles cultivées et les routes, et des intensités de trafic de 5.000 ou 15.000 véhicules par jour selon les secteurs commerciaux.
L'institut de recherche agronomique rapporte que "les agriculteurs interrogés envisagent mal de supporter seuls le coût des nuisances liées au trafic", c'est-à-dire la réduction des surfaces cultivables. Or, les solutions d'aménagements ponctuels le long des axes pour faire écran et absorber une partie de la pollution ne paraissent pas envisageables pour des raisons paysagères, financières ou foncières.
Toujours d'après l'Inra, les associations environnementales se révèlent "prioritairement préoccupées par l'insécurité, le bruit, les vibrations ou la saturation des réseaux, problèmes sur lesquels elles peuvent agir directement". Or, l'Inra reconnaît que le traitement de la problématique de la pollution de proximité suppose une prise en compte à un niveau plus global du territoire régional, par des mesures de réduction de la pollution à la source et de rationalisation des infrastructures de transports.
Évaluer le risque alimentaire
En conclusion de son rapport, Airparif indique que, compte tenu de certaines incertitudes liées aux mesures de dépôts d'Eléments Traces Métalliques (ETM), une nouvelle campagne de mesure sera effectuée, sur une période plus longue, de trois mois, et avec plus de précisions, afin de pouvoir valider les simulations de dépôts. De même pour le volet agriculteurs et filières : il s'agit désormais d'analyser les conséquences de l'application des distances de sécurité exigées par les cahiers des charges, "jusqu'à l'évaluation concrète du risque alimentaire".