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Actu-Environnement

Les producteurs de légumes de Normandie s'investissent en faveur de la biodiversité

À l'heure où la biodiversité fait l'objet de nombreuses études, conférences et autres plans d'actions au niveau international et national, les légumiers normands mettent en place un programme pour la préserver dans le cadre de leur activité.

Agroécologie  |    |  F. Roussel
Les relations entre agriculture et biodiversité sont complexes et ambivalentes. La diversité du vivant est le matériau de base de l'agriculture sans lequel il serait impossible d'obtenir des productions variées et adaptées à de nombreuses utilisations. Mais, la biodiversité est aussi une source de contraintes que l'agriculteur doit gérer : les mauvaises herbes, les ravageurs de cultures, les micro-organismes pathogènes, etc. De nombreuses études révèlent aujourd'hui que l'équilibre qu'entretenait l'agriculture avec la biodiversité par le passé a été rompu. La spécialisation, la concentration et l'intensification de la production agricole qui se sont développées au cours des dernières décennies sont largement reconnues comme des menaces potentielles pour la conservation de la biodiversité.
Aujourd'hui, on commence à comprendre que la biodiversité est intimement liée au fonctionnement des écosystèmes et qu'il est temps de considérer les parcelles agricoles comme des écosystèmes à part entière, certes artificiels mais en relation étroite avec les écosystèmes naturels. Ainsi, un message semble se propager dans le monde agricole : la biodiversité est bénéfique à la production agricole sous réserve qu'elle soit bien gérée.

Convaincus, les producteurs légumiers de Basse-Normandie passent à l'acte dans leur exploitation. Depuis de nombreuses années, le SILEBAN (Station d'Investissement pour l'Expérimentation et le Développement des cultures Légumières et maraîchères de Basse-Normandie) étudie plus particulièrement les ravageurs des cultures et leur auxiliaire, ennemis naturels. À la diversité des espèces légumières cultivées répond une diversité de pathogènes et ravageurs et également une diversité d'auxiliaires. Les études du SILEBAN ont montré que certains auxiliaires sont suffisamment présents pour influer sur la population de ravageurs ce qui sous-entendrait une utilisation limitée voire inutile en produits phytosanitaires.
Cependant, le but n'est pas de laisser les équilibres s'établir de façon naturelle mais consiste en revanche à mettre en place des mécanismes régulateurs préventifs. En effet, le temps de retour à l'équilibre par le cycle « prolifération du ravageur / prolifération de l'auxiliaire / régulation du ravageur par l'auxiliaire » est trop long pour être économiquement supportable car les dégâts sont irrémédiables.

Forts de ce constat, les responsables professionnels de la filière se sont fixé un programme d'actions pour la période 2007-2013 basé sur la mise en œuvre de moyens de lutte alternatifs à l'utilisation des produits phytosanitaires pour la préservation du capital de production des cultures contre les atteintes des ravageurs et maladies. Ils prévoient pour cela, l'aménagement d'espaces de production en « espaces de compensation écologique » pour maîtriser et contrôler les transferts des intrants, lutter contre l'érosion grâce à un couvert végétal pérenne et réguler naturellement les ravageurs des cultures par leurs ennemis naturels.
Par ailleurs, ils misent sur ces espaces pour multiplier les sources de nourritures pour la faune et permettre à des espèces non spécifiques de se développer et de rééquilibrer les populations d'insectes.
Les espaces de compensation écologique seront implantés principalement le long des haies et talus existant sous forme de bandes de 3 à 5 mètres de large. Ces espaces seront composés dans un premier temps de graminées telles que les Dactyles, Bromes ou Fétuques. Ils seront entretenus uniquement mécaniquement sans apport d'intrants et les haies et talus seront entretenues dans le respect des périodes de nidification.
Ces nouveaux espaces de compensation écologique seront disposés en fonction des risques de transfert de polluants dans les eaux de ruissellement. Leur localisation sera déterminée par un Système d'Informations Géographique qui analysera la topographie locale pour assurer la continuité écologique de corridors de circulation.

L'activité légumière bas-normande se concentre principalement sur le littoral de la Manche (Val de Saire, Créances, Baie du Mont St Michel) et du Calvados (Côte de Nacre). Valorisées par les conditions climatiques très douces du littoral bas-normand qui évitent la récolte systématique anticipée avec stockage en chambre froide humide, 1.200 exploitations légumières se répartissent sur ces espaces (carotte, pomme de terre, poireau, chou fleur et navet). Pour la filière et les producteurs qui la composent, ce programme « biodiversité » établit pour les dix ans à venir, doit créer un véritable laboratoire à ciel ouvert d'une dizaine de milliers d'hectares.
Il fait suite aux mesures agri-environnementales déjà mises en place par la filière et à leurs succès auprès des producteurs. En effet, les producteurs légumiers de la Manche, après 30 ans de développement régulier en monoculture, ont intégré les mesures agri-environnementales au début des années 90 : rotation des cultures, diminution des apports azotés et phosphatés, reconstitution du paysage bocager avec plantation des haies. Grâce à une très forte adhésion des producteurs à ces mesures, le Comité Économique Fruits et Légumes de Normandie et le SILEBAN témoignent de résultats tangibles : traçabilité de la production, optimisation de la qualité des légumes, disparition d'une production intensive sur la zone, baisse conséquente des nitrates avec pour preuve une diminution très nette de la teneur en nitrates des eaux pour l'ensemble des forages sur le Val de Saire. Désormais convaincus de l'efficacité de ces mesures, les producteurs de la région passent à la vitesse supérieure en s'attaquant à la biodiversité. La mise en place d'espaces de compensation écologique de ce type dans la production légumière ne répond pas à des obligations réglementaires et ne fait pas l'objet de subventions pour l'instant.

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